vendredi 19 décembre 2014

Histoire du Ban de Jalhay


19 juin 1879.

... Je dois encore ajouter des liens (corriger les anciens liens) et  ajouter des images...

Je trouve ce récit très intéressant et de plus, ces deux livres sont très difficiles à trouver donc je me suis permis de les scanner et de les completer par des liens ou des images qui n'existaient pas fin du 19° siècle. 
Je pense que l'amateur averti se fera un plaisir d'acquérir un des quelques exemplaires (ou les deux tomes!) qui circulent encore mais il se fera aussi un plaisir de pouvoir effectuer des recherches sur un NOM, un fait, ou sur une année sur ce texte digitalisé ce qui est assez difficile initialement sur l'edition papier.  
Si quelqu'un trouve que ma démarche peut le léser, je me ferais un devoir de supprimer ce blog mais d'afficher le commentaire me demandant de le supprimer.


Bonne lecture à tous et merci à Jean Simon RENIER !

Jean CAMPIONI
Dec. 2014

Remarque: Bre, comme vous l'aurez certainement deviné, est l'abréviation de Bourgmestre.

AVANT-PROPOS.



  Tant de lacunes existent encore dans l'historique du Marquisat de Franchimont, que chacun de ses fils devrait prendre à cœur de les combler dans la mesure de ses forces. Que de documents précieux gisent encore négligés ou exposés à la destruction par l'indifférence ou l'esprit de lucre, qui vend les vieux papiers trop souvent sans examen.
  Les archives de l'ancien Château d'Andrimont, dont les derniers Seigneurs furent codécimateurs de Jalhay, les restes des archives de cette dernière commune, les registres de sa Cour de Justice, conservés aux archives de la Province et des papiers particuliers, nous permettent d'offrir ici une suite de faits relatifs à cette localité, intéressante à bien des titres.
  Ces recherches ont été d'autant plus attachantes que ce point de notre sol, oublié pour ainsi dire par les historiens, possède une population particulière. Attachée avec amour au sol natal, elle resta fidèle à ses us et coutumes au point de conserver jusqu'à nos jours son costume local ancien, utile, rustique et pittoresque à la fois.
  Nous avons cru devoir faire œuvre de réparation et de justice parce que l'on a trop peu rendu d'hommages à la bravoure étonnante qu'eut à déployer le Ban de Jalhay. Car il eut à lasser, en quelque sorte, les malheurs qui l'assaillirent pendant des siècles, en luttant sans trêve contre les éléments et les hommes.

  Son courage invincible lui mérita l'honneur de marcher au premier rang à tout appel de la patrie menacée. Le premier rempart rencontré par l'ennemi était en général celui des robustes poitrines Jalhaytoises et des cœurs dévoués qui y battaient. Jusqu'à la fin du siècle dernier, ils jouirent de cet honneur magnifique, dont ils se montrèrent dignes toujours.
  Etait-ce l'inclémence de la nature et la permanence du danger qui donnèrent à la population cette énergie rare, une valeur à toute épreuve? Le fait est que si, d'entre les Gaulois les Belges furent les plus braves, les Franchimontois furent des plus braves d'entre les Belges et le Ban de Jalhay fut le plus brave d'entre ceux du Franchimont.


DU BAN DE JALHAY


Cette partie agreste du sol belge semble avoir toujours appartenu au Franchimont et suivit la destinée de celui-ci lorsqu'il fut cédé vers l'an 1012 à la Principauté de Liège.

De très ancienne date, Jalhay fut le chef lieu de l'une de ces juridictions dites Ban, soit parce que chacune était l'apanage d'un seigneur Banneret, c'est-à-dire, ayant droit de porter bannière à l'armée, ou à cause du banc ou siège judiciaire y établi.

  Ces districts étaient au nombre de cinq au dit Marquisat. 
A savoir : Theux, Verviers, Spa, Sart et Jalhay.

  La configuration territoriale de ce dernier est conservée à peu de chose près par sa commune actuelle, dont la superficie est de 5307 hectares, 13 ares et 90 cent. Elle présente une sorte de losange ayant environ huit kilomètres, du Nord au Sud, sur douze de l'Est à l'Ouest.

  Ce quadrilatère, confinant à sept communes, se trouve délimité par huit cours d'eau comme suit : 

• A l'Est, il est séparé de Membach par le ruisseau du Drossart et la Gileppe, y compris le bassin et le barrage devenus célèbres. 

• Au nord, de Goé et de Limbourg par la Borchenne ; de Stembert par le ruisseau de Mariomont, dit aussi de Secheval.

• A l'Ouest, de Polleur par les ruisseaux delle Peile et de Helivy. 

• Au sud, de Sart par le Hoegne, le ruisseau dit Sawe. 

• Enfin, de ce côté méridional, la frontière d'Allemagne complète le pourtour, par un trait droit de deux kilomètres, en longeant le cercle de Malmedy depuis la 152e borne frontière jusqu'à la 156e. 
Celle-ci est posée à l'Est de la Barraque-Michel, près de la fontaine Perigny, source de la Helle.
  
En outre des dits courants, le point culminant de la commune qui nous occupe : 

• verse dans la Gileppe les ruisseaux de Loubas et de Jelorux, 
• dans la Hoegne ceux de Mouse en Fagne, des taureaux, de Dison, sur lequel est placé le moulin à farine, et de pré Copa; 
• le ruisseau de Mariomont reçoit celui du Grand pré.


  Cet ensemble hydrographique, aussi semé de quelques filets d'eau minérale, est le réservoir naturel auquel Verviers doit les eaux de sa distribution, y compris celles de Mangombroux fournies surtout par les ruisseaux delle Peile et de Mariomont.

  Il est intéressant de voir ces eaux descendre du point le plus élevé de la Belgique et de rencontrer sur ce terrain marécageux des enceintes, formées de relevés de terre, qui furent prises pour des camps anciens. 
Feu M. Bidaut, le créateur du bassin de la Gileppe, les considéra comme étant des viviers étagés sur la Fagne pour recueillir le trop plein des sources. C'était donc un système y établissant des réserves en drainant ces hauteurs.

Le Ban de Jalhay fut, en 1795, incorporé au département de l'Ourthe, qui eut Liège pour chef-lieu. Aujourd'hui, en 1879 il fait partie de l'arrondissement administratif et judiciaire de Verviers, et du canton de Limbourg pour la milice et la justice de paix.

 Au lieu dit Baraque-Michel, le sol de la commune de Jalhay atteint l'altitude suprême de la Belgique, ou 672.15 au-dessus du niveau de l'Océan. C'est à ce point élevé qu'elle touche à la Prusse rhénane.

Son territoire compta de bonne heure, comme agglomérations bâties, celles qui furent désignées jusqu'au 17° siècle par ces mots : « les cinq villes du Ban c'est-à-dire : 

• 1° Surister, siége seigneurial du Fief de ce nom, 
• 2° Foyr, 
• 3° Charneux,
• 4° Herbiester.  
• 5° Jalhay. 
      Ces trois dernières qualifiées ensuite du nom de village ou de hameau. 

Pour cette dernière localité, un document de l'an 1523 s'exprime comme suit :

« Henri Ernotte, le vieux, vend une cour, maison et assise extantes en la ville de Jalhay ; joindant au reaulx chemin, et à l'enconstre de la grosse tour. » 

Un édit de Gérard de Groesbeck la dit « ville et Justice » .
Un écrit de 1610 lui donne les titres de « ville, hauteur et seigneurie de Jalhea. »

Ce titre de ville lui est accordé parfois encore jusqu'au siècle dernier, témoin un acte officiel de 1779. A partir de la fin du 17e siècle, il est plus généralement nommé burgh ou bourg, ainsi que s'exprime un édit de Louis XIV daté de 1682. 

C'est ce titre moyen que nous adoptons, quoique, par suite de destructions subies, on ne lui accorde plus, en général, que celui de village et lui-même, en ce moment, se désigne modestement ainsi. Cependant ce dernier titre lui est aussi donné par deux écrits de 1587, et un récit de 1647, comme on verra.

  Le sol de sa commune, contigu aux hautes fagnes, est fait de roches quartzeuses et schisteuses, recouvertes d'une glaise imperméable. L'humidité qui en résulte et l'élévation du terrain en rendent la culture pénible et ingrate. Une bonne partie est encore occupée par des landes et tourbières.

  Le tout y tient d'ailleurs à la 5e région agricole de la province de Liège, comprenant cette zone infertile touchant au Luxembourg et au sol germain. Mais l'opiniâtreté laborieuse des habitants y conquiert chaque année de nouveaux espaces fructueux par l'essartage ou écobuage. A force d'engrais, ils en obtiennent seigle, orge, avoine et des pommes de terre d'excellente qualité.

  D'autres ressources sont fournies par le bois à brûler, les écorces de chêne, la culture des choux verts, la fabrication des balais, l'élève du bétail, et le beurre que l'on y fait a très bonne saveur. Une fabrique de sabots s'établit naguère près de Surister, au lieu dit « Croix du petit Jehan » ; elle s'est transportée plus haut, mais outre frontière.



  Le Ban de Jalhay fut le premier du Franchimont où l'on cultiva la pomme de terre qui devint l’un de ses produits les plus appréciés, surtout les espèces hâtives. Les habitants en faisaient leur nourriture et un commerce important avant 1730. Nous les y voyons citées sous le nom de Poires de terre et Crompières, en une supplique de 1747 contre des soldats qui les maraudaient à Surister et à Charneux. Le nom de taupinambour (topinambour) leur y était aussi donné en 1779. Au dit Ban le charriage et le labour se finit avec des bœufs à peu d'exception près.
  
Cette région, située sous un ciel âpre, mais pur et vif écartant souvent les épidémies, donne la santé florissante à une population très robuste dont la caractéristique semble être le travail ardu, au caractère tout empreint de résolution, d'inébranlable fermeté. De plus, serviable, honnête et modeste par dessus tout.
  
Là, agit une race typique, vivant de soi, perpétuant les mêmes familles depuis des siècles, ne formant d'alliances pour ainsi dire qu'entre elles, possédant encore toute la vigueur primitive et une énergie exceptionnelle.
  
De cette population, l'historien Detrooz qui ne flattait guère, a dit :

« Elle force la terre à céder à ses sueurs et à lui donner la vie. Tout ce que l'homme peut faire pour la gagner, l'habitant de Jalhay l'exécute sans plainte, sans murmure ni regret, si ses peines sont récompensées même par le plus petit profit."

  Ces paroles sont d'une exactitude scrupuleuse. Cependant, sans contester en rien la valeur de ces vertus natives, nous devons ajouter que si la résignation et la patience naissent des douleurs, le Ban de Jalhay devait absolument acquérir ces qualités, tant il eut à subir de désastres et de misères.

 Il les dut en grande partie à sa situation, se trouvant à l'extrême frontière Sud-Est du Pays de Liège et sur le seul grand chemin ouvert alors au Franchimont vers l'Allemagne qu'il atteignait par une issue resserrée entre les pays de Stavelot, Limbourg et Luxembourg. C'était à l'extrémité Sud-Est du Ban que se trouvait cette table de pierre, souvent citée, à laquelle quatre souverains pouvaient s'asseoir en restant chacun chez soi, ses quatre faces étant frontières des dites principautés et duchés.
  
Celui de Luxembourg y touchait par le Comté de St-Vith. Une route antique avait traversé ces parages; or, il y a quelques années qu'entre ce point de quadruple limite et la Baraque-Michel, les pluies mirent au jour, en un terrain marécageux, un reste de chaussée faite d'énormes troncs de sapins. Là des passants nous dirent à cette vue: C'est la chaussée de Charlemagne ! Ils étaient donc l'écho d'une tradition.



  Le peu de distance qui existe entre ce point et Monjoie peut militer en faveur de leur assertion ; cependant ce reste de grande voirie nous parut bien appartenir à la route romaine dite Mansuerisca. De celle-ci la belle carte belge du Dépôt de la guerre donne encore aux points susdits, un tronçon de deux à trois kilomètres, allant du Sud au Nord.
  Quant à l'artère traversant Jalhay de l'Est à l'Ouest et passant par Verviers, elle se nommait la grande route du Brabant ou chemin royal. « Par-là était passée toute la cavalerie de Charles-Quint »  dit un acte local ancien.
Malheureusement, par cette voirie, le Ban était foulé sans trêve par des bandes armées et les habitants traités sans pitié ni merci. Jalhay, marche de la principauté Liégeoise, semblait être une sentinelle dont le sort était d'être surprise avant que le secours lui advienne.
  C'était la première agglomération que rencontrait l'ennemi après avoir franchi les vastes landes de l'Eifel et de l'Ardenne. En outre elle se trouvait des mieux situées pour observer à distance et sûrement cette forteresse de Limbourg dont la position avantageuse et la force excitaient la convoitise des puissants. Or les sièges nombreux que cette place subit entraînaient pour les localités voisines, pour le bourg surtout, les conséquences les plus funestes. Et l'on verra ci-après combien sa commune eut à supporter de maux par l'infernal fléau de la guerre.
  En ce qui concerne l'origine de Jalhay, divers indices montrent que le sol qu'il occupe fut habité dès les temps antiques, témoin lès monnaies romaines rencontrées dans les scories de ses restes d'exploitations métallurgiques. Mais si l'on en croit la tradition locale, il dut sa fondation aux Seigneurs de Surister qui, à une époque. éloignée, élevèrent sur ce point une maison de chasse, distante de vingt minutes, à l'Est, de leur domaine.
  Comme preuve, l'on cite les dénominations du quartier principal du bourg, lequel est divisé en deux parties dites haute et basse chinnerie. Noms que les anciens d'entre les habitants assurent être dérivés de chiennerie.
  De fait la fraction intermédiaire, que l'on peut dire être le coeur du chef-lieu, se nomme la ville, sans nul doute de la villa  qui y fut établie. A celle-ci fut ajoutée vraisemblablement la tour que Jean Groulard fit bâtir 'à Jalbay l'an 1450. 
  C'est du reste en ce quartier, ou vinàve, que s'élevait le château dont les ruines, qui nous parurent dater du 15e au 16e siècle, ne disparurent qu'en 1850.

  Tout parait prouver qu'a une époque éloignée Jalhay prima Surister, grâce à la route qui le traversait.
Quant à son étymologie, nous la croyons dériver de deux. mots : Jalle, qui eu France désigne encore un terrain dur a la culture ( ?) , et haye qui en nos actes anciens est synonyme de bois (Haye, hèye : en wallon signifie haie). Le nom peut donc signifier le bois de la bruyère ( ?).
  Mais remontons encore pour un instant à l'ère antique.
  Une note manuscrite, tracée par l'historien Detrooz, en rappelant les batailles livrées dans le Marquisat, est ainsi conçue : 500 de Rome, 52 avant J.-C. Les légions de Sabinus et Cotta sont détruites près de la fontaine de la Sauvenière à Spa, par les Eburons; César averti vint défaire ce peuple au pays des Segniens, dans les Fagnes de Jalhay.
  C'est là, croyons-nous, une opinion inédite sur ce fait historique, pour lequel les savants n'ont pas encore fourni le dernier mot.  La note précitée place le champ du combat entre Herbiester et Charneux, vers le Sud.
  
De son côté, Jalhay possède une jolie légende de l'époque chrétienne, disant l'invasion du Ban par des Lorrains composant une armée formidable. Elle allait avoir raison des prodiges de valeur accomplis par la population, lorsqu'apparut dans les airs St-Michel, suivi d'une troupe de vengeurs, dont la seule vue mit les ennemis en fuite.
  
De là le nom de commune St-Michel, conservé au point du Ban où le fait eut lieu, lequel terrain fut, dit-on, donné au peuple en souvenir et de sa vaillance et de l'intercession inespérée. De là, croit-on encore, le choix fait par l'église de Jalhay et par sa Cour de Justice, du St Archange pour patron.
  L'auteur précité rapporte aussi qu'au 10e siècle, Guidon d'Amblève , 3e Marquis de Franchimont , de belliqueuse mémoire, conduisit les ancêtres des 600 à de nombreuses victoires. Il ajoute que « le Ban de Jalhay se ressentit de ses faveurs en cessions de terrains ; il en estimait beaucoup les habitants à cause de leur bravoure. Ils composaient les premières compagnies de ses troupes et depuis ce temps ils ont toujours eu le pas sur les autres compagnies du Marquisat et le conservent. » 
  D'après ces témoignages écrits à la fin du siècle dernier, on comprend que dans le cours de l'histoire si accidentée du pays de Liège, ils aient eu de nombreuses occasions de donner des preuves de vaillance et de fidélité.

 Chacun tonnait les éloges adressés en 1162 au siège de Milan par Frédéric Barberousse à l'Évêque de Liège, Henri de Leyen, pour la valeur y déployée par les milices Liégeoises. Jalhay comptait des représentants parmi le corps Franchimontois lorsque cette capitale lombarde fut prise. Si l'on en croit la tradition et les manuscrits, la compagnie du Ban y monta la première à l'assaut, le 1er Mars.
  
Elle eut aussi part du succès obtenu par les milices Franchimontoises sur une armée lorraine qui l'an 1263 envahit le Marquisat, s'y retrancha en un campet fut défaite à l'endroit nommé Commune St Remacle, laquelle s'étendait de Chetifontaine à Verfontaine inclusivement.
  
Le nom de Jalhay retentit encore le 23 Avril 1285, alors que l'un de ses braves, Thierry l'Ardenois,  en une bataille près de Franchimont, délivra le pays de l'odieux Henri de Gueldre, qui après sa déposition avait infesté le pays pendant dix années encore.

  Aussitôt après la bataille de Woeringen et l'occupation de Limbourg par les Brabançons, le châtelain de cette ville, Herman de Monmandy ou Monandy, molesta les  Jalhaytois qui concoururent à défaire ses troupes en 1291.

 Quoiqu'un silence regrettable continue à peser sur la part prise par chaque Ban du Franchimont dans la lutte héroïque des six cents, le 28 Novembre 1468, néanmoins un coin du voile se soulève en faveur du Ban de Jalhay. Deux des membres de la famille des Groulart, seigneurs de Surister, se trouvaient alors à côté des chefs des Franchimontois, Georges Straile et Vincent de Buren. Ils y succombèrent, ainsi que nombre d'habitants et d'ouvriers des mines et forges du Ban, que les dits seigneurs avaient conduits à cette lutte suprême.
  L'on conçoit le sort qui dut être réservé à leur domaine après ce trépas glorieux, vu les destructions qui s'accomplirent aussitôt partout le pays. En représailles aussi de la valeur déployée par ces héros, des troupes de Charles-le-Téméraire parurent au Ban le 1er Mars 1469. Jalhay arma ce qui lui restait d'hommes, un combat sanglant s'engagea entre Surister et le chef-lieu, heureusement la victoire y favorisa les opprimés.
  L'année suivante, Jalhay ouvrit de nouveau un livre aux cens et rentes, « Renouvelleit à cause des guerres disait la suscription » ce qui parait bien prouver qu'en 1468 tout fut anéanti au bourg.
  Une peste horrible y éclata l'an 1491 et la famine en même temps fut telle que les hommes se nourrirent de racines et de paille hachée.
  La milice du Ban était naturellement présente, l'an 1487, au siège du château de Franchimont, dont s'étaient emparés les comtes de La Marck, seigneurs de Sedan. On sait que le Prince de Liège l'assiégea, sans succès, du 14 Juillet au 9 Août.
  Un acte notarié, de 1547, cite le nom de l'un des assiégeants, Pirot de Chaisne, du Ban de Jalhay, qui rendit ses jours en Août, dès au siège de Franchimont.
  Cette usurpation des « de La Marck » ne finit entièrement qu'en 1503 et maintint le trouble dans le pays jusqu'alors.
  L'année 1525, par de nombreux passages de troupes, vit aussi s'accumuler des ruines. Et depuis, bien des malheurs flagellèrent les localités du Ban.
  Aussi haut que l'on remonte dans l'étude de ses archives, on voit son infortunée population violentée et rançonnée. On reste surpris d'y trouver encore des habitants. Ce sort peu enviable est partagé par le Franchimont tout entier.  
Revenons aux mérites des Jalhaytois.
  Un siècle après Charles le Téméraire, Guillaume de Nassau, en Novembre 1568, assiégeait Liège, exposée à de nouveaux désastres. Il s'était emparé des hauteurs de St-Gilles et de St Laurent d'où il convoitait la riche proie dont il tentait de forcer à la fois la plupart des portes. Tout à-coup, des clameurs d'espoir retentissent dans la cité de St Lambert, à la vue d'une petite armée s'avançant vers elle avec une énergie rare. Elle est conduite par le commandant espagnol Montdragon et composée de Condroziens, Lognards et Franchimontois.
En tête marche encore, en son ardeur martiale, la compagnie de Jalhay.
  A cette vue, l'envahisseur s'empresse de lever le camp, poursuivi par ces vengeurs dévoués.
  Nos Princes Évêques savaient apprécier le mérite des Jalhaytois, en voici un exemple :
 Le Duc de Mantoue ayant désiré faire un séjour à Spa, l'an 1599,  le Prince de Liège lui désigna comme garde d'honneur la compagnie de Jalhay. Elle alla le prendre à la frontière, l'escorta pendant son séjour et le reconduisit à la limite à son départ.
C'était elle aussi qui accompagnait le char de la Principauté lorsqu'il séjournait à Aix-la-Chapelle.
  Pendant les fêtes de la Pentecôte 1691, le Marquis de Boufflers, non satisfait encore des dégâts énormes semés sur notre sol par le Roi Louis XIV son maitre, se donnait le plaisir révoltant et cruel de livrer Liège aux flammes, cela du haut de la Chartreuse.
  Le Prince s'était retiré en la citadelle, entouré de milices dont était la compagnie de Jalhay. A ce moment, nombre de ses hommes sollicitent la faveur de conjurer le péril et se précipitent vers le point d'où partent les boulets et bombes incendiaires. Ils approchent, tout cède à leur élan, bientôt Boufflers est en présence « sur un coursier blanc ». 
Coriotte de Jalhay les vise, une détonation retentit, la monture tombe Foudroyée et le marquis est blessé. La terre se teint de son sang, les témoins du fait se portent à son secours et les Jalhaytois profitent de cet instant de confusion pour quitter vivants cette scène stupéfiante. Elle eut lieu le 6 Juin.
  Ces preuves de valeur étant indiquées, suivons l'ordre chronologie logique des faits locaux.
  Malgré la perte des archives anciennes de Jalhay, dans les dévastations qu'il eut a essuyer en 1468, 1578, 1586, 1625, 1647 et dont il sera question, il résulte de citations et records, qu'avant ces époques la constitution de sa commune était complète.
  Les attestations écrites au sujet de sa dime remontent au 13e siècle, par Renier de Fléron, qui la possédait alors.
  Le plus ancien mayeur de Jalhay qui nous soit connu siégeait en 1425 ; sa cour de justice procédait aux exécutions capitales dans la localité même. Celle-ci avait sa prison particulière et un local dit la « Ferme du Seigneur », pour les objets saisis par décret de Justice.
  Sa magistrature avait pouvoir d'édicter en matière de police.
  

Dès le 16e siècle, de ses deux Bourgmestres l'un était élu chaque année et l'ancien prêtait son expérience au nouveau pendant un an. Les Conseillers nommés commis ou commissaires siégeaient trois ans.
  Jalhay avait un marché le Mercredi et une foire annuelle. On utilisait comme mesure « le sty (stier) et payement de Ban de Jalhay » dit un record de 1511, ce qui parait bien indiquer un système particulier de poids et mesures sinon aussi une monnaie spéciale.
  Divers écrits de 1515 confirment le premier de ces faits. Un autre de 1508 y ajoute en disant : « le stier et l'aune de notre mesure. « 

  A cette dernière date, le dit chef-lieu possédait un hôpital dont l'emplacement, trente ans après, était loué au profit de la table des pauvres du Ban et fut vendu en leur faveur en 1641.
 Les brasseries de cervoise de Jalhay avaient de la vogue, leur nom est resté à des prés appelés « les bressines ». Des comptes d'encavage de cette bière montrent qu'en 1606 une seule des hôtelleries du chef-lieu, en débitait de 12 à 20 tonnes par mois, selon les saisons.
  Ce bourg fut entouré de constructions défensives dont l'une des portes a laissé son nom à l'un des quartiers appelé « à la porte ».
  Une contestation de 1609 nous apprend qu'un espace près du presbytère « a été réduit en fortifications pour y réfugier les bestiaux, afin d'y être garantis par ceux qui étaient placés dans l'enceinte. Nul lieu n'étant plus propre à défendre le village au moyen du fort qui a existé dans icelle place. »
  Divers manuscrits, dont un récit 1647 décrivant l’une des destruction de Jalhay, cite à son tour la grosse maison nommée le château ou maison forte. - Le 19 Octobre 1649, le Prince donna ordre « de relever les fossés, redresser les barrières et toutes autres fortifications » lesquelles se garnirent alors d'artillerie.
 
Les habitants du Ban étaient bourgeois de Liège en qualité de Franchimontois. Ce titre, comme on sait, leur avait été octroyé au milieu du 15° siècle, à cause encore de leur bravoure.
  Tout nous laisse supposer qu'à la suite du désastre qui leur fut infligé par Charles le Téméraire, les localités du marquisat mirent un siècle à se relever de leurs ruines. Ce temps passé, chaque ville et village envoya ses notabilités vers Son Altesse « pour la prier de laisser les manans et habitans jouir et user des privilèges anciens ».  A cette fin, « la justice de Jalhea atteste que Johan Groulart, Johan Pirotte et Johan Guette sont députés vers le Prince Évêque, avec les autres commis et députés de Sart et Spaux ; le 16 Novembre 1566 ».
  Cette prospérité renaissante fut plus tard soumise à de terribles épreuves.
  Les Hollandais s'étant emparés de Limbourg, Gabriel de Niño, Maréchal-de-camp espagnol, tentait en vain de la récupérer. Au même temps Alexandre Farnèse, venu d'Italie pour seconder Don Juan d'Autriche commandant des armées du Roi dans les Pays-Bas, résolut de se rendre maitre de cette ancienne capitale.
  Il établit son camp à une demi lieue de Jalhay, vers Hauloux, avec les troupes italiennes et espagnoles, tandis que le bourg était occupé par le général comte Charles de Mansfeld, conduisant une cavalerie nombreuse et plusieurs régiments d'infanterie. Ceux-ci étaient presque tous français, « sous Lancelot de Barlemont.
  Pendant ce siége, commencé en Mai 1578, les razzias en bestiaux et denrées furent à l'ordre du jour. A Jalhay tout fut désordre au point que les habitants abandonnèrent leurs foyers à la soldatesque, composée, dit un écrit de l'époque, « de gens barbares et cruels. »
  L'église où étaient réfugiés tous les objets de valeur fut envahie, pillée et nombre d'habitations détruites, c'est de ce moment que parait dater la disparition de l'hôpital.
  Bientôt après, les habitants voyant s'accomplir le retour de l'armée dont ils se croyaient débarrassés, représentèrent leur détresse aux Etats du Pays de Liège, comme suit :
  « Vos povres sujets sont presque ruinés par les insupportables frais et domaiges endurés pour l'entretenance de tant de gens de cheval et de pied du service de S. M. et du Duc de Parme. Nyanmoins par la nouvelle advenue du dit seigneur Duc, on veut de rechef les chargier de quatre compagnies de chevaux, comme de fait le sont, de sorte que les pauvres remonstrans, eonstrains d'abandonner leurs résidences, supplient en telle grande calamité les secourir par intercession de S. A. notre Prince et Seigneur Duc, afin qu'ils puist demourer en leurs petites maisonnettes pour faire leur labeur, autrement seront constrains les abandonner et leissier vacquer de tout désollées ».
  Longtemps le souvenir de ces jours funestes retentit comme un écho douloureux parmi les populations du Marquisat.
  En outre de ces infortunes, en cette dite année ainsi qu'en la suivante, la peste se joignit aux ravageurs et 102 habitants du Ban lui payèrent le mortel tribut.
 Après le séjour ruineux des dites troupes, parurent des garnisons espagnoles. Le général Montdragon qui occupait Limbourg, imposait au Ban des contributions en denrées, et tous ces dits occupants jusqu'en l'année 1580, ne cessèrent de le dépouiller et ravager.
  Cependant en 1579, d'entre les soldats étrangers, il semble que plusieurs s'unirent avec des jalhaytoises car la commune alloua « 13 Reals pour récompenser les nopces des sauvegardes espagnoles » qui restèrent six semaines bourg et reçurent par jour un florin chaque. Montdragon et d'autres chefs leur firent visite. En ce moment approchait l'armée
« des hauts Bourguignons » les Bres de Verviers allèrent au devant dans l'espoir de la détourner du Franchimont. Ils y parvinrent, grâce peut-être à la présence fortuite des dits chefs de guerre à Jalhay.
  Par malheur, l'enlèvement d'otages rançonnés par les armées, avait cours et nous voyons qu'à cette date « Jean Corhea, fils de Jean de Jalhay, devenu nécessiteux d'argent pour avoir été prisonnier des gens de guerre, emprunta pour se libérer la moitié de la valeur de son trixhe   dit en les chessa. »
  Ces spoliateurs furent aidés en leur œuvre au Ban par les troupes que le Duc de Brunswick, général au service d'Espagne, avait amenées dès le début du dit siège. Le pays fut trente années à se relever de ces terribles foules.
  Les périls et les frais occasionnés par les troupes allemandes étaient si lourds, qu'ils obligèrent Jalhay, Stavelot et Malmedy à s'unir pour les supporter par cotisation.
  En 1580, des vagabonds instigués par un soldat de Limbourg, ayant dépouillé des militaires passants sur les Fagnes, ceux-ci allèrent se plaindre en la dite ville. La nuit suivante une partie de sa garnison fondit à l'improviste sur le village de Charneux et le mit à pillage, enlevant argent, vêtements, meubles et bestiaux. Les habitants furent traités d'une façon inhumaine, plusieurs emmenés prisonniers et l'incendie couronna ces violences.
  Comme répit, l'année suivante fut des plus favorisées pour le Ban en son Etat-civil, car le greffier, à la date 1581, inscrivit en son registre cette sorte de distique :

« Ne morut test an Ne petit ne grand. »

  En ces temps les soldats à titres étrangers n'étaient pas les seuls, parait-il, à molester le pays, témoin cette missive du Avril 1580, parlant sans doute de la garde wallonne au service d'Espagne, elle dit :
  « Icy au ban de Jalhea s'est rabattue une compagnie d'infanterie wallonne pour loger, ascendante à 150 soldats sains, y comprendre bagaige et mochaige (?) sous la charge du Sr Lamoly  l'aisné. On les billetta pour éviter plus grand désordre mais ils ne vouloient s'extendre hors le villaige de Jalhea, disant ne loger qu'une nuit. Il fut remonstré que le ban entier estoit tant affaibli et désuny qu'à grand peine s'en poroit trover gens pour leur donner nourriture, vu qu'ils estoient tellement rongés que peu de choese leur restoit.
   Ils accordarent estre logés aux aultres prochains, mais à Surister, plus eslongés, ny volloient aller  il estoit tard.
  Quand partirent se firent donner chariots pour mener leurs hardes et selon leur coutume constraindirent les poevres gens et leurs bêtes à cops de bastons et aultrement, selon leur coustume à les suivre, de sorte qu'ils emenarent 3 chevaulx et 36 boeufs avec chariots et hommes pour l'espace de huit jours, ne fut que deux ou trois, après trois jours, se desrobirent à grand hasard.
  Ci-devant les Suisses logèrent plusieurs nuits, aussi une partie du régiment du comte Hanibal, les espagnols et autres gens de guerre, venant de diverses nations, sestant rabatus au ban. Ceux logés en un lieu pilloient les autres villaiges, aultres accoroient d'ailleurs desrober et prendre bins, bestes et facultés des bonnes gens, l'un plus ou tout d'autres moins. En sorte que les manans du Ban peuvent dire généralement estre ruynés. »
  La dite compagnie wallonne avait séjourné alternativement à Herbiester, Charneux et Foyr.
  En 1583, Pirotte Groulard Forestier du Ban, fut à son tour enlevé de Jalhay, et conduit au bois de Belair  « pour être rançonné ».
  La misère s'aggrava l'année suivante à cause d'une nouvelle attaque et prise de Limbourg par les Etats de Westphalie. Jalhay, lié par voisinage à la destinée de cette capitale, devait être ravagé encore par ses sièges et occupations de 1632, 1635, 1675, 1679, 1700 et 1703 dont il sera question mais suivons le cours des évènements.
  Vers la fin du 16e siècle, le Prince de Liège cherchait en vain à préserver les communes en leur envoyant des sauvegardes, « en considération des grands dommages causés par les gens de guerre et quasi totale ruine et destruction du Marquisat. »  Ainsi qu'un torrent débordé les troupes étrangères affluant toujours, elles semblaient prendre notre pays pour leur grenier d'abondance et s'y jetaient le plus souvent possible. Alors Jalhay recevait généralement le premier choc, d'autant mieux que la gent guerroyeuse y était attirée par la haute réputation de vaillance acquise par le Ban. Malheureusement, à cette époque, il venait encore de la payer très cher cette renommée, et l'envahissement dont il vient d'être question l'avait mis à deux doigts de sa perte totale.
Un mandement du 17 mars 1587 émanant du Prince Évêque Ernest de Bavière, en faisant un don à Jalhay renferme cette page d'histoire locale:
  « Vu l'humble supplique de nos chers et bien aimés subjets les habitants de notre village de Jalhea, contenante que comme par trois ans continuels ayant esté insupportablement destruicts et brullés par les gens de guerre, tant françois que allemands du service du Roi des Espagnes, ayant prins passage et fait parfois de non petits séjours, comme la dernière, longue, insupportable giste des soldats espagnols, ayant duré dès le jour des 3 Rois jusque envers les Pasques de la dernière année 1586, avec perte et spoliation de toutes leurs bestes et biens meubles, mesme par bruslement et destruction des maisons, par la grandeur et extrémité des quels dommages et dégâts. Plusieurs d'entre les dits subjets sont constraincts d'abandonner le village, leur lieu de naissance, et s'expatrier ne fust  qu’il nous plust les pourvoir de quelque subvention et secours tant pour réparer leur église gatée et détruite comme aussi pour subvenir aux plus endommagés et pauvres d'entre eulx et se délivrer au moins d'une partie des debtes qu'ils ont à raison des dites gens de guerre qu'ils ont soutenus. Sachant à notre très grand regret la grandeur et extrémité des dits dommages et dégâts, lesquels ont esté plustot à l'impossible selon la qualité et circonstance de saison courante, et désirant avec toutte affection paternelle secourir et aider nos dits subjects en ce et si avant que nous soit possible en leurs souffrances, calamités et misères 
— Avons accordé et accordons trois bonniers d'aisemens à prendre et mesurer d'entre les aisemens de dessoubs notre dit village de Jalhea. »
  
En l'année 1587, la foule de soldats italiens et espagnols fut encore excessive, un grand nombre se fixèrent à Jalhay du 9 Février jusqu'en Juin. Les premiers étaient conduits par le Baron de Swartzemberg et le capitaine Marcos Lops, les seconds « par les capitaines Diego de la Penuela, Alonso de Alvin, Felipo Diaz et Christoval .»  Tous vivaient à discrétion sur le malheureux Ban, qui caractérisa cette date en l'appelant : « l'année de la cherté des grains ».
  
En Janvier 1591, le bourg hébergeait « le régiment du Comte Octave » et Surister était obsédé par un hivernage qui lui fut très préjudiciable.
  Le retour du Duc de Parme à Spa, en Juin 1592, entraina aussi de grandes dépenses pour le Ban. Les gens de ce Prince firent halte successivement à Ster  (pays de Stavelot) et à Jalhay lequel était convenu avec Sart de payer en commun les exigences de ce séjour. Les Etats de Liège imposèrent aussi des tailles pour les frais occasionnés à la principauté par cette visite. L'an 1594, la disette atteignit les limites extrêmes en notre pays.
  A cette époque les passages d'armées furent très fréquents au bourg.
L'un des Bourgmestres de 1597 résuma le fait en disant :
« sont arrivées les troupes des capitaines Chaton, Tanneguy, le Comte Jean-Jacques et autres que l'on n'a pu estimer en charge et nombre, vu la diversité des officiers entre'allant et chevauchant. »
  Trois cents de ces derniers venus firent grands dégâts au Ban de Sart.
  Pendant toute l'année Jalhay avait dû desservir, en partie, la garde du château de Franchimont de crainte que l'on ne s'en emparât.
  Quand se ferma le 16e siècle, au bourg hivernaient « six compagnies et au Ban des régiments en bien trop grand nombre pour un si petit pays, « dit une supplique demandant leur retrait. »
  A ces situations pénibles, fait allusion une pièce produite par la Cour de justice de Jalhay. En réponse à une demande de documents faite à ses archives en 1600 : c'est un « advertissement que tous ces boyreaux (fardes) de papiers qui ne tiennent aulcune ordre ont ainsy esté recueillis et ramassés après avoine estés longtemps entre les soldats et gens de guerre qui tenoyent et ont tenus leurs gardes du temps que tous les surceants, ont prias la fuytte et se refugier à plusieurs fois, et chaque fois jusques à III, IV, V et VI sapmaines, sans quaulcun retournasse à sa maison ».
  Cette indication est complétée par une lettre du Gouverneur qui, en nommant un échevin à Jalhay, déplore l'abandon de plusieurs sièges à cette Cour parce que les justiciers n'y trouvent plus de ressources.
Charles III duc de Lorraine

  Le 17° siècle voulut y dépasser encore ses devanciers en violences infligées et par Charles III Duc de Lorraine, devenu pour lors une sorte d'aventurier, et par Louis XIV qui mérita si peu par lui-même le surnom de grand.
  Le premier, chassé plusieurs fois de son Duché à cause de ses intrigues malveillantes, jetait, à chaque désarroi, ses troupes indisciplinées et cruelles sur le pays de Liège.
  Les exécuteurs du second portèrent ensuite la sape et la flamme contre tout ce qui leur faisait ombrage, comme construction défensive, dans les contrées qu'ils s'appropriaient. Et tous deux spolièrent à leur tour à qui mieux la principauté Liégeoises. A celle-ci, le siècle réservait des épreuves douloureuses depuis ses premiers jours jusqu'à sa fin. Elles furent terribles pour le Franchimont. Tout y était en armes en l'année 1600 à cause de la présence des troupes espagnoles et des menaces d'une armée allemande posée à CorneliMunster. D'autre part, un chef de guerre, Paulo Milio campant à Malmedy, s'avança vers le Ban en Avril. Il fut fait appel au secours à Verviers dont les milices arrivèrent aussitôt et la cavalerie hostile se replia vers Limbourg. Néanmoins les appréhensions et prises d'armes ne discontinuèrent de Février jusqu'en Juin.
  
A cette dernière date, comme si l'on voulait exercer toutes les fibres de la patience, à Jalhay s'établit un capitaine du nom de Harlet qui, avec quatre soldats, exigèrent et burent en huit jours « 96 pots de vin à 16 1/2 patars le pot ».
  
Jalhay s'y prêta pour n'avoir maille à partir avec les promoteurs de ce nouveau genre d'imposition envoyés afin de provoquer observations et conflit.
  
L'an 1602 des troupes Hongroises étant au Franchimont.  Le Ban donna 100 florins au Gouverneur parce qu'il avait su le préserver de leur campement, mais cent cavaliers s'y présentèrent bientôt de force et sans billet. Un habitant s'étant permis une observation, il se saisirent aussitôt du Bre, qui fut sur le point d'être mis à mort par ces intrus.
  
En même temps une cavalerie des Altesses Albert et Isabelle étant venue à Limbourg, le Gouverneur de cette ville ne trouva mieux que de l'envoyer loger aussi à Jalhay.
  
En Mars 1603, cent cinquante bonniers des forêts étaient dévorés par le feu et en même temps une garnison étrangère posée à Verviers s'étant mutinée, elle exigea du Ban vingt-cinq chevaux pour les conduire où il leur conviendra, ainsi que s'exprimait l'ordre.
  
Au bourg même, en 1605, un combat acharné se livra entre deux corps de troupes qui s'y précipitaient voulant l'occuper dans le même moment. u    « Celui que commandait le Comte Hendrich y fut anéanti sauf quelques hommes ». 
  
Le Marquisat continuait à être rempli de soldats en l'année 1606. Voici pour le Ban des faits concernant le seul mois de Décembre.

 Le 6, Don Juan de Menessès le parcourait en tous sens « conduisant notables et grandes compagnies de gens de guerre à pied et à cheval pour LL. AA. de Brabant, afin d'hiverner jusqu'à mi Mai 1607. Jalhay en reçut 4 fois les compagnies de Don Loys de Velasco, celles de Limbeeck 2 fois, celles de l'albanais Johan de Hanneri. Entre mêlées d'allants et venants dont diverses compagnies d'espagnols et 3 d'italiens par 2 fois. Puis le Ban paya pendant 100 jours une contribution quotidienne au dit Menessès, parce qu'il avait retiré du Ban sa cavalerie ».

 Le 7 le jeune Gouverneur étant passé par Jalhay avec sa suite, les habitants s'empressèrent de lui offrir (dit un compte) « un morceau à menger et az chevaulx une quarte d'avoine. En même temps l'aide-de-camp de Menessès arrivait, pour un jour, avec 14 compagnies d'infanterie. Il revint bientôt  et avait à son service particulier une femme, sa chambrière, un garçon, cinq chevaux, un grand dogue et dix-huit poules. L'habitant qui le logeait refusa d'accueillir. ces volatiles, sinon au prix de 6 patars par jour.
  
Ce même mois arrivèrent aussi les troupes du lieutenant Renchon de Warem et de Johan de Warem son cousinaccompagnés du capitaine François Charles.
’s-Hertogenbosch (Bois le Duc)

  Le même jour passèrent en désordre des soldats de Bois le Duc, défaits près de Trèves, et d'autres en grande agitation, auxquels on donna 50 bannières de bierre (de quatre pots chacune) pour les appaiser et sobryer.

  Le 10 reparurent les troupes de dom Louis de Velasco venant de Jehanster. On y remarquait un lieutenant intraitable, dangereux coquin..

 Le 14, ce furent des soldats albanais, accompagnés de leurs femmes et enfants. Le lendemain la compagnie Limbeeck avec 79 chevaux, 23 garçons, 9 femmes et 12 enfants. »
  
Le 20 la cavalerie du capitaine Johan Havan venant de Polleur avec sa suite, sa famille et la cavalerie du capitaine albanais Johan Hannery.
  
Enfin le 22 les troupes de Limbeeck s'établirent pour hiverner à Surister et à Charneux.
  
L'année 1607 qui s'ouvrit se montra aussi tumultueuse que la précédente. Le 2 Janvier le Mayeur del Rool (?) et le Mayeur de Herve, procédèrent à « une enquête à Jalhay à propos d'un soldat jeté dans la fosse ». (?) Ensuite les troupes albanaises passèrent, se rendant à Montjoie. Le 21 suivirent de très méchantes compagnies dont l'un des capitaines se nommait Diégo Mendès. Les chefs ne s’y trouvaient en apparence que pour se gourmander. Ils contraignirent les habitants à coups de bâton afin de recevoir d'abord cent rix dalers, ensuite 28 florins par jour. Cela dura jusqu'au 15 Mai suivant.
  
Le 26 Janvier Jalhay vit près de ses murs une lutte semblable à celle de 1605. Cette fois elle avait lieu entre « les compagnies de l'Estrade et de Limbeeck ». De celle-ci, la partie échappant à la mort se réinstalla dans ses campements et sa rivale pâtit beaucoup dans la mêlée.
  
Comme il était passé des troupes tous les jours de ce mois, Jalhay n'avait plus une goutte de vin, on en trouva onze pots (à 10 patars) à Goé pour réconforter les vainqueurs.
  
En Février s'avança vers Limbourg une armée italienne. Afin de se la rendre favorable, on députa vers elle Michel des Champs ancien, Bre de Jalhay, M. Lezack  Mayeur de Vervier, M. Micheroux d'Ensival et autres notabilités. Ils la rencontrèrent à Hauteheyme, près de Dolhain.
  
Le 10, outre les troupes des capitaines Hannery et Nicolas Baz  déjà présentes, le bourg reçut 3 compagnies de l'armée nouvelle et bientôt le Marquisat en fut rempli.
  Le nombre de serviteurs, de femmes et d'enfants suivant les troupes était considérable.
  
Voici des exemples de billets de logement de ce dernier passage. Un habitant hébergea : « Le capitaine Ottavio Angelo ayant avec lui : un prêtre, un serviteur, un cuisinier, un aide, une servante, 2 pages, 2 laquais, un palefrenier, le garçon des chevaux, celui des bagages et 8 chevaux ». En outre le même habitant dut suffire à un second capitaine et à ses gens qui n'avaient trouvés âme qui vive à la maison leur ayant été désignée. 

Excédés ces  habitants fuirent leur maison faute de ressources.
  Un autre reçut : « un capitaine, son neveu, 4 serviteurs, 2 soldats albanais et Nicolas Baz ».
  Un troisième : « 8 soldats, 8 chevaux, 4 femmes et 7 enfants, &c.
  Ces occupants furent remplacés par des troupes hollandaises, entr'autre la compagnie Grobendonck de Bois-le-Duc.
  
En ces temps malheureux, divers corps d'armée se mutinèrent, surtout à Diest et à Metz, d'où ils imposèrent des contributions selon leurs caprices et par d'affreuses pressions. A ce sujet, les Bans en grand émoi se réunirent à Verviers le 12 Février. L'assemblée choisit et délégua vers les révoltés le Mayeur de Jalhay, Hubert Pasqueau, dont les résolutions satisfirent complètement.

  Le 2 Juin  « le fils du Gouverneur fit à Jalhay une visite officielle, accompagné du Bre de Verviers : Jean de Bilstein. Le Bre du bourg, Jacquet Linar le Maréchal, les reçut avec tout l'appareil possible. Il leur présenta  le greffier Pierre Des Champs, l'Echevin Pierre Goulart et le Mayeur Hubert Pasquea puis leur offrit à boire et 10 à 12 Wasteas (gâteaux).

  Ce même jour s'effectuait le départ de troupes espagnoles ayant séjourné. Elles demandèrent un guide et le jeune Maswier se prèsenta de la meilleure grâce pour les servir. Mais en route, il fut battu par les soldats et revint dans un état si déplorable, que malgré leurs menaces les plus sombres nul ne voulut remplacer cette victime. Vu le danger, le dit Bre et son fils se dévouèrent à cette tache qui dupa deux jours. Chacun de son côté, le second conduisant le capitaine Hannery par Montjoie.
  
La licence la plus déréglée régnait parmi ces soudarts. Le Ban se vit obligé de tout réfugier à Verviers et, en Novembre,  le Prince réclamait « . un état des dégâts endurés par les passages, branscats, extorsions etc., des gens de guerre afin d'en faire rapport à la Diète de l'Empire ». Des inventaires signalent de grandes pertes en meubles brisés, vêtements déchirés, vols d'armes, de livres, &c.
  
Theux et son Perron
L'affluence des troupes devint si grande que, de Mai à Octobre, il fut impossible à la commune de régulariser nulle dépense. Un instant l'on crut pouvoir respirer : un espoir vain. Le 17 Novembre, le Gouverneur ayant envoyé des députés pour attiédir les prétentions de certains capitaines, des cavaliers les dépouillèrent en route et profitèrent du conflit pour piller plusieurs maisons de Surister ainsi que d'autres aux Bans de Sart et de Theux.
  
Dès lors pour une année encore, le nombre d'envahisseurs et leurs méfaits empêchèrent de mettre ordre à quoi que ce fut.
  Les habitants se contentaient de chercher avec une ardeur fiévreuse des moyens de suffire à tant d'onéreuses sujétions.
  
L'on apprit que les italiens cherchaient à surprendre quelque localité importante pour s'y retrancher. 

En Avril 1608, leurs menaces grossissaient et le Marquisat s'arma jusqu'aux dents. Ordre était de repousser quiconque se présentait sans licence du Prince, d'être prêt à secourir Verviers, Stavelot et Malmedy ou marcher vers le Condroz.
  
L'hiver suivant fut très rigoureux et prépara cette terrible disette qui devait désoler l'année 1609. Disette pendant laquelle les habitants se trouvèrent à bout de toute ressource.
  
Alors la commune engagea ce qu'elle put de ses biens et afin de pouvoir nourrir les troupes présentes, « donna aux pauvres sujets, pour la bouche d'un capitaine 45 patars, d'un lieutenant 40, caporal 24, soldat 21, une femme 15, un enfant médiocre 5, un garçon 7, un cheval nuit et jour 16, un charretier venu avec les italiens ou autres 15, un vivandier et sa femme 27, leur cheval et avoine 5, jour d'entrée et jour de sortie comptant pour un jour.
  
Les exigences de ces étrangers devaient être bien grandes, car ces prix paraissent excessifs pour l'époque.
La veille de l'Ascension reparut la cavalerie de Menessès avec les compagnies , des capitaines Hannery et Roland.
Ensuite de contributions imposées par des corps libres et coureurs, l'exaspération des habitons produisait partout le pays des conflits nombreux. A ce sujet S. A. émit l'ordre suivant : Afin d'obvier aux homicides qui se commettent, d'autant que le malheur des guerres voisines obligent nos sujets à prendre les armes pour leur défense contre les troupes étrangères, leur trop fréquent usage les porte à une licence furieuse et déréglée. Or la trève entre les Seigneurs Archiducs et les Etats des Provinces Unies veut, que nul ne porte plus harquebuses, escopettes ou pistolets.
Au mois d'Août 1610, la cavalerie de don Loys de Velasco campait à Surister, en Octobre à Charneux et l'on accorda aux habitants, par jour pour chaque soldat, 22 patars, pour une femme ou garçon 15.
En la première de ces localités, - l'Altière commandeur, ses serviteurs et chevaux logeaient chez Pierre Des Champs.
La fureur des incursions se calma pendant deux années, après lesquelles s'agitèrent de nouveau les prétentions du Prince d'Orange en la principauté, elles y procurèrent bien des évènements funestes.
Bientôt après se déroula cette guerre dite de Trente-Ans qui devait durer de 1618 à 16-18. Ses péripéties eurent au Franchiront pour premier instrument les susdites troupes lorraines qui, par des recrudescences de fureur, devinrent un véritable fléau pour notre Principauté. Elles y perpétrèrent, on peut le dire, des déprédations et des violences raffinées.
  Les historiens Liégeois s'étant occupés à décrire tels excès commis en Hesbaye et dans la Campine, il reste à faire connaître la conduite odieuse que ces lorrains tinrent au Marquisat. Le présent résumé en relatera quelques tristes épisodes.
  Dès le 25 Avril 1620 le Prince, pour protéger le Ban de Jalhay, y avait envoyé de ses troupes. Elles y arrivèrent conduites  par Barnabé de Soumagne, lieutenant-capitaine de la compagnie militaire à cheval des cuirassiers de Monsieur de Horion. A leur départ il leur fut délivré une attestation de s'être conduits en gens de bien. Malheureusement les lorrains savaient employer une astuce machiavélique pour dérouter les projets de défense et tomber sur les localités dégarnies. Le Ban devait être souvent la victime de ce système. Déjà le 26 Mai 1620, le Conseiller et Procureur Général de S. A. demandait un état des dommages causés à Jalhay par le capitaine Thomas Piller et autres.
  Le 19 Septembre la grande armée conduite par le comte d'Anhalt, s'arrêtait au Ban.
  Dès lors la misère s'y était assise pour un temps très long. L'année suivante le plus grand nombre des habitants se trouvèrent dans l'impossibilité de payer les impôts et les ennemis ne cessaient de fourrager et de les rançonner.
  Jalhay vit s'accumuler des ruines nouvelles en 1625 par les grands dégâts qu'y commirent les gens du Comte d'lsembourg. Cette même année, le Comte de Berlaymont qui s'y trouvait aussi, prévint que ses officiers s'ètant mutinés ils exigeaient un mois de solde sinon ils desroberaient tout ce qu'ils pourraient attraper  dit sa lettre. Jalhay s'empressa de payer et fit en outre un cadeau à ce chef afin qu'il pressât son départ.
  Dans l'espoir d'être à même de résister, à l'avenir, à telles de telles éventualités, la magistrature fit réparer la grande maison de Jalhay (le château) et l'on paya 4 florins pour ravoir les actes du procès des perdrix d'or. « (?)
  Des troubles ayant éclaté à Liège, le Prince appela des troupes d'Allemagne. Jalhay reçut 3000 fantassins et 500 cavaliers, sous les colonels Eriwitz et Blancatt. Celui-ci était titulaire d'un régiment.
  La plupart de ces soldats étaient accompagnés de leurs femmes et aussi de leurs enfants, dont le nombre était considérable.
  En 1631, dès Janvier, les vexations des soldats lorrains devinrent insupportables; les députations se succédaient vers deux de leurs chefs, le colonel Lamoly et le capitaine Larivière, afin de fixer un chiffre à leurs prétentions. L'arrangement se fit par argent et l'on se croyait débarrassé de ces ennemis irascibles quand, le 29 du même mois, le capitaine Ernest Maret tenta de s'emparer du bourg,pour lui imposer un nouveau tribut. Le Ban prit aussitôt les armes, résolu à toute résistance et l'assaillant dut s'éloigner aussitôt.
  Le Gouverneur s'étant montré très serviable en ces circonstances, le Marquisat lui fit un don dans lequel le Ban intervint 100 patagons.
  De grandes craintes s'éveillèrent en 1632 vu les mouvements de diverses armées espagnoles et hollandaises. Ordre était de veiller sans trêve afin d'être prêt à tout événement.
« Thomson de Vinamont logea chez lui l'esquade de Jalheau et de Herbiester, chauffa l'esteuve toutes les nuits et leur subministra la lumière l'espace de 18 jours. « Alors les Magistrats des Bans de Jalhay, Sart, Theux et Verviers allèrent à Limbourg  offrir au Gouverneur un tonneau de vin pour demeurer bons voisins et amis. »
  Mais cette ville fut prise par les Hollandais en Septembre 1633 et le 8 Octobre une invasion de Croates pilla les pays de Liège et de Limbourg.
  L'année suivante, les troupes du Comte de Mansfeld imposaient des contributions en vivres ou leur valeur en argent.
  Trois années plus tard, les Croates, sous Jean de Werth cette fois, commirent des actes hideux dans toute la principauté. Or nul écrit de Jalhay ne nous révèle quoi que ce soit à ce propos sinon ces mots sinistres inscrits par le greffier en son registre : « L'année 1636 fut surnommée l'année des cruautés ».
  Le 27 Janvier 1644 les Lorrains furieux s'étant rués sur le Ban : cent-cinquante hommes des compagnies verviétoises s'élancent à son secours et l'ennemi est rejeté loin des frontières.
  Les milices Liégeoises arrivées à Verviers à cette occasion occupèrent aussi le bourg, mais elles se retirèrent rapidement croyant tout danger disparu.
  Aussitôt, un nouveau cri d'alarme et un appel au secours part du pays de Stavelot que les Lorrains ravageaient. Il est entendu par le Franchimont. Jalhay vole en tête, le 18 Novembre, conduit par le Colonel Gouverneur, Baron de Lynden, et le succès couronne leurs efforts.
 Ces avantages faisaient désirer partout ces braves Jalhaytois, dont la compagnie s'appelait « les 70 hommes ». Après avoir parcouru les points menacés du Condroz, ils portèrent secours à Dinant et concoururent fortement à la délivrer.
  Le 7 Mars 1645, les Lorrains profitant de l'isolement du Marquisat, y enlevèrent diverses notabilités.
  Les obligations de la défense menaçaient de dépasser les forces du pays qui, le 13 Juin, ordonna au Franchimont de fournir 3.000 hommes pour secourir le Condroz.
 Comme si tous les maux devaient arriver simultanément, en Juillet le nombre des loups, augmentant d'une manière inquiétante, obligea d'ouvrir une chasse générale aux Bans infestés. Les Bres : de Jalhay (Jean Des Champs), de Sart  (Bronfort) et ceux de Theux et de Spa se réunirent à Spa mandés par le sieur de Sclessin (Mre de forges) en la maison du greffier. Là le Gouverneur souhaita que chaque Bre répondît de ses hommes manquant à l'appel, ce qu'ils n'acceptèrent pas. Le projet fut ainsi retardé mais le péril croissant le fit se réaliser peu de temps plus tard.
  
  Les Lorrains ayant reparu le 5 Décembre, force fut de marcher contre eux. Par de nouveaux enlèvements d'otages, ils obligèrent les Bans à se concerter en assemblée générale. Laquelle résolut de pourchasser ces persécuteurs.
  Le 28 les compagnies du Marquisat étaient réunies à Theux, appelées pour défendre le pays d'entre Sambre et Meuse. Elles élirent un chef et tous les suffrages se portèrent sur Jean Poncelet Bourgmestre de Jalhay. Jalhay fournit un contingent  de soixante-neuf hommes et des talents militaires bien méritants.
  La course du vaillant Magistrat provoqua plusieurs défaites des envahisseurs qui semblaient avoir juré la perte de Jalhay. Pour arriver à leur fin ils cherchaient sans trève à s’en rapprocher. Aussi, ordre était de ne se rendre aux travaux des champs qu'armé.
  Néanmoins des soldats s'introduisirent au bourg le 1er Mars 1646 et lui « firent une dépense de 5000 fl». Le 7, le Prince de Nassau Gouverneur de Limbourg, y fit demander « une courtoisie, » ce qui lui arrivait assez souvent. On lui envoya cette fois de la venaison dans l'espoir qu'il arrêterait les déprédations que ses soldats commettaient alors dans les forêts du Ban.
Le Gouvernent. convoqua le 10 Novembre les  compagnies des Bans à Franchimont et envoya contre ces Lorrains, celle de Jalhay en Condroz, conduite par le Bre de Verviers (Henri lieuse) très valeureux lui aussi.
  Le 30 le Bre de Jalhay les rejoignit avec les milices Verviétoises et, dans la crainte de surprise, celles de la Baillerie d'Amercoeur se transportèrent en ces deux localités dégarnies de combattant. Les populations faisaient bonne garde jour et nuit, affolées qu'elles étaient par les ruses impitoyables des oppresseurs lorrains.
  Le 19 Décembre, ils parurent inopinément à Dolhain. Leurs projets meurtriers envers Jalhay étant connus, les gens de Gomzé et de Beaufays arrivèrent en masse pour défendre le Ban et s'y fixèrent jusqu'au 31.
  L'ennemi n'osa s'y produire en présence de cet élan admirable. Il disparut mais revint le 7 Janvier 1647 par la Fagne, inquiéter Sart. Le 17 il se retrouvait  à Dolhain. Apprenant que 600 hommes marchaient au secours de Jalhay, il se retira vers Aywaille jusqu'au 22. Alors que deux de ses régiments s'approchant de Limbourg, le bourg demanda du secours à Sart Ce voisin, toujours fidèle, y répondit avec empressement.
  Immédiatement, Verviers, menacé à son tour, engageait 500 Lognards et en offrait deux cents à Jalhay en appui.
  Les Lorrains se retirèrent à Ruremonde, néanmoins tout le mois suivant se passa dans les veilles et les alarmes. Le Pays se couvrit d'un réseau d'émissaires pour surveiller la marche incertaine et astucieuse des dits malandrins. Les Bans firent accord « de se rendre au bourg principal de l'un d'eux à première alarme du son des cloches ou du tambour ».
  La garde de Jalhay s'était établie dans les demeures de Jean Groulart et de la Ve Pirotte-Groulart. On y faisait force balles de musquet et carabine ». Jean de Vinamont s'étant dévoué au service des accès du bourg reçu des félicitations publiques pour avoir ouvert et fermé les barrières de Jalhay nuit et jour depuis 1645 sans vouloir la moindre récompense "
  L'obsession dans laquelle vivait le peuple engagea les Etats de Liège à ordonner de tuer tous les malfaisants qui veulent molester le pays. Malheureusement les dits envahisseurs avaient pour eux la force brutale et, ne vivant que de rapines, les contributions imposées de loin ou de près par leurs chefs, étaient énormes et journalières. Non contents de dépouiller les communes et les forcer à s'endetter sans fin pour suffire à de telles extorsions, ils continuaient à ruiner les familles en enlevant leurs membres les plus importants de celles-ci pour les rançonner. Le principal repaire pour le dépôt de ces malheureux saisis au Marquisat était Stevensweerdt, près de Ruremonde. Là, pendant de nombreuses années, ces opprimés allèrent successivement gémir sur leur liberté perdue jusqu'à ce que les ravisseurs les eussent dépouillés de leurs biens par des procédés révoltants.
 Les plaintes du Prince et des Etats de Liège auprès du Duc de Lorraine n'étaient accueillies que par des ricanements malgré les traités et promesses faites à notre neutralité. Nul n'osait quitter sa demeure, abandonner un instant les siens sans appréhender d'y trouver au retour le désespoir et la ruine. Et cependant les alertes incessantes, les scènes de pillage et de massacres obligeaient les communautés à se prêter un mutuel secours. Mais tandis que les gardes se portaient sur un point menacé, l'ennemi semblait surgir du sol à l'endroit dégarni et fondait sur sa proie en l'accablant par le nombre.
  Une recrudescence de fureur se fit sentir. En ce temps, le Marquisat avait pour Gouverneur Charles Lynden, dont la bravoure était connue de tous. Toujours en éveil, en armes et prêt à repousser ces ennemis pervers, il les avait battus en plusieurs reprises. Dans ces travaux il était admirablement secondé par Jean de Sclessin, de Spa. Une haute position, des talents militaires de premier ordre, joints à une valeur rare l'avaient fait nommer Lieutenant et Secrétaire du Gouverneur.
  A la suite des échecs qu'ils avaient fait subir aux troupes lorraines, ces étrangers ne respiraient plus que vengeance.
  
Quand vint Mars 1647, ils rodaient au Franchimont sans but apparent, selon leurs habitudes, puis disparurent camper à Goé. Chacun se félicitait d'un peu de quiétude lorsque le 2 Mars, un Dimanche de bon matin, six régiments commandés par le colonel Housse tombèrent soudain sur le village de Foyr.
  Ils le pillèrent et le ravagèrent, ainsi qu'une partie de celui de Charneux, puis investirent Jalhay. A la vue de cette soldatesque implacable, les habitants s'armèrent, se rassemblèrent et se massèrent aux murailles prêts à se défendre jusqu'à la mort.
  Cependant, songeant à leurs familles exposées en cas d'assaut, l'espoir de se libérer à prix d'argent leur fit envoyer quelques Conseillers communaux afin de s'enquérir des intentions de leur chef. Il répondit : « Je veux loger à Jalhay ».
Les délégués lui opposèrent qu'il n'était que 9 heures du matin et le prièrent d'accepter une bonne pièce d'or afin de choisir un autre gite. A ce désir il répliqua : « Mille écus ne m'empêcheront d'y loger et si vos gens en armes donnent un coup d'arquebuse sur mes soldats, je les ferai couper en pièces et brûlerai le village ».
  Les Conseillers ayant fait rapport aux leurs, ceux-ci les renvoyèrent à nouveau dire à Housse que si telle était encore son intention de loger au bourg, les habitants ne pouvaient l’accepter. Et pour s'y opposer, sacrifieraient leurs vies jusqu'au dernier homme. Ils firent comprendre à ce chef le danger auquel il exposait ses gens et lui rappelèrent le traité conclu entre le Duc de Lorraine et le Prince de Liège. Sur ce : ils se retirèrent.
  Peu après Housse les fit rappeler pour connaître leurs dernières intentions. 
Sur quoi  ils le prièrent d'accepter l’argent. Alors il les conduisit près des autres colonels parmi lesquels se trouvait Montdragon. Il tint conseil avec eux, puis s'adressant aux députés il leur demanda : « De combien est la pièce d'or ? — De cent patagons — J'en veux mille. — Impossible, mais nous pourrions vous en offrir deux cents. — J'en veux trois cents et vous avez un quart d'heure pour en finir ».
  Le bourg fit répondre immédiatement qu'il acceptait, mais l'irascible ennemi repartit incontinent : « J'ai changé d'avis ». 
Nos parlementaires prirent alors sous leur responsabilité d'offrir 400 patagons. Housse, reprenant son idée première, dit encore : « Pour mille écus je n'en ferai rien, je veux loger ».
  Durant ces pourparlers, ses soldats pillaient et emmenaient tout le bétail rencontré dans les maisons situées en dehors des barrières et fortifications. Aussitôt le retour des envoyés à Jalhay,  Housse craignant peut-être quelqu'inconvénient en utilisant des eaux de cour, s'approcha jusqu'à la barrière, proposant de loger deux de ses régiments dans le village de Herbiester et le reste dans les maisons situées hors des remparts de Jalhay. Cela avec promesse, la main sur la poitrine foi de cavalier et que le diable l'emportât s'il demandait à boire ou à manger.
  Sur-le-champ, il demanda en outre : « de laisser sortir des dites maisons tout le bétail et les meubles »  s'engageant à restituer le lendemain tout ce que l'on aurait pris.
    Vu le nombre relativement faible d'hommes à lui opposer, il fallut, avec regret, acquiescer à ce caprice. Ses soldats occupèrent donc les lieux désignés mais aussitôt ils pillèrent avec fureur bétail et habitations en ravageant tout le mobilier et brûlant deux maisons à Herbiester.
  Les malheureux habitants de l'extérieur, en grande partie réfugiés dans l'enceinte du bourg, voyant une telle ruine, espérèrent attendrir ces barbares par de bons soins et récupérer leur avoir. Ils se décidèrent à rentrer dans leurs demeures en y pourvoyant boire et manger pour ces soldats. Ils cherchèrent, en même temps, à racheter les objets volés. Pour récupérer les objets volés certains déboursèrent jusqu’à quinze patagons. Cependant mais ne purent les ravoir et en furent quittes de leur argent.
  Après les avoir entièrement dépouillés, les soldats enlevèrent toutes les femmes, les filles et même une enfant de huit ans.
  Au moment de ce rapt, astucieusement combiné, un homme qui ne se doutait de rien sortait d'une maison pour aller chercher à boire pour ces soldats. Il eut la jambe brisée d'une balle. Les autres malheureux, disséminés et sans armes, furent traqués de toutes parts comme des fauves.
 Les méfaits hideux, que du haut de leurs remparts les habitants de Jalhay voyaient se perpétrer, avaient pour but de les attirer au secours des martyrisés, de les défaire au moyen de la cavalerie et pénétrer dans la place. Chacun le comprenait et se résolvait à périr sous les ruines de Jalhay plutôt que de livrer leur village aux brutalités des assiégeants.
  Heureusement un émissaire envoyé vers le Gouverneur atteignit le but. Il revint apprendre aux assiégés qu'un secours de 220 hommes, conduits par les lieutenants Pichayn et Gilles de Fourny, tenteraient la nuit venue, de pénétrer dans le bourg. En cas de réussite, il était convenu de prévenir une réserve (laissée à distance) par un flambeau allumé depuis la tour de l'Église.
  Cette entreprise réussit à merveille. 
  Vers une heure du matin et par une coïncidence singulière, les Lorrains avaient choisi ce moment pour assaillir Jalhay. Ils sonnaient le boute-selle. Pour répandre la terreur, ils étourdirent le bourg du bruit de leurs trompettes et de leurs tambours battant.
  Le Gouverneur crut son renfort en péril, mais le signal convenu brilla au même instant pour le rassurer. Immédiatement Jalhay le pria d'attaquer les ennemis alors que ceux-ci attaquaient Jalhay. Le Gouverneur répondit que, vu leur grand nombre, une telle résolution pourrait entraîner la ruine entière du bourg et demanda de bien y réfléchir.
  La réponse du Ban fut que les habitants préféraient voir leurs maisons en cendres plutôt que devoir loger ces maudits Lorrains. Ils préféraient mille fois combattre plutôt que d'endurer plus longtemps la vue des actes iniques qui se passaient sous leurs yeux. Durant ces pourparlers, la lutte s'était engagée au milieu des ténèbres.
  Sur tous les points l'attaque est vive. La défense de Jalhay est héroïque et chaque assaut est repoussé avec le courage du désespoir. Les défenseurs savent qu'il faut encore vaincre ou mourir.
  Les Lorrains, pour faciliter leurs mouvements, mettent le feu à plusieurs des maisons extra-muros.
  A ces lueurs sinistres, pendant six heures entières, le bourg de tous ses bras agissants, soutient la lutte inégale avec l'énergie du désepoir. D'entre ses bourreaux un grand nombre jonchent le sol, attestant la vaillance des Jalhaytois.
 L’aube venant éclairer leur succès, montre à l'Occident la bannière de Franchimont entourée de 780 de ses braves. Braves qui après s'être rassemblés à Polleur, étaient venus par Surister sous la conduite du Gouverneur et de son Lieutenant. S'étant arrêtés à distance du bourg : d'un coup de mousquet (du coin d'un bois qui les cachaient) ils donnèrent l'alarme afin d'attirer l'ennemi en campagne et dégager Jalhay. A ce signal, la moitié des Lorrains (trois à quatre mille cavaliers) font volte-face et s'élancent vers notre infanterie. Dans un élan impétueux, la prend en flanc et pousse au chef. La résistance est puissante, hommes et chevaux roulent pêle-mêle, inondant de leur sang le sol qui tremble sous leurs efforts.
Hélas, le Lieutenant-Gouverneur est atteint, tombe et expire.
La mort de ce chef distingué jette la stupeur dans les rangs des Franchimontois. Au même instant, le capitaine Grégoire qui ranimait le courage de tous par sa force de volonté, est aussi frappé mortellement.
  Malgré cette catastrophe, la résistance redouble et les Franchimontois accomplissent des actes héroïques nonobstant la violence et la rapidité des chocs prodigués par l'ennemi Lorrain.
  Pourtant le Gouverneur voit l'impossibilité de tenir sans cavalerie dans cette horrible mêlée. Craignant de laisser le Marquisat à découvert, il se retire vers Surister en promettant d'envoyer un nouveau secour.
De leur coté, les Lorrains se replient vers Jalhay.
  Pendant ce temps, une partie de la milice Franchimontoise consacre des soins pieux aux dépouilles mortelles de ceux dont le courage s'était tant de fois joué du péril et qui venaient d'expirer pour la noble cause.
  Mais à peine les brumes de l'horizon se sont elles fermées sur le cortège reportant les corps des chefs morts à leurs familles, Housse songe à profiter de l'isolement du bourg. Il dépêche un trompette dire que si l'on veut lui restituer ses dommages et le prix de six rations, il partira sans tarder.
  Les Jalhaytois pressés de voir se terminer une lutte aussi meurtrière, s'assemblent pour délibérer à propos de cette communication, laquelle n'était qu'une feinte, pour détourner l'attention d'une attaque préméditée contre des remparts dégarnis. Les troupes postées par Housse, au lieu d'attendre réponse, se ruent sur les murailles et barrières tirant avec furie sur les habitants croyant à une pacification. Surpris, ils se rallient sur l'instant pour repousser cette trahison nouvelle. Assez épargnés jusque-là, plusieurs sont frappés mortellement et les Lorrains arrivant eu force sur ce point pénètrent dans le bourg.
  Parmi les auxiliaires entrés pendant la nuit dans Jalhay, se trouvait la milice de Sart. On la place dans l'église dont on brise les fenêtres et d'où part une grêle de balles.
  Ceux de Jalhay occupent le cimetière ainsi que le château et répandent la mort par les créneaux et meurtrières.
  Les Lorrains voyant combien la défense est désespérée, jettent le feu dans les habitations et l'incendie se propage avec une rapidité effrayante. Les vaillants infortunés voyant s'anéantir toutes leurs ressources et leurs familles exposées à ce nouveau péril, veulent y porter secours et quittent leurs retranchements.
Leur présence frappe d'étonnement les Lorrains. La garde Jaihaisienne est là, toute entière, les septante hommes forment un groupe imposant, brillant de valeur.
A cette vue, les ennemis poussent à la fois des cris de rage haineuse et de triomphe, ces vils soudarts savent être cent contre un. Et pourtant cette poignée de héros, prêts à mourir, les défient encore quoiqu'entourés de tous côtés par des régiments nombreux et sans frein.
  Le premier rang des cavaliers s'élance vers la phalange des braves qui tombe comme fauchés. Les autres se précipitent : la garde les décime. 
Ils se renouvellent par escadrons plus furieux, plus exaspérés par cette admirable défense. Alors une mêlée effroyable se produit au milieu d'un cercle de flammes, car l'incendie va croissant. Chaque garde fait des prodiges d'héroïsme dans cette lutte homérique.
  Hélas ! tous succombent hachés, écrasés, piétinés par cette cavalerie mais entourés de monceaux d'ennemis. Les septante expirent jusqu'au dernier, dignes fils des six cents, en s'écriant : 
Gloire à Dieu ! vivent Liège et St-Lambert !
  Et leurs bourreaux s'acharnent sur les cadavres de ces héros qui, tant de fois dans les mêlées, leur inspirèrent la terreur et l'effroi.
  L'horreur de la scène est décuplée par le fracas des maisons embrasées. Maisons qui s'écroulent en jetant au dehors ou en écrasant femmes et  enfants qui s'y blottissaient et dont les cris brisent le cœur.
  L'épouvante s'accroit par les hennissements, les beuglements des troupeaux tassés dans l'enceinte, étouffés, brullés, hurlant, s'élançant dans toutes les directions en renversant amis et ennemis dans leurs courses furibondes.
  Le tumulte est inouï et frappe tout de stupeur.
Le bourg en sa ceinture murée, présente l'aspect d'un énorme bucher d'où s'élèvent d'immenses tourbillons de fumée et de flammes, et d'où partent des clameurs inénarrables.
  A cette heure néfaste, les Lorrains afin de cacher l’importance de leurs pertes, s'imaginèrent de jeter dans les foyers les plus intenses leurs cadavres qui y disparurent en grand nombre.
  L'embrasement du bourg était à peu près général. Quatre vingt-dix habitations ainsi que toutes leurs dépendances remplies de récoltes et de troupeaux étaient anéanties.
  Au milieu des débris de cette destruction erraient des groupes de malheureux survivants, plongés dans une douleur indicible. Ils aurait attendri le cœur d'un tigre. Mais il ne leur était pas seulement donné d'aller reconnaître les restes d'êtres chers qui jonchaient le sol. L’ennemi les entouraient en se complaisaient de leurs terribles angoisses. La fureur bestiale du regard des Lorrains en disait long sur leur absence de pitié. Ils ne trouvaient pas la situation assez sanglante.
  Pourtant il n'y avait plus que des vieillards et des femmes, formant çà et là comme des grappes humaines, enserrant entre elles les enfants échappés au désastre.
  Tout à-coup les Lorrains saisis d'une rage démoniaque, se ruant vers ces infortunés, massacrèrent toutes les femmes, filles et enfants avec des transports d'une férocité inique.
  Après des actes dignes des Cannibales, repus d'horribles cruautés, dégoulinants du sang des plus infortunées de leurs victimes, ils couronnèrent leur oeuvre en pillant l'église échappée aux flammes. Ils la  laissèrent en ruines.
  Ils quittaient enfin Jalhay pour prendre gite à Aywaille, traînant après eux tout ce que le feu et le fer avaient épargné. Outre leur butin, ils emmenaient prisonniers nombre de blessés et de vieillards, auxquels ils extorquèrent tout ce qui leur restait d'espérances présentes et futures.
  Le chiffre des Lorrains trouvés morts dans Jalhay était de quatre cents sans compter les corps que le feu dévora. Quatre-vingts autres furent rencontrés mourants ou ayant expirés sur les Fagnes, marquant ainsi la route suivie par les restes de leurs régiments dépravés.
  Plusieurs de ces abandonnés s'éteignirent repentants, secourus par les Pères Récollets de Verviers, arrivés aussitôt pour prêter aide à toutes ces infortunes.
  De la cité courageuse il ne restait qu'un amas de cendres parsemées d'os calcinés. Auprès gisaient aussi les cadavres d’une centaine de ses énergiques défenseurs.   Sans compter ceux des femmes, des enfants et des blessés dont beaucoup rendaient le dernier soupir.
  Parmi ces victimes, Sart par son appui généreux, comptait plusieurs de ses braves fils. D’autres victimes provenaient de points environnants.
  On décida de ne pas séparer ceux qui s'étaient unis pour la défense de la patrie et se trouvaient réunis dans la mort.
  Le désir des survivants fut qu'un même suaire put les envelopper tous.
  Une tombe commune reçut la dépouille mortelle de cette population immolée par une fureur aveugle en ce jour d'horreurs et de deuil. Là furent inhumées, en même temps, des familles tout entières depuis les aïeux jusqu'aux arrière-petits-enfants.
Nul sol vit il jamais scène plus déchirante ?
  Les habitants des localités voisines rendirent les derniers devoirs à tant d'infortunés et ce champ du repos fut nommé : « la fosse ».
  Le tout étant terminé, l'on découvrit un soldat lorrain prisonnier et enfermé en la maison Maty Pierre. Maison que le feu avait épargnée. 
  Nous avons vu qu'en 1645 les habitants de Gomzé avaient déjà secouru Jalhay. Un même mouvement généreux se produisit lors de l'événement dont il vient d’être question. Ils arrivèrent trop tard pour prendre part à la lutte, mais ils s'établirent une garde au Ban et y furent d'un grand réconfort dans ces moments de douleurs et d'effroi.
  En Avril suivant, les habitants du Ban erraient sur les ruines et autour du tertre sépulcral. Survinrent sept soldats lorrains insultant les débris du bourg, se moquant des vaincus et de la tombe fraîchement élevée.
  Les assistants, exaspérés de ces outrages, attaquèrent les insulteurs, les blessèrent et les dépouillèrent.
  Ces soudars fuirent et portèrent plainte aux officiers de Limbourg. De là le colonel Saint-Amour et le capitaine Saint-Martin condamnèrent les habitants de Jalhay insultés à une amende de douze pistoles, quatre sacs d'avoine et dix charrettes de foin, résumées « en 50 rix d'argent ». Henri-Pierre Piette les prêta et des Pères Récollets de Verviers les portèrent à Limbourg afin d'éviter pour le Ban toute représailles de l'ennemi pendurant ces jours épineux.
  Le mois suivant, le Duc de Lorraine imposait le Marquisat de 12000 patagons et le Ban dut en payer sa part. Alors un silence de mort plana sur les restes du bourg qu'une lettre du temps appelle « le lieu désolé ». De son enceinte avaient fui, saisis d'horreur, les quelques habitants échappés par miracle, à la mort.
  Parmi eux se trouvait la dame Groulart que l’on indemnisa « pour avoir défrayé ceux de Sart venus à la guerre de Jalhay ».
  En Juillet suivant, les otages enlevés par Housse étaient encore aux mains de leurs ravisseurs.
  De ces victimes trois seulement nous sont connues, les voici :
  Jean Crette, Jean Raweau, tous deux de Herbiester. Ils furent rachetés le même mois au colonel Housse. Le premier pour 30 patagons et le second pour cinquante. 
  Enfin Jean Herman Haltherbergh de Jalhay, fils de feu Herman de Herbiester, et d'Aubinette. Celui-ci, « par le brulement et la rançon fut réduit à la mendicité ». Ceci fut attesté par la Cour, et le dit Raweau, à cause des mauvais traitements reçus. Ce malheureux était mourant et on ne les relâchait sur nulle promesse, mais contre argent sonnant. Argent que porta M. Reiffenbergh de Buchenbach.
  Les écrits du temps ne disent pas si l'on se servit d'artillerie pour la défense de Jalhay, cependant un compte de 1647 cite un sieur « Marisall qui a travaillé aux canons et hacqs ».
  Vu l’incendie, la destruction des livres paroissiaux et de l'abandon du bourg qui s'ensuivit, les noms des victimes du siège paraissent perdus.    Nous n'en avons trouvé qu'un seul, d'entre ces nobles infortunés. 
C'est celui de Jean-Hubert Wadrier de Jalhay, (beau-père d'Anne Graffar Vve de Jacob Wadrier), qui étant avec les habitants de Jalheau le 3 Mars, en la maison de l'Échevin de Vinalmont y fut tué « dit un acte notarié ».
  Ce ne fut que deux années après ce désastre que s'ouvrit un nouveau registre paroissial reprenant les naissances et les décès de la paroisse, tant l'accablement y avait été complet.
 Cependant l'amour du sol natal ramena bientôt des habitants à Jalhay. Malheureusement leur réapparition ne fit que ranimer la haine inassouvie des Lorrains. Alors le Gouverneur ordonna, de la part de S. A. « de barricader, fortifier et renfermer le cimetière et autres avenues commodes a palissader et défendre à Jalheau, pour éviter plus grands frais ».
  Ces appréhensions n'étaient que trop fondées car pendant plusieurs années encore devaient se succéder, de la part des mêmes ennemis, les impositions, menaces et tentatives envers le bourg en ruines. 
Déjà le 28 Décembre 1648, on s'apprêtait de nouveau à le défendre car  quatre régiments lorrains s'en approchèrent par la Fagne. Le Bre et Henri Pauqueau s'élancent vers eux à la tète de toute la population du Ban et les dispersent. Mais durant tout le mois de Janvier ces ennemis occupèrent des points environnants, surtout Ensival, Rechain, Limbourg et Malmedy, comme s'ils voulaient cette fois écraser le Ban à coup sûr. Le 30,1es compagnies de Sart et de Spa s'y établirent, prêtes à tout événement. Dès leur arrivée on leur présenta, dit le Bre    « des tonnes de bière à 4 fl. l'une ». Ces auxiliaires accomplirent parfaitement leur tâche secourable.
  Le 6 Février 1649, le Franchimont ayant offert 1000 fl. au Gouverneur pour ses services en cette occasion, le Bre de Jalhay, Henri Pierre, voulut absolument y ajouter selon les moyens du moment  « 50 nouveaux œufs pour Madame la Baronne ».
  En Mai les Lorrains tenaient toutes les routes depuis Liège jusqu'à Sedan et ne laissaient rien transporter sans péril ou contribution.
  Le 5 Juin, la garnison de Limbourg était composée de leurs troupes, qui envahirent le Ban. Sur l'heure Sart, Theux, Spa et Verviers y envoyèrent 300 hommes et l'ennemi se retira en Hesbaye.
  En Septembre, le Ban manda sa compagnie au camp devant Liège, tout en priant le Gouverneur de faire en sorte qu'elle ne fût pas conduite en Hesbaye, « vu le nombre de soldats ayant passé et séjourné à Jalhay pendant la guerre de Liège ».
  En Octobre, les soldats de Limbourg réclamaient des poulets et des truites, prétendant qu'ils étaient promis à leurs chefs pour bons avis, c'est-à-dire au colonel Tauvenin et à Olivier Genotte, tous deux Irlandais.
  Cette année 1649 l'hiver sévit cruellement car des alertes et appels de défenseurs se produisirent à peu près chaque fois qu'un nouvel officier faisant son entrée à Limbourg, réclamait à son tour une courtoisie. Pour sa part, le capitaine Smith enleva le greffier de Jalhay, Jean Blancheteste et en fixa la rançon à 400 pistoles.
  Ce fait eut lieu le 5 Février 1650, en même temps qu'un général lorrain, nommé la Fange, étant arrivé en la dite forteresse avec des troupes nombreuses. La compagnie de Jalhay, par sécurité, se mit en campagne. Immédiatement, par crainte de conflit, le Marquisat fit tenir au dit chef et par les mains du Bre de Jalhay, Pierre le Maitre, 300 pistoles, dans l'espoir que l'arrivant préserverait le bourg de nouveaux malheurs.
  Il accepta l'argent mais, aussitôt, « son armée vint fairi halte au Ban, enleva le fourrage, les victuailles et pilla l'église où l'on avait sauvegardé tout ce que l'on possédait nouveau. Elle fut dépouillée entièrement « jusqu'à la serrure ». Les soldats s'acharnèrent ensuite à démolir les reconstructions, croyant sans doute anéantir tout espoir de vivre sur ce sol infortuné, puis portèrent la rage de destruction jusqu'à brûler les grains, sous prétexte de se chauffer.
  Un autre général Lorrain étant passé le 12 Avril suivant et les chars appartenant aux habitants furent brisés pour plupart. •
  Le 25 Juin, un appel aux armes était lancé pour repousser de nouveaux assaillants. Des Suédois et les Hessois venaient joindre leurs rapines à celles des extorqueurs précités. Il reparurent en Août pour exiger de l'argent.
  Le numéraire était si rare au Ban, qu'il fut demandé autorisation d'en chercher dans la principauté. Les Bres voyant l'impossibilité d'y recueillir la moindre somme, proposèrent d'imposer de 15 patars chaque bonnier de terre et du double celui de prairie. Toute l'année s'écoula dans la plus grande gène.
  Le régiment du comte de Laverne   était à Herbiester 6 Septembre.
  Le 19 Novembre, des troupes nouvelles s'étant présentée pour exiger elles aussi, il fut impossible de réunir plus de quinze patagons pour les éloigner.
  Les Bres des cinq Bans, décidés à vendre chèrement les restes du bien de leurs administrés, se mirent chacun à 1a tête de leur compagnie locale. Les envahisseurs, en réponse, firent défendre sous les peines les plus sévères, toute prise d'armes, mais l'attitude résolue des défenseurs du sol obligea ces derniers arrivants à  exécuter autre part leurs déprédations. Néanmoins une lettre de cette dernière date porte ces mots « Nombre de reitres à la solde du Duc de Lorraine voltigent sans cesse sur le pays, ainsi qu'un essaim de mouches malfaisantes ».
  Les Commandants de Limbourg se succédaient à courts intervalles sans user de procédés plus équitables envers le Ban. L'invasion devenant formidable, la valeur des populations ne pouvait toujours leur résister 
  Les régiments lorrains du dit comte de Laverne et du comte de Grand Pré, excitèrent la terreur de 1650 à 1651. Le 16 Février de cette dernière année, le général Stroet arrivait et demanda des vivres mais il ne s'en trouvait plus. On les remplaça par 60 patagons, mais ce chef voulut pour son propre compte 100 pistoles et une paire de bottes, en exigeant que la somme lui fut remise en or. Sur ces entrefaites, Sart envoyait en secours à Jalhay sa compagnie, conduite par son brave capitaine Hasinelle et les troupes précitées disparurent.
  Mais aussitôt la milice protectrice quitte elle Jalhay que le Baron de Clinchant fit demander 200 pistoles pour protéger Jalhay de ses gens. On le satisfit le 24. Même manège eut lieu le 27, par le susdit de Grand Pré, qui reçut 300 patagons pour s'éloigner de Surister et de Foyr dont il s'était emparé. Peu après parut, à même fin, le colonel Stroets. La commune étant exténuée, le Greffier, le Curé et le Bre s'en allèrent solliciter partout de nouveaux emprunts afin de satisfaire tant d'appétits désordonnés.
    L'obligation d'être sans cesse en armes empêchait tout travail producteur, nonobstant la commune profitait de toutes les occasions pour se montrer bienveillante, témoin le fait suivant : Un cheval de la troupe lorraine s'étant noyé en traversant la Vesdre à Pepinster, le Gouverneur proposa de le remplacer et Jalhay s'empressa d'y contribuer. Mais en même temps le comte de Grand-Pré y augmentait la misère par de nouveaux impôts. A ses prétentions le Ban tout entier, désespéré, se souleva et cet officier recula à son tour.     Cependant il ne s'éloigna point et prit gîte à Stembert, en attendant une  occasion favorable pour sévir. 
  Jalhay envoya des émissaires dans toutes les directions, la population restait armée et debout nuit et jour.
  Des guets veillaient sur les tours et l'on ne sonnait plus les cloches aux offices, par crainte de méprise avec le tocsin. Le Gouverneur, en ce péril, donna ordre aux habitants de se retirer avec tout ce qu'ils pouvaient emporter, à Sart dans l'espoir d'y accumuler des forces suffisantes.
  Ce tranfert ayant eu lieu le 28 Février, aussitôt le comte de Grand Pré, avec ses régiments, attaqua ce lieu de refuge hospitalier. Pendant que le vénérable curé Henri de Latone, parlementait avec l'oppresseur de son siège paroissial, les soldats y pénètrent traitreusement, le pillèrent et le livrèrent en partie aux flammes, malgré une défense vigoureuse.
  Cette fois les Jaihaisiens subirent la douleur poignante de voir encore anéantir leurs biens meubles, mais surtout d'être cause en quelque sorte, de la ruine de leurs voisins chers et fidèles sans compter la mort de plusieurs d’entre eux.
  Et pendant que ces malheurs avaient lieu, tandis que les vainqueurs enlevaient l'énorme butin de cette double prise, une autre partie de troupes s'acharnait de nouveau à démolir les reconstructions de Jalhay, comme s'il devait être extirpé du sol.
  Cette fois les dévastations y furent telles que les quelques bestiaux échappés à cette infamie nouvelle durent être abrités dans les lieux circonvoisins.
  Par cet état de crises et de veilles incessantes, la population était, on peut le dire, abîmée dans sa douleur.
  Pour remédier autant que possible à tant de maux, on résolut de fortifier derechef Jalhay par tous les moyens dont on pourrait disposer, et les travaux furent poussés avec entrain.
  Divers cadeaux faits aux officiers postés à Limbourg ne servirent pas à contrer les méfaits incessants de leurs soldats. Ceux-ci de leur côté, imaginèrent d'enlever les bestiaux et chevaux du Ban, pour en tirer rançon aussi. Cependant, en Mars, dans l'espoir de protection, Jalhay avait envoyé aux colonels Rolings et Maret se trouvant dans la forteresse de Limbourg , un muyd d'avoine et cent livres de beurre.    En Avril 200 patagons et deux charrées de paille de 58 gerbes à 3 patars. En Juin 150 patagons demandés, soi disant pour tenir l'ordre.
  Les passages et séjours de troupes se succédaient rapidement encore. Le 20 Mai, le Duc de Lorraine entrait en Condroz, avec son armée, se rendant à Limbourg dont la garnison, pour lui faire place, se répandit dans le Duché.
  Quinze jours après, les milices franchimontoises se concentrèrent à Theux sous le capitaine dit Fendue lepe (lèvre fendue). Immédiatement le général la Fange eut la cruelle fantaisie de faire annoncer son retour et le péril nouveau du Marquisat, si on ne le satisfaisait pas de suite.
 En même temps son collègue Rolling exigeait de Limbourg 150 patagons sous prétexte d'attiédir les fureurs du précité contre le Ban.
  A peine le Bre Querin Jacquet s'était il rendu en Condroz pour y porter la contribution voulue, qu'une cavalerie venait s'emparer de Marneux, le 22 Mai.
  Ainsi, le péril renaissait aussitôt qu'une imposition était satisfaite dans l'espoir de le prévenir. En présence de cette situation 400 hommes des compagnies des Bans se dévouèrent pour se rendre en Condroz et servir de rempart contre ces invasions lorraines se reproduisant sans trêve. Afin de leur donner un digne chef, les Bres des Bans tirèrent entre eux au sort et celui-ci favorisa Henri Heuse, Bre de Verviers, qui partit aussitôt.
  Cependant, Jalhay ayant envoyé déjà un bon contingent de bras en Hesbaye, les autres Bans s'émurent de son isolement. A ce sujet ils se réunirent à Verviers et députèrent le Bre de Jalhay, Jaspar Manguette, vers le Prince afin de lui représenter l'espèce d'abus que l'on faisait de la vaillance de ses administrés.
  Une lettre de Pierre Des Champs qui en accompagnait le 24 Juillet, les disait se trouver en plusieurs points périlleux et très exposés, surtout au siège du château de Hollogne sur le Géer. De cette retraite alors très forte, s'était emparé le Baron de Vallengin, qui y fut pris, grâce à la valeur déployée par les Jalhaytois sous la conduite du colonel Scrot au service du Prince.
  Pendant l'accomplissement de ces faits, S. A. avait envoyé, le 10 Juillet, des éléments de sa cavalerie séjourner à Charneux, comme garde.
  En ces tristes années, la morgue des chefs de guerre était blessante et leurs prétentions despotiques, ce fait en témoigne :
Le baron de Launa ayant disposé son armée à Olne et à Louvegné, le Bre de Jalhay s'y rendit pour lui offrir ses hommages. Il reçut un mauvais accueil pour ne s'y être pas présenté dès son arrivée. Le Bre effectua la même visite au lieutenant qui était à Verviers, ainsi qu'au Baron du Chatelet, commandant des troupes lorraines alors en Condroz. A ce dernier, Jalhay fit don de 225 florins. Malgré cette attention dès que ce chef se mit en route vers le Franchimont, les populations se retirèrent à Verviers crainte d'outrages.
  Les premiers jours de Janvier 1652, il revint des habitants à Jalhay, mais le 11, le Bre rentrant d'une course à Theux, trouva le tout déserté par suite d'oppression et surprise par les ennemis.
  Le 21, le Gouverneur donna ordre aux habitants de fuir de nouveau. La compagnie, afin de concentrer ses Forces, se replia sur Theux le 26 à l’aube.
  Le lendemain, une armée lorraine tumultueuse et menaçante apparut en disant vouloir loger au bourg qui fut encore abandonné. En ce moment sa population sans nulle défense ni ressource, sembla prise d'un vertige de terreur. D'entre les quelques familles restées en leurs foyers, se trouvait celle du Bre. Celle ci se retira à son tour. Le Bre ne souhaitant pas abandonner sa famille, rédigea sa démission. Aussitôt le Mayeur protesta énergiquement et le ramena au devoir. La Cour n'avait pas lâché pied, décidée à tout subir.
  Le capitaine de Theux (Aristote) déploya de son côté une activité intense. Les compagnies des Bans arrivèrent en nombre et à leur vue l'ennemi détala. Néanmoins il laissa des forces à la Reid, à Becco et autres points ; alors le Ban organisa une garde à Marché sous Franchimont.
  Les Jalhaytois reprenaient leurs travaux lorsque le 27, par une surprise nouvelle, ils furent expulsés derechef.
  On le voit, les Lorrains ne pouvaient pardonner au Ban sa valeur invincible; dès qu'ils le savaient sans appui, sa ruine devenait leur but. Des que les défenseurs quittaient Jalhay, ils s'y précipitaient en grand nombre, espérant réduire la garde qui s'y réorganisait. Voyez à quels moyens ils recouraient : en Avril, pendant que Henri Pierre faisait achever une maison à Jalhay, les troupes surviennent inopinément, la démolissent de fond en comble et emportent au loin les boiseries sans qu'il en reste un pied. De ce fait, réduisant cette famille à la mendicité (Attestation de la Cour).
  Au mois d’Août, l'épizootie enlevait le peu de bestiaux encore présents lorsque fut réclamé le service de faire escorte à la Duchesse de Brandebourg allant d'Aix à Spa. Tous les cavaliers du Ban étaient prêts pour le départ lorsqu'un nommé Walrand trouva le moyen d’exempter le Ban de ce service. Il reçut un demi souverain de récompense parce que Jalhay se trouvait en même temps appelé par divers autres services.

  Le 3 Octobre vint l'ordre de poser partout des vigies pour ne pas être surpris. De prompts secours furent demandés à Polleur, mais en même temps, le Capitaine Smith enlevait de nouveau le greffier Blancheteste.
 Le 2 Novembre suivant, les Lorrains obligeaient encore la population à se réfugier toute entière à Verviers. C'était un dimanche et le respect pour ce jour était si grand, qu'en présence du péril même elle hésitait à transporter son bien. Le Curé seul sut la décider à partir avec hardes et grains.
En même temps, le colonel du régiment franchimontois, N. de Hautregard, prévint le capitaine de Jalhay de se retirer sur Spa avec ses hommes. Le Gouverneur déclara le 19, que le bourg était indéfendable, vu la persistance de l'ennemi à pourchasser ses habitants.
  Et ce jeu cruel, le croirait-on sans les documents, ce jeu se renouvelait par les mêmes satellites, en 1653, le 17 Février et les 4, 8 et 21 Mars, ler et 13 Mai, etc., c'est-à-dire à chaque fois que la Compagnie alla défendre quelque localité demandant du secours sous le réseau de fer qui couvrait le pays.
  A l'avant-dernière de ces invasions, l'armée ennemie commandée par le colonel Jalheau, s'était avancée si menaçante que l'on crut au retour des horreurs de 1647. Néanmoins le Bre Pirotte Denis résolut de faire face à l’ennemi, dut-il être seul. Ce fut ce qui arriva le lendemain de l'envahissement, lui seul ayant eu le courage de résister aux violences de la situation. A ce moment la compagnie composée de tous les hommes valides du Ban défendait Theux attaqué avec fureur. Elle était conduite par le capitaine Henri Jaspar, l’officier Ernotte Dres  officier et le Mayeur.
Le Bre, après un jour d'isolement au milieu des périls, fit demander à la magistrature de Verviers si sa charge « l'oblige encore à quelque chose, vu l'absence de chacun ».
Cette question tout à fait neuve et unique sans nul doute, fut renvoyée aux collègues du demandeur alors qu'ils se trouvaient absorbés par leurs travaux belliqueux, comme on a vu. Ils répondirent: « Consultez pour le cas le règlement des gens de Jalhay ».
  La réponse était-elle un biais ou une épigramme ? Quoi qu'il en soit la situation s'éclaircit par le retour des administrés, après cinq jours d'absence ou plutôt d'expulsion.
  Cinq autres jours après, le 10 Mai, ils virent passer la population de Francorchamps, fuyant à travers les Fagnes avec hardes et bestiaux, dépossédée par les mêmes barbares. A cette vue une panique irrésistible s'empara d'une moitié du Ban, composée des femmes et des enfants, qui suivirent la direction que prenaient les malheureux pourchassés.
  Même aventure menaçait le village de Winanplanche le 3 Juillet. Le colonel de Hautregard ordonna à la compagnie de Jalhay d'y porter secours, ce qu'elle fit aussitôt.
  Un peu plus tard, tout fut encore en émoi par l'approche d'une armée  conduite par le Baron de Boutselaere.
  Le 15 Août survint le double incident que voici : Le Prince de Nassau Siegen ,Gouverneur de Limbourg, ayant terminé un séjour à Spa   réclama des charrettes pour reconduire ses bagages. Au même moment, l'un de ses serviteurs revenant d'avoir été chercher un chien à Bruxelles, s'était vu complètement dépouiller en route et Jalhay le réconfortait, alors que son maitre y faisait son entrée.
 Quoique le contingent militaire du Ban fut très affaibli, les appels d'hommes continuaient l'ancienne formule ses « 70 hommes de la compagnie ». Ils furent commandés le 7 septembre pour aller à la rencontre de S. A. revenant d'Allemagne. Le Gouverneur l’ayant suivie jusqu'à Liège, il écrivit le 28 au Bre, pour lui manifester son étonnement « de n'avoir reçu la visite de ceux de Jalhay, le Gouverneur de Huy  Condroz et Moha voulant, pour tel oubli, lever des contributions sur le Ban ».
  Ce même mois de nouveaux dangers se présentant, S. A. envoya de ses troupes à Jalhay et Herbiester ainsi qu'un ordre à chaque Ban, de fournir 100 chevaux et 200 fantassins pour la défense du pays. Ce dernier chiffre se trouva être celui de tous les hommes capables de porter les armes au Ban de Jalhay.
  En Mars reparut le colonel Jalheau. Pour lui, le 4 Mars, tous durent encore se refugier à Verviers. Le 8 pour le Baron d'Agricour le 8. Le mois suivant, le colonel Fabry demandait une somme pour débarrasser Jalhay de son régiment. En réponse le Ban révolté de ces abus leva 43 cavaliers à 50 sous par jour, « pour tenir à bride les fauteurs ». 
Requête fut adressée au colonel Franchimontois pour lui représenter « les misères, hasards et charges que le Ban a endurées ». Il fut alors résolu de considérer Jalhay comme point stratégique et d'en rétablir encore les défenses par tous les moyens dont ou pourrait disposer.
  Le Gouverneur alla visiter les fortifications nouvelles le 23 Janvier 1654. A son approche, le capitaine voulait qu'on sonnât la cloche pour honorer l'arrivant. Le Gouverneur commanda de n'en rien faire, afin de ne pas ébruiter sa présence. Le Bre fit seulement prévenir les caporaux et l'on convint de s'armer à la première semonce. La visite terminée, on donna 41 patars au chapelain du Baron pour le nouvel an et 20 patars au cuisinier.
  Une supplique ayant été présentée par les habitants, vu le grand dommage causé par les gardes continuelles le Gouverneur permit qu'elles cessassent pour un peu de temps. Cet arrêt permit de pousser avec ardeur les travaux de défense qui furent achevés en Mars. Juste sept années après le désastre de 1647, le Gouvernement liégeois y fit installer des canons, envoyés en prêt.
  A ce moment, apparaissaient à l'horizon les armées française et Croate. 
Le Duc de Lorraine, prisonnier des Espagnols, écrivait à l'un de ses Capitaines de mettre tout à feu et à sang dans les lieux occupés par ses armées.
  Coleye, l'un de ses capitaines menaça Jalhay. Son quartier-maître, de Catz, s'établit en Avril. Ce chef revint ensuite avec de nouvelles fureurs, mais on sut l'apaiser par 20 ducats.
  Une armée française entrait au bourg le 12 Mars en donnant ordre de chercher force gibier pour ses chefs ; mais on ne trouva dans tout le Ban qu'un lièvre et un chevreuil.
  Tout le mois suivant fut rempli de terreurs causées par les Espagnols, Français et Croates. Avec Sart, il fut fait accord d'organiser deux escouades permanentes afin d'avoir une garde incessante nuit et jour.
  A ce propos, Jacques Pichot de Jalhay adressa une requête aux magistrats : « si dans les marches de guerre faites par les pauvres et les riches, ceux-là s'armant pour la conservation de ceux-ci, les premiers ne doivent pas être payés ». 
  Le péril commun fit dédaigner la proposition. •
  Le 23 Avril arrivèrent, le soir et la nuit, des ordres de fuir avec tout le bétail et les foulles des belligérants devaient se poursuivre encore pendant plus d'un siècle !
  Au bourg un tiers des habitations brûlées en 1647 n'avaient pas été reconstruites lorsqu'en Octobre 16541 une troupe survenant « ruina la maison du chapelain, l'école et brûla sur la rue le lit de la Dame Groulart.

  Ce fut sans doute par désir de voir un jour une garnison protectrice établie au Ban que Jean Blancheteste lui léguait alors « une rente de 321fl. pour l'entretien de quelques soldats de S. A., « mais son espoir ne se réalisa point ».
   Si Jalhay était malheureux de par certain voisinage, ce n'était certes pas faute de pratiquer le dicton « les petits cadeaux entretiennent l'amitié ». Tout ce que le Ban possédait en venaison était distribué en cadeaux. Que l’on en juge par le nombre de demandes et d'envois faits à Limbourg, à Franchimont, aux créanciers, etc., etc. A défaut de gibier, il mandait paille, bois, avoine et denrées de tout genre, dont en 1663 « des remoudoux » pour le Gouverneur de Limbourg. A ce sujet, voici quelques détails du cours de l'année qui nous occupe :
  Le 25 Juillet, le Prince de Nassau « demanda d'être assisté en venaison ».
En réponse il reçut un porc sangly de 12 fl.
  Le 19 Août, M. Sluse collecteur de la milice écrivit de Theux ces mots: « Mon maitre le Gouverneur fait souvent des diners pour entretenances d'amitié avec plusieurs Seigneurs, ce qui ne nuit pas à son gouvernement, au contraire, et à cette occasion il demande de la venaison savoir : chevreux, sanglers, etc ». Une seconde lettre disait: « quelque cerfs ou chevreux ».
  Pour cet envoi le Bre nota ce qui suit en ses comptes :
« Notre Pasteur possédait deux siens chevreuils, male et femelle, nourris depuis 10 semaines. Il en avait refusé 29fl. Il me les donna pour 14, vu la nécessité. » En même temps, de la part du Gouverneur arrivait au capitaine de Jalhay l'ordre de « préparer ses gens pour aller chasser aux loups dans les forêts de Spa ».
  Peu après, ce chef du Marquisat se rendit à Jalhay accompagné de sa femme, de sa fille, du Lieutenant-Gouverneur de Limbourg et de deux capitaines.
  Les cordons bleus de l'endroit préparèrent un festin dont voici le compte :
« Des viandes cherchées à Vervier, (chiffre non indiqué), du selerix pour 42 patars, 4 coquekais à 6 patars, 5 poulets à 8, 5 pertrix à 8, quenelle, gengibe, mosquatte, clawson, mostate, huile d'olive, fleures et corinthines„ souque, pronnes, biesquit, 4 livres d'amandes, des poires d'orange, etc., on acheta des voiles henats (hanaps en verre) et quelques flutes ». (Verres plus élevés que les précédents.)
  Le repas étant terminé, on offrit, comme don joyeux à Madame la Baronne 10 fl. d'or ou 240 fl. de Liège, et à sa fille 4 patagons.
  Enfin la note ajoute : « On fit reblanchir les nappes et serviettes qu'on avait burni à l'arrivée de M. le Baron. Au Mayeur qui les avait prêtées, on en a racheté six que l'on avait prises ».
  Le peuple au cœur si vaillant et à l'esprit si pacifique revit bientôt les mauvais jours, en 1656, il en était tout impressionné. A preuve les lignes suivantes que traçait un moribond dont le testament commence connue suit:
« Attendu le grand trouble de guerre en ces quartiers sans repos ni assurances par les alogemens, foragemens, pilleries, branscattes, ni même de la vie, tant par les troubles des troupes du duc de Lorraine que de S. M. très chrétienne, lesquelles mettent le pays en branle. Considérant qu'il n'est rien de plus certain que la mort et de plus incertain que le moment où icelle arrive, je lègue, etc ».
  En Décembre 1661,1es soldats de Limbourg firent une razzia de tous les chevaux du Ban réfugiés dans les forêts en un moment de panique. Les mêmes, en Janvier 1662, enlevèrent sur la route un convoi de bœufs demandé à Jalhay par l'armée française. Le Bre le guidant, on voulut le rendre responsable de la perte, mais la défense des conducteurs et la sienne surtout ayant été très belle et il fut excusé.
  Le 17 Mars, on s'attendait encore à des malheurs :  4000 français avaient livré deux combats aux habitants de Weisme, qui se défendirent avec un rare courage. Le régiment français du colonel Hellen s'avançant ensuite vers Jalhay. Cinq des magistrats allèrent à sa rencontre dans l'espoir de le détourner par un don. Cela fut impossible, « ces troupes ayant été par trop talonnées la nuit » répondirent les chefs.
  Elles entrèrent donc au bourg, étant accompagnées de 77 femmes et de 39 enfants.
  Une discussion grave, au sujet du Ban, menaça d'un péril la Principauté même en l'année 1660, voici comment. Des soldats de Limbourg allèrent s'emparer à Jalhay, sans nulle raison, des boeufs de Hubert Pichot beau-frère du Mayeur. Celui-ci se rendit porter plainte à son confrère de la forteresse qui, par une sorte d'ironie, le laissa attendre longtemps à sa porte et ne lui donna pas audience. Le Magistrat de Jalhay, indigné, fit saisir immédiatement en représailles par les forestiers de la commune et près de Herve, un cheval appartenant à un habitant de Limbourg, les envoyés disant que c'était par ordre de S.A.
   A cette nouvelle, le bourg se divisa en deux partis, les Bres tenant pour leur chef de Justice et le peuple craignant de nouveaux conflits. Les esprits étant, à ce propos, surexcités autant au pays de Liège qu'au Limbourg. Il fut proposé et accepté une assemblée d'accommodement fixée à JaIhay. Le Conseil de Brabant y députa le Prince de Nassau  Gouverneur de Limbourg et le Prince de Liège envoya, en qualité
de représentants, Jean de Sluse, son Receveur au Franchimont, et Arnauld de Randaxhe , ancien Bourgmestre de Liège. Mais ce fut en vain qu'ils attendirent le Prince voisin.
  Son absence non prévenue agita la réunion puis il y eut de nombreuses allées et venues entre Franchimont, Limbourg et les Conseils privés de Liège et de Bruxelles. L'affaire s'envenima, des deux parts on y voyait un casus belli. Alors le Prince de Liège, se souvenant peut-être qu'une vache de Ciney avait mis jadis son pays à feu et à sang, ne voulut pas qu'un cheval produisit même effet. Il prit la résolution de le faire restituer à son propriétaire sans plus.
  Le 1er Décembre 1671,1e colonel Hellen, que Jalhay avait déjà vu avec ses gens, réglait, en le préparant par Theux et Spa, le passage que devait effectuer à travers la Fagne, le Duc de Luxembourg. François-Henri de Montmorency, qui devait être le vainqueur de Neerwinden.
  En Janvier 1672, ordre arriva de par S. A. de ne plus sortir sans armes, d'avoir balles, poudre et d'être sans cesse prêts à marcher, les mouvements des troupes hollandaises inspirant de grandes inquiétudes. Les habitants détournés de leurs travaux demandèrent en vain de ne monter la garde que la nuit, le dit ordre dut être maintenu jusqu'en Mai.
  Des troupes de Turenne ayant aussi traversé les Fagnes, la malveillance accusa faussement la milice du bourg de leur avoir tué deux hommes et enlevé 9 chevaux. Ces dires provoquèrent des enquêtes pleines de dangers malgré l'innocence avérée du Ban, lequel, heureusement, ne pâtît de cette calomnie.
Des troupes hollandaises parurent à Dolhain le 3 Mai, menaçant de ravager Jalhay, mais elles furent détournées de ce but parce que l'armée du Prince de Condé s'avançait par le Condroz vers Chénée. A sa rencontre se rendait le jeune Baron de Lynden, pour lequel, et à cette lin, le Gouverneur son père donnait ordre au bourg « de tenir pour le 4, un cheval prêt, pour l'accompagner ».
  Le dernier jour du mois, tous les bras étaient occupés « à limiter tles voyes sur la Fagne pour le passage des étrangers le long desquelles on planta des pierres et leva des fossés ».
  Le 4 Juillet le Gouverneur de Maestricht ayant défendu à ses gens de fouler le Franchimont, Jalhay fut engagé à lui faire tenir du gibier chaque quinzaine. Le lendemain le Gouverneur de Franchimont en demandait le plus possible pour offrir au général français de Chamilly, arrivé à Spa.
  L'on se croyait délivré des exigences de Maestricht, lorsque le 27 Août, son Gouverneur voulut de nouvelles contributions parce que, disait-il, le Prince de Liège avait pris les armes contre les Hollandais. Des crises nouvelles résultèrent de ce mensonge, le bourg eut ordre de relever fossés et barrières, et tout fut préparé pour une forte résistance.
  Louis XIV qui, le 5 Mai, était entré en Belgique par Charleroy, avait passé la Meuse le 24, et campait à Bernau. (Pour de là se rendre au Rhin, puis s'en retourner au mois d'Août, sans assiéger Maestricht comme on l'avait cru.)
  Le théâtre de la guerre ayant été porté vers la Hollande et l'Allemagne, le Marquisat jouit d'une accalmie dont il goûta les douceurs pendant quelques semaines.
  Le Gouverneur de Maestricht réitéra une promesse de défendre à ses soldats de toucher au Franchimont, lequel lui envoya en reconnaissance cent ducats et à son secrétaire cent florins.
  Jalhay, tout en y contribuant, fut conseillé en Novembre de lui tenir toujours de la venaison. Il fit doni possible et, pour ce bon avis, offrit au Baron de Lynden une chapée de 34 bouxhes (gerbes de paille de seigle) à 4 patars l'une, plus une charrée de foin.
  Les Bans, heureux de voir briller un rayon du soleil pacifique, invitèrent, chacun à son tour, le Gouverneur à leur fête de dédicace. Jalhay, le 16 Septembre, lui députait à même fin le Bre Pierre Lange qui, en outre de l'invitation, lui représenta que s'il ne pouvait l'accepter, le Ban lui offrirait quand même 50 patagons.



  Par malheur ce jour même, l'alarme éclatait partout. A minuit ordre arriva de doubler les gardes, les Hollandais sévissant aux environs de Liège. Le 2 Octobre, ils envoyèrent de Maestricht 3000 hommes vers Boland, et leurs violences en la principauté obligèrent enfin le Prince à leur déclarer la guerre qu'ils paraissaient tant désirer. Elle fut « publiée à Liège au son de la trompette », ainsi qu'avisait le Gouverneur le 18 Octobre, en demandant à Jalhay 70 hommes et de compléter les fortifications qu'il alla visiter le 3 Novembre.
  Cette constatation de leur importance fut un évènement pour le bourg. Toutes les compagnies des Bans s'y réunirent en gros, commandées par le capitaine du lieu. « Une invitation à diner avait été faite au Gouverneur ». A ce sujet, qu'il soit permis de citer encore une variété de menu. Il y fut présenté: «  6 livres de chair de vache, 2 poules grasses, un quarteron d'oeufs, on fit prendre à Verviers: 3 citrons, biscutes, soucates, (sucreries) spéceries, prennes Damas, (prunes de Damas) roisins et autres menuités, pour 21 fl. des gaves (gauffres) pour 5 patars, une charge de bouteilles et une tonne de bierre, pour 53 florins ».
  La semaine suivante, de Lynden alla de nouveau s'assurer du bon état des dits travaux, il était accompagné d'officiers. l'œuvre de défense étant reconnue complète, il y eut réception. Le diner fut cette Ibis rehaussé d'un jambon de Mayence et « Anne Le Pastegy reçut un dringel de 5 patars pour avoir accomodé les viandes pour les dits Messeigneurs ». Ceux-ci partirent en donnant « ordre de tenir argent prêt pour détourner au besoin les troupes du Prince d'Orange. Celui-ci se trouvait à Mélen. Le 22, avec 1500 hommes et 4 à 5000 chevaux destinés à passer « sur un point du Marquisat ».
  Les Bans s'assemblèrent à 'l'heux pour s'entendre au sujet d'un cadeau à faire au Gouverneur de Limbourg, vu les circonstances pénibles que les menaces des Hollandais procuraient au pays. Les politesses généreuses de Jalhay à l'égard de ce chef voisin et de son Lieutenant, se renouvelaient souvent comme on a pu voir celle de Novembre. Mais, par un long usage, ces politesses menaçaient de devenir une obligation, tant en bois et autres denrées qu'en argent.
  Le Prince Gouverneur au même mois de l'année précédente avait reçu « comme présent, 24 stiers d'avoine à 20 patars et 300 waz (gerbes de paille) à 8 fl. 5- patars le cent. A son lieutenant Obert on avait donné 6 patagons et une charrée de 32 bouxhes ». 
  Le 7 Novembre 1672, le beau-père du lieutenant Obert  étant mort, Jalhay s'empressa de faire tenir au gendre, de la venaison, des truites et cinq patagons « comme présent accoutumé ». Quant à son chef, il reçut 48 stiers d'avoine avec les mots: « selon l'ordinaire » plus une charretée de perches de houblon.
  On variait donc la dose selon les événements, dans l'espoir de procédés favorables. En même temps le Secrétaire du Prince de Nassau demanda qu’il fut « ajouté au cadeau quatre charrées de verges de fèves et de belles perches pour faire une gloriette dans le jardin de son maitre ». Lequel, en retour, envoyait une lettre pour le grand chancelier de Liège afin qu'il tienne bonne garde contre les Echevins, missive dont le Ban ne sut que faire. Mais comme il se prêtait avec bonne grâce à tous les désirs de ses voisins, le Drossard de Limbourg N. de la Murselle, habitant Eupen, prit l'habitude de faire tailler dans les forêts du Ban sa provision de chauffage, Jalhay protesta. En réponse le même l'imposa en outre de son charbon de bois, ce que la magistrature défendit à quiconque de livrer. Les menaces succédèrent au refus et la garnison de la forteresse, spectatrice du débat, ne demandait pas mieux que d'engager la lutte. Les Etats de Liège, appelés comme juges, déléguèrent en qualité de médiateur le grand chancelier. Cet officier s'étant rendu à Spa, le 26 Juin à ce sujet, donna pour conseil à Jalhay de céder sans conséquence, ce qui eut lieu.
  En fait d'impositions par le pays envers le Ban, l'une d'elles est signalée par un écrit du 6 Décembre même année, disant: « Les 17 hommes sont Mus pour aller sur la foire de Liège, ordre au capitaine de les faire marcher ». C'était donc une garde spéciale que Jalhay devait aussi fournir.
  Enfin, pour terminer cette année 1672, le 13 Décembre, le Gouverneur de Maestricht fit demander aux Marquisat: « 200 chevaux pour les employer à ce qu'il trouverait bon ».
  En Février 1673, les Hollandais s'approchaient de la ville de Verviers pour la mettre à pillage, lorsque les milices des autres Bans arrivèrent à son secours et mirent en fuite ces assaillants.
  
Arrivée de Louis XIV au camp devant Maastricht (détail) par Adam Frans van der Meulen



Les Français ayant entrepris le siège de Maestricht , le 6 Mai, le général de Livoix exigeait beaucoup d'hommes pour travailler aux tranchées. Le Ban en fournit un bon nombre et les fatigues leur imposées furent excessives.
  Le Gouverneur alla s'en rendre compte le 13 Juin, au moment où s'ouvrait la tranchée. A son départ, il avait eu soin de demander à Jalhay « le plus de gibier possible pour le distribuer en cadeaux ».
  Maestricht fut prise le 30 du même mois et le Ban souffrit encore par un passage des dits assiégeants, relaté comme suit : 
« Le 6 Juillet, 7000 hommes piétons et cavaliers avec un volumineux bagage, conduits par de Pilloy vers St-Vith arrivaient à Vervier. Les Magistrats de Jalhay s'y rendirent aussitôt pour traiter, avec ce chef de ses prétentions. Pendant qu'ils parlementaient, un détachement de ses troupes courut piller plusieurs habitations à Surister et à Foyr. A Foyr, entr'autres,  la maison du Mayeur qui était de la députation. Ces déprédations s'étendirent aussi à divers points des Bans de Sart et de Theux.
  Les dits envoyés, instruits du dégât, s'en retournèrent pour prévenir de nouveaux malheurs, le Bre Lange resta seul pour conclure.
  
Moyennant 50 pistoles, il obtint de faire passer ces troupes par Néau (EUPEN), et gratifia de 24 fl. l'aumônier du dit Pilloy vu ses bons services en cette affaire.
  
Le même jour le gros de l'armée française était massé devant Visé, prêt à marcher vers le Franchimont ; le 11, le Bre Pierre Lange et le Mayeur, prévenus de son approche, allèrent au devant. Ils rencontrèrent au village de José (Battice) la première brigade, conduite par le Marquis de St-Ghilain, « préparant les chemins pour le passage de l'armée royale ». 

Elle logea à Soiron et à José. Le lendemain les magistrats précités, avec leur collègue Thomson de Vinamont, accompagnèrent le dit marquis allant vers la Fagne.
  Ils le conduisaient par le Jonckeu, lorsqu'arrivés à ce point, il s'éleva une grande dispute touchant ce passage, avec M. de Noirfalise de Polleur. Ce dernier voulant tracer un autre itinéraire pour épargner sa commune.    Cependant le même jour, le Gouverneur avisa que toute l'armée suivrait la route indiquée déjà.

 Le 13, Jalhay envoya vers d'autres troupes le Bre, le Mayeur et Henri Massin, qui trouvèrent le Marquis de Rochefort avec une nombreuse et brillante compagnie de cavaliers visitant les chemins entre Polleur et le moulin de Jalhay  (situé à Suristère). A ce dernier point tous tirent halte.
Maréchal de Rochefort
  
L'armée logea à Sart le 17, pourtant plusieurs troupes abordèrent sur le bourg, non sans dégâts, et la grand'garde était posée sur le Tiernay de Surister.

 Aux temps anciens les Princes de Liège, pour sauvegarder le Ban, faisaient placer aux frontières des poteaux ornés d'un blason à leurs armes. Après Gérard de Groesbeck, il fallut compter avec les envahisseurs qui fournirent comme protection un ou deux de leurs soldats à beaux deniers comptants.
  En 1672 les français, à même prix, remirent en vogue « les sauvegardes en peinture ». Jalhay, après avoir satisfait aux impositions, en obtint du comte d'Estrades, le capitaine diplomate, devenu Gouverneur de Maestricht. Ces nouveaux blasons ou placards s'appliquaient sur les maisons à protéger et se payaient 65 patars pièce.
  Malheureusement les bataillons nombreux de Louis XIV se promenaient, on peut le dire, d'une localité à l'autre, comme s'ils avaient voulu en épuiser les vivres.
  L'armée du Duc de Luxembourg, conduite par le colonel de Pilloy, étant à Verviers le 19 Juillet et voulant traverser la Fagne, ordre fut de préparer les chemins par le bois de Tiège et près de Jehanster où les bagages passèrent, la cavalerie et l'infanterie allant par Polleur.
  Malgré des sauvegardes ornant la plupart des maisons, la terreur y règnait. En l'attente d'événements, nul ne voulait quitter sa demeure pour servir de guide à l'armée, qui cheminait de nuit. Le Bre Denis Jaspar et Jean Remacle, de Jalhay, voyant cette hésitation, coururent au poste pénible et conduisirent cette multitude vers Royonprez, où la grand' garde s'établit. La cavalerie pâtura d'abord sur le Ban mais on en obtint le retrait par quelques dons. Cependant le fait ne s'accomplit pas sans qu'il se commit « quelques insolences et pillages » dont Jalhay dressa un état qui fut envoyé au dit chef.
  La garnison de Maestricht, française cette fois, imposait de fortes contributions en fourrages et frappait d'exécutions militaires très rigoureuses les retardataires. C'est ce que fit savoir d'Estrades en avisant qu'à cette fin on ravageait le Ban de Herve. Et le 27 débutait une série de misères de même genre, infligées par le général comte Gaspar de Chavagnac, français, alors au service de l'Empereur d'Autriche. Ce chef, après ses escarmouches: avec l'armée du Roi, s'abritait dans les forêts de l'Ardenne en butinant sur leurs localités.
  Une partie de l'armée française approchait encore le 9 Août, le souvenir des méfaits des passages précédents répandirent de nouveau l'épouvante et voici comment le Bre Pottier nota le fait en ses comptes. « Voyant venir l'armée je pris un chevreuil chez de Presseux, à Theux, afin de détourner les troupes de Monsieur de Pilloy et chercher des sauvegardes pour revenir, crainte de malheur. De retour à Jalhay, tout s'était enfui et ne trouvant personne pour porter le gibier, je le conduisis avec mon cheval à Vervier. Pendant ce temps un parti de coureurs vint piller plusieurs habitations, j'y perdis des moutons, brebis et poules, ma femme, qui était restée, quand même, s'étant enfermée dans la maison ».
  Le 13, l'armée du Prince de Condé venant d'Ensival allait atteindre le bourg, lorsqu'arriva contre-ordre et elle rebroussa chemin.
  Le dernier jour du mois, passèrent 300 chevaux et 3000 soldats dont l'un expirait en traversant Jalhay, et le lendemain, 1er Septembre, le général Stroet s'arrêta pour loger, avec 13.000 hommes.
  Le 2 Septembre, la cavalerie précitée y retournait, lorsque pour l'engager à prendre la route de Henri-Chapelle, on lui députa Nizet Denis et Jean Bovy fils de Warnier, auxquels on avait adjoint Mathieu le Chaply, de Vervier ou il était lieutenant. Mais d'Estrades, qui commandait la dite armée, ne voulut changer son itinéraire et s'arrêta au bourg.
  Le Gouverneur alla lui faire visite; le lendemain il le reconduisit à Maestricht, accompagné de son fils, du Bre et du chanoine Charles de Stembert, qui était de Verviers et s'était dévoué à la protection du Ban.
  Pour cette course, le bourg offrit au premier 12 souverains, au second 4 et au grand Mayeur de Liège 6.
  Le dit chanoine se prêta au même genre de corvée le 7 Octobre pour surveiller le passage d'une autre armée française allant d'Eupen à Petit-Rechain. Cette fois il était accompagné du Bre et des capitaines de Jalhay et d'Énsival qui servaient de guides.
  Cette armée était de retour au Ban le 4 Décembre.
  Le général de Chavagnac y arrivait le 23, pour loger deux nuits et au prix de 30 fl. il accorda une sauvegarde pour l'église, puis se rendit à Spa pour quatre jours ; le comte de Lathour était son lieutenant-général.
  Le Prince de Nassau eut l'attention d'aviser Jalhay de ne rien craindre de ce dernier passage, lequel fut suivi par le séjour de deux corps d'armées impériales, conduites par les généraux comte Souches et Duc de Beurnonville.
A leur départ tout était consommé, en outre, de nombreuses scènes de destruction de meubles et d'habitations avaient eu lieu. Aussi, cette même année lorsqu'il fut question d'impôts à payer à l'Etat, le nombre de citations dépassa 250 pour insolvabilité.
  Tant de marches et contre marches aux environs de Limbourg semblaient avoir pour but d'étudier le terrain en prévision du siège de cette ville.
  Le Gouverneur s'étant rendu chez le Prince de Nassau, y fit appeler le Bre Jacques Pichet, de Jalhay, c'était pour engager celui-ci à faire un présent au haut et puissant Seigneur voisin. Le magistrat en se retirant donna « un blanc meuse au page » ou 10 sous de Liège, et autant à celui qui ouvrit la porte de la ville.
  Le même alla, le 23 à la rencontre encore d'une armée française venant d'Ensival par le Jonckeu, et le 31 fit semblable course à Beversé, au devant de celle des Impériaux. Alors le Prince de Nassau ordonna aux Bres d'aller le voir quotidiennement à Limbourg. 
  Le jour de l'an 1674, il les appela en son Conseil, pour être instruit de la marche des armées, mais ayant appris que les français avaient demandé des rations, il s'en fit donner la liste et en réclama autant.
  Il en exigea le 26 pour son commandant le comte de Monterey et celui-ci en demanda le 27 pour son maitre.
  Or, pour le Ban tant appauvri, devait bientôt résonner douloureusement toutes les éventualités d'un siège destructeur pour la forteresse et pendant le cours duquel il devait lui être réservé un nouveau genre de supplice. C'est-à-dire qu'a chaque fois que l'un des belligérants allait lui imposer son caprice, l'autre devait s'empresser d'exiger même part de butin.
  Au milieu des préoccupations les plus sévères, il suffit parfois d'un incident pour les écarter momentanément. C'est ce qui arriva le 28, à cause d'un enfant trouvé à Surister. 
Le fait était sans exemple dans le pays et nul, au Ban, ne supposait sa possibilité. Aussi, l'émoi, les courses et communications entre les autorités à ce sujet, furent ou peut dire considérables. Ajoutons que cet acte fut commis par une femme venue « d'outre-frontière » pour accomplir ce fait.
  Au même temps les Lorrains s'approchèrent de nouveau en « tapinois ». A cette nouvelle on s'empressa de mener tous les papiers du greffe à Spa.
  Un lieutenant du Baron d'Orbecke passant avec des cavaliers en éclaireurs demandèrent un guide pour Zourbroude, il fut livré mais laissé en gage à destination pour la dépense y faite et que Jalhay paya.
  Chavagnac étant de retour et campe à Fronville, le Prince de Nassau donna à son attention, au Bre Denis Jaspar, une lettre de recommandation afin de calmer les désirs onéreux de ce général. Le Magistrat partait tout heureux lorsque, dit-il « après avoir marché pendant une demi-heure, trois cavaliers m'assaillirent furieusement pour me dérober tout ce que j'avais,
 conjointement avec 7 1/2 fl. d'argent que le Bre Pirotte Lorent m'avait mis en mains, et jusqu'à mes gants, mon couteau, un peigne de 6 liards et aussi la lettre du Prince de Nassau ».
  Le 10 Février, les officiers de celui-ci, avec menaces d'y contraindre, demandèrent 100 malders de froment, 100 de pois, 1000 d'orge et 2000 de seigle.
  Dans l'appréhension des suites d'un refus et vu l'impossibilité de satisfaire en nature, le 12 on remit au dit Prince 320 écus, à son Lieutenant 56, à l'Intendant 600 fl. Le 29 encore 200 patagons au premier et 400 ff. le mois suivant pour des rations de fourrages.
  Il fallut aussi envoyer une députation à Chavagnac arrivé à Aywaille, avec le Baron d'Isola, ambassadeur de l'Émpereur. Le 13 ils logèrent à Spa, conduisant 3000 chevaux. Le comte de Lathour, avec 500 cavaliers se rendait à Limbourg, par Jalhay, qui lui donna 60 patagons.
  Le 19 Mars, le capitaine Pallant demanda de Limbourg du gibier pour Pâques. Il était introuvable. On eut beau lui représenter qu'il n'existait dans le pays que « des champaines », (grives), en remplacement il se fit livrer des rations en denrées, alors très coûteuses.
  Le Prince de Nassau ayant derechef appelé les Bres. Son intendant profita de cette présence au Conseil pour leur demander 486 rations de fourrages pour le 16, 266 de même pour le 26 et du grain.
  Celui-ci était très rare et défense existait d'en sortir du pays, mais le 29, on fut forcé de remettre au susdit la chose réclamée, laquelle, à cause du retard, fut portée à 665 rations de foin et 325 mesures de farine.
  Les Bans se réunirent à Franchimont concernant et les prétentions croissantes de Limbourg et ses délits révoltants, voyez ce fait :
  Le 27 Mars, qui était le Lundi de Pâques, la garnison sortant à l'improviste la nuit, courut enlever tout le bétail de Jehanster, et si rapidement que la population ne put rien défendre. Celle-ci pourtant reprocha vivement au Ban de n'être pas allé à son aide.
  Comme ce village faisait partie de la ligue de secours à se prêter mutuellement, organisée entre nombre de localités, il voulut contraindre Jalhay à prendre les armes contre Limbourg même. Les Bans se réunirent de suite à Franchimont. Le colonel du régiment y appelé, déclara s'être rendu à Jalhay aussitôt l'alarme donnée, mais que la compagnie du Ban n'étant pas réunie en ce moment, il lui avait été impossible d'agir. A ce sujet, le manuscrit Desonkeux nous apprend que les pillards étaient retournés à Limbourg avant que l'on fût averti du fait dans le pays.
  Le Ban se retira donc absous de la séance de ou tribunal de guerre, érigé à cette occasion, et devant lequel avaient été traduits le Mayeur et le capitaine de Jalhay. .
   Le même tribunal avait été établi à Limbourg par le Prince de Nassau, dès qu'il connut les prétentions de Jehanster. Pour le dit méfait, non seulement il fut impossible d'obtenir recours contre les voleurs, mais comme insulte nouvelle leur intendant se fit donner le surlendemain par Jalhay 200 patagons comme si la plainte adressée contre cette localité devait aussi lui valoir punition.
  Pourtant si Limbourg restait libre de représailles de la part du pays de Liège, cette mauvaise action sembla être le prélude de sa ruine, car trois jours après se dévoilèrent des préparatifs du siège le plus fatal qu'elle ait subi. Lequel pourtant ne devait s'accomplir que l'année suivante.
  Néanmoins à la vue des préparations d'attaque, Jalhay conduisit à Spa ses objets les plus précieux et les ornements de l’église.
  Pendant cette panique les ordres se pressaient au bourg. Maestricht demandant des rations, Verviers menacé réclamant des hommes, tandis que par Aywaille, les Hollandais arrivaient. Les céréales furent conduites à Verviers « ce qui donna de grandes difficultés pour les semailles ».
  Le 10 Août, le Prince de Nassau fut supplié de laisser acheter des vivres en son Duché. Nous ne voyons s'il accepta. Mais, le lendemain, les Bres s'étant rendus à Limbourg avec une seconde supplique dans l'espoir d'empêcher des déprédations nouvelles qui avaient lieu dans les forets. Le Prince ne voulut pas les recevoir. Cependant il admit de placer quelques hommes à Polleur comme garde contre les français imposant le pays.
  Le Bre retourna le 20 à Limbourg avec 400fl. qui furent accueillis ainsi que 44 fl. pour ces dits soldats.
  Le Prince de Nassau ayant de même établi à la porte de Hodimont lez-Verviers une garde de 200 hommes, Jalhay leur donna un bœuf pour sa cote part de bienvenue.
  A Beversé « arrivait le colonel Baron de Steilmacker, au service du Prince de Bade ». Le Prince de Nassau s'y étant rendu, Jalhay lui fit tenir en cadeau « corettes, becasses et grives ». Il fit pourtant la politesse de demander à les payer.
  Le 4 Mai Chavagnac était de retour à Spa et nouvelle requête au sujet des vivres était présentée à Limbourg, mais Verviers faisait opposition à ce moyen. De plus, cette ville avait obtenu que Jalhay ne vendit ses denrées et bois que sur son marché à elle.
  Le Prince de Nassau étant allé à Cologne, revint le 17 par Jalhay on il logea et fut traité avec tous les soins possibles.
  Le Duc de Beurnonville ayant établi son camp entre Verviers et Stembert, ses soldats se jetèrent sur le Ban où, dit un rapport « il ont en 11 jours dissipé fruits, grains, herbages, rupturé maisons, bastimens, édifices, asporté meubles et hardes, quoique les officiers eussent obligé de leur mener chair, jambons, veaux, agneaux, truites, bœur, pain, vaches et bœufs pour 8000 fi. »
  Le Bre, profitant d'une visite que le dit Prince faisait à ce camp, porta au général un magnifique plat de truites. Elles furent reçues avec satisfaction et cet propos valut au Ban des sauvegardes jusqu'au départ de l'armée (ce qui eut lieu le dernier jour du mois).
  Comme reconnaissance Jalhay donna 88 fl. et une vache à l'un des capitaines, plus un veau gras au chef des sauvegardes. L'une de celles-ci ayant accompagné le Bre à Stembert. Le 26, « elle désira y déjeuner mais il fallut aller à Verviers pour acheter un morceau de pain et du fromage n'en pouvant trouver à Stembert en ce moment » écrivit le Bre ; celui-ci et ses collègues des autres Bans durent accompagner pendant 17 jours, exposés à tous les périls, divers corps de troupes.
  
Aussitôt  après leur départ une armée impériale arrivait par Néau et Bailoux et celle des Français était à Navagne (Visé).
  Le 31, Beurnonville étant parti pour Juliers, Bertholet Simon, de Jalhay, leur servit de guide pendant six jours. « il revint disant mourir de faim et n'avoir pu trouver un repas durans tout son voyage ». Le Prince de Nassau pour les grâces qu’il avait faites en ces circonstances reçut 2 lièvres de 3 fl., 2 cabry de 8, deux agneaux de 91/2 et 52 stiers d'avoine. Peu après il demanda qu'il lui fut livré « des fenêtres ».
  Le 27 Juin la part de Jalhay, à porter à Huy au comte de Souches, général des troupes allemandes, fut de 1386 fl., empruntés à 10%, et que remit à destination le conseiller Derchain d'Ensival.
  En Novembre des troupes espagnoles donnèrent beaucoup d'inquiétudes au Franchimont. Le château de Huy étant tenu par les impériaux, Chavagnac qui s'y trouvait, écrivit le 14, aux Bres de Jalhay d'aller le voir pour traiter des quartiers d'hiver prochains. Ils se rendirent à cet appel, ensuite le Gouverneur et le capitaine Jean Groulart y allèrent à leur tour pour conclure.
  En même temps, de Lafosse, en qualité de lieutenant-colonel du général précité, s'emparait de Verviers et demandait au bourg « des palissades pour se fortifier en la dite ville ».
  Tout le mois suivant fut employé par le Ban à lui fournir aussi « 45.940 livres de foin, à peine d'être pillé » tandis que l'on annonçait l'arrivée de troupes pour hiverner à Jalhay. Les Bres coururent à Huy présenter leurs réclamations, n'ayant plus nul fourrage.
  Les difficultés des chemins étaient telles que ces magistrats atteignirent seuls le but de leur course, ceux qui les accompagnaient furent renvoyés «  par une barque allant à Liège ».
  Le ler Janvier 1675, le Bre pour satisfaire de Lafosse, campé «  à Quinquempois » lez-Liège, s'y rendait pour lui remettre une contribution de 1750 fl. Arrivé à Fraipont, des soldats le dépouillèrent et force lui fut d'aller immédiatement à Liège emprunter même somme, à Jean Le Maitre
Pourtant nul n'osait plus s'exposer à traverser les lignes de troupes avec de l'argent ; le Bre réclama ce service d'un
(') Nous le croyons originaire du Ban.
Sa fille Marguerite avait épousé l'icrre Robert de Lantrenuinge, dont le Père capucin qui atteignit le but. En reconnaissance, l'envoyeur le força d'accepter « un fromage de Hollande de 4 fl. 2 patars ». Enfin l'un des dits voleurs fut pris et emprisonné pour un an « aux frais de Jalhay ».
  Le lendemain du vol on traitait avec de Chavagnac qui promit de quitter le Marquisat pour 1000 patagons dont 2000 fl. pour le Ban, auquel, immédiatement, de Lafosse demanda 2000 patagons. On ne put lui en donner « que 200 et un chevreuil de 18 fl. ». Le 16 180 fl., et le mois suivant 2840. Il fallut compter aussi à Erquerat, capitaine du régiment, Dünewalt 3256, et pour retard dans l'envoi de denrées à un quartier-maitre des troupes de Starnberg, 500. Au capitaine Heister 150 et à de Xhénemont 665 rations de foin et 325 mesures d'avoine.
  Pendant ce temps une compagnie appartenant à de Lafosse séjournait à Jalhay depuis deux mois afin d'appuyer les demandes de ses collègues et le capitaine Lion, d'odieuse mémoire, enlevait tout ce qu'il pouvait saisir de bestiaux et d'otages. Dans l'espoir de l’amadouer , on envoya à Stevensweerdt 200 patagons 1er Février. Le même jour, la population harassée pria le Gouverneur en lui remettant un sanglier « de ne pas l'obliger à poursuivre avec les armes ce dernier spoliateur, ni d'autre chef militaire ».
  Quatre jours plus tard, le chef du Marquisat annonçait au bourg ne rien pouvoir faire pour lui s'il ne donnait à de Lafosse 2280 fl.
Ils furent empruntés à Piron de Glen, à Liège et le 14 les prétentions nouvelles du susdit, unies à celles de Chavagnac, furent fixées à 1973 fl. mensuellement.
  Au même moment tout fut placé en alerte à la nouvelle que les français pillaient Theux après en avoir expulsé les impériaux. Les vainqueurs ayant réquisitionné un grand nombre de bras pour démolir les fortifications « au plat pays ».
Jalhay profita d'un cadeau de truites qu'il faisait au Prince de Nassau, pour lui demander s'il n’était nul danger de prendre part à ces destructions : il répondit négativement.
  Les 4, 18 et 20 du même mois, il fallut satisfaire à des envois à Huy et à Maestricht. Les gardes françaises fixées à Ensival se firent livrer du charbon et le comte d'Estrades étant à Maestricht demanda autant d'argent que l'on en avait donné aux Impériaux. Sur ce, de Chavagnac revint à la charge « comme compensation de ce que Verviers n'avait pas voulu intervenir dans la donation lui faite, en Janvier, par les autres Bans ».
  Les Bres étant allés à Liège dans l'espoir d'aplanir quelquesunes des difficultés présentes, ils attendirent cinq jours avant d'être reçus « pour cause de grande multitude d’affaires ». Les incursions des étrangers mettant le pays dans un incroyable désordre.
  La compagnie de Jalhay était rentrée en ses foyers pour y tenir l'ordre lorsque le 2 Mars elle fut rappelée à Liège que rançonnaient à la fois les Français et les impériaux. Le même traitement frappa le Marquisat et Jalhay fut imposé de 2281fl. que remit le 4, à liège, M. Jacques de Sclessin
que remit le 4 à Liège M. Jacques de Sclessin, de Spa.
  Bientôt après, l'exécution militaire ayant été pratiquée par les Impériaux sur Theux, Sart et Jalhay. Jalhay se racheta le 5 Avril par argent et le 10 de Chavagnac alla se poster à Stavelot, puis à Weisme.
  Le jeune Duc de Lorraine s'était rendu à Montjoie. Aussitôt les troupes de Chavagnac quittant Weisme se représentèrent par Hokay et Sart en menaçant de piller Jalhay. Quatre cavaliers les y précédèrent demandant 1500 patagons le mois pour Starnberg et 1000 fl. pour leur général.
  Vu l'impossibilité de récolter pareille somme, Mathieu Pierre et N. Wadrier furent saisis comme prisonniers de guerre.
  Le peu d'argent que l'on put trouver était porté le 25 à la garnison de Limbourg pour éviter ses insultes.
  A Maestricht, d'Estrades se montrait insatiable ; heureusement près de lui, le marquisat avait comme médiateur le chanoine N. de Malempré, de Verviers, dont les bons offices envers le Franchimont méritèrent d'être signalés.
  En ce temps « toutes les forces armées semblèrent converger vers le pâté dont la croute était bien dure » ainsi que s'exprimait, dit-on, Louis XIV en parlant de Limbourg.
  L'armée du Prince de Condé devait en faire le siége pendant le mois de Juin suivant.
  Au milieu d'une confusion d'événements, Jalhay recevait une vraie pluie d'ordres. Entr'autres, le Prince de Nassau demandait « de quoi raccommoder les affuts de ses canons » et le Gouverneur écrivait le 9 Mars ces mots aux Bres :  « Pourquoi n'amenez-vous pas une charrée de bois (par semaine ) au château de Franchimont ? Tel est l'ordre de S. A. Envoyez-la, sinon je ferai détacher 25 hommes de la garde du château, lesquels iront couper les bois taxés à vos frais en vos forêts. Il n'y a plus de bois à trouver dans le Ban de Theux qui a fourni plus de six fois sa côte-part. »
  Le 22, Jalhay était forcé par les impériaux de donner encore à de Chavagnac 2000 fl. et le 26 une députation des Bans se rendait à Liège au sujet d'un donatif à faire à d'Estrades, afin de le voir fixer enfin un chiffre à ses désirs onéreux.
  Le 1er Avril la compagnie de Jalhay est appelée à Liège à cause de la prise de la citadelle par les français. Le 4, de Chavagnac envoyait ordre au bourg de lui payer à la fois deux mois de contributions sous peine. d’exécution militaire et ses troupes s'approchèrent par Sart. Les Magistrats se Portèrent vers elles n'ayant pu réunir pour les apaiser que 30 patagons.   Ils les supplièrent de patienter jusqu'à ce que l'on eut trouvé de quoi satisfaire d'abord à la quote-part de 5434 patagons imposés par le même sur Theux, Sart, Spa et Jalhay, tous pressurés par l'exécution militaire. En même temps de Chavagnac ordonna d'aller le trouver à Comblain pour ratifier le don de 1000 fl. mensuels et la même somme pour rester éloigné du Marquisat.
  Lorsque l'argent lui fut remis le 12, il y fit ajouter 40 fl. pour le change. Par ordre de Lafosse, il fallut donner 814 rixdallers de 45 patars à Erquerat fixé à Sart le 6, et 130 patagons au lieutenant de Starnberg.
  Au même moment le nouveau Gouverneur du château de Huy, Nigrelli, se faisait compter 376 fl. L'intendant de Maestricht voulait une somme dont on ne put fournir que 350 patagons le 19. Et pour rembourser à Verviers 2000 fl. à leur prêteur N. Jodocy, il fallut une escorte de quinze hommes armés tant les soldats coureurs étaient pillards.
Afin de préserver le Ban de leurs vexations, il fut proposé par le pays d'établir une grand’garde permanente entre Jalhay et Stembert. Pourtant de crainte qu'elle n'attirat la garnison voisine déjà trop disposée à nuire, il fut fait opposition à ce projet par les deux dites localités. A cette fin elles députèrent à Liège, la première son Mayeur, Michel de Presseux, la seconde Jean Lezaack possesseur de Thiervaux, qui dépendait de Stembert, et leur désir fut satisfait.
  Jalhay était loin de voir finir ses tribulations. Le Gouveneur lui annonça, le 22 Mai, que le Ban allait être imposé « de sommes excessives en foin, avoine et paille. En effet, deux jours après Limbourg demandait 5000 rations de foin de 16 livres chacune, autant de paille et trois picotins d'avoine sous peine d'exécution ». Et bientôt après vint l'ordre d'y porter 700 patagons, dont on ne put trouver que 150. Le 29 il fallut y livrer 2000 fascines en deux jours, ce qui s'exécuta par tous les bras du Ban.
  C'est que l'armée de Condé approchait simultanément avec les Lorrains, dont le retour répandait l'effroi.
  Les premiers vinrent par le Condroz, établir à Halloux (Limbourg) leur camp d'attaque contre Limbourg. Ils s'emparèrent de Jalhay  transformant l'église en grand’garde et fortifiant le cimetière.
  Ayant pris de même le château de Franchimont, ils y mirent une garnison, laquelle fut rappelée le 18 au camp de Limbourg et remplacée par les milices des Bans. Mais Jalhay refusa d'intervenir en ce service si le Marquisat ne prenait part aux frais qu'entraînait la garde placée au bourg
Néanmoins il lui fallut acquiescer aussi à la seconde exigence de l'étranger.
  Pour exécuter les travaux du camp français, le nombre d'arbres et boiseries demandées à Jalhay était énorme.
  Le Prince de Nassau, de son côté, en exigeait le 29, « 50 poutres à peine d'être soumis par toutes les rigueurs de la guerre ». Le Bre et le Mayeur envoyés vers lui, demandèrent de voir réduire ce nombre : ils furent emprisonnés. Pour eux, le curé de Jalhay et le Bre de Limbourg, Maitre Gerard Alhoye médecin, durent se porter caution.
  L'on s'empressa de couper les arbres demandés, mais les envoyés de Limbourg avaient désigné les plus gros lesquels étant abattus, il fut impossible de les sortir des fourrés du bois de Monspurgue. Jalhay dut aller charger à Verviers et conduire à Limbourg de gros arbres équivalents.
  D'autre part les assiégeants firent couper par Jalhay « des perches de houblon, pour un cadeau que leurs officiers faisaient aux R. P. Récollets de Verviers. »
  Il fut exigé 40 hommes du Ban pour travailler au dit camp où tous les véhicules furent employés. Jalhay y envoyait en cadeau, à tout moment «  pain, bœur, poules et agneaux». Aux officiers un jour on s'avisa de porter tous les œufs que l'on sut trouver. A cette vue l'intendant du Roi exigea un  don identique et d'autres chefs présents demandèrent « un mouton pour 4fl., sinon qu'ils le prendraient pour rien ».
  Quoiqu'ils eussent d'abord payé la viande 4 sous la livre. Là aussi M. Samyer capitaine des gardes du Roi, reçut un sac d'avoine.
  Dès le début de l'occupation, Surister ayant réfugié tous ses bestiaux à Spa, les Français allèrent les y saisir puis exigèrent du Ban 200 bêtes à cornes qu'en ce moment il était loin de posséder. Il les fallait, on fit accord avec M. de Noirfalise de Polleur qui les livra au prix de 7 patars la livre. Quelques-unes des vaches ayant été trouvées trop petites, les chefs firent payer par Jalhay dix patagons de surcroit « pour les faire passer ».
  Les travaux du siége étaient poussés avec ardeur et les corvées du Ban se succédaient accablantes.
  Le 9 Juin, l'heure de l'attaque approchant, le maréchal de Créquy accourait par St-Vith pour soutenir ses compatriotes lorsqu'il fut averti qu'une armée ennemie était en vue. Néanmoin les Bres allèrent à la rencontre du premier « pour obtenir des sauvegardes » du Marquis de Rochefort Ht Louis d'Aloigny, qui allait être nominé Maréchal de France.
  De Créquy entrait à Jalhay le 14 pour y loger avec 6000 cavaliers et 4000 fantassins, puis ils allèrent s'établir à Goé pour la durée du siège.
  Le bombardement de Limbourg commencé le 10 se continuait avec une fureur effrayante et le 21, cette ville succomba sous une pluie de projectiles qui avait duré « onze jours sans interruption ».
 Aussitôt ce fait accompli, les populations environnantes furent requises pour achever sa démolition pendant laquelle les mines et accidents des poudres tuèrent beaucoup de travailleurs. Le surlendemain de Créquy retournait à Jalhay et tous les attelages du Ban furent employés à conduire ses bagages à Trèves.
  Les conséquences du siege, on le comprend, furent désastreuses pour le malheureux Ban qui ravagé et rançonné pendant les préparatifs, imposé dès la prise pour la démolition, dut contribuer ensuite à la reconstruction de la forteresse. A ce sujet, voici comment s'exprime une supplique des Bres :  « Outre un énorme fourrage, le Ban a livré environ deux cents bêtes à cornes de 12 écus pour le camp; six mille palissades; 300 gros arbres soumiers ; (à faire des poutres) 120 soumiers pour les fortifications; une grande provision de lattes pour recouvrir les toits; quantité de paille pour les malades, blessés et autres; le bois de chauffage nécessaire à la provision de la ville; 30 chariots de foin livrés en une fois; 40 à 50 chariots par jour et personnel à proportion; les fruits de la campagne détruits par les fourrageurs; beaucoup de maisons démentelées et nombre de bestiaux enlevés par les partis, sans avoir reçu un seul denier pour toute chose, quoiqu'en devoir de continuer. En sorte que cette commune a plus fait que nul autre district voisin, quoiqu'elle en soit la moindre, la plus misérable et la plus ruinée des juridictions ». Et les Magistrats, en faisant cette énumération aux vainqueurs, ne demandaient en retour que « d'être considérés à propos des quartiers d'hiver à venir ».
  Par cette énumération Jalhay n'exagérait en rien ses doléances, voici des reçus :
« Il est ordonné aux habitants du Ban de Jalhay, d'amener incessamment au camp devant Limbourg la quantité de deux cents bêtes à cornes, à peine d'être pillés et brulez.
Fait au camp, le 17 Juin 1075.
Je certifie que les habitants du Banc de Jalhay ont fourni les deux cents bêtes à cornes cy dessus, fait le 21 Juin 1675.
Samyer.
Le Directeur de l'hospital de l'armée du Roy, estably à Vervier, certitlie que les habitans de Jalhay ont cejourd'hui 25 Juin 1075, livré au dit hospital la quantité de sept cents bottes de paille, pesantes chascune dix-huit à vingt livres, desquelles leur sera tenu compte sur la paille qu'ils doivent fournir d'après l'ordonnance de Monsieur du Monceau, intendant de Maestricht .
A Limbourg, du jour d'hui.
Hugot ». 

  Ce dernier point, c'est-à-dire Verviers, fut desservi à grandes fatigues tout le reste de l'année ; outre la paille, tout le bois nécessaire y fut livré par le Ban.
  Aussitôt le siège terminé, il fut demandé des contributions pour la garnison de St-Vith ; de cinquante charrettes envoyées d'abord pour conduire des vivres et on n'en rendit que trente.
  Un parti français conduit par de Menny, le 3 Juillet, enlevait au Ban presque tous les moutons.
  En Aofit, il fallut échelonner des émissaires jusqu'à Duren à cause des courses des soldats de Luxembourg.
  Jaspar fils de Jean Pirotte, ayant été donné comme guide à des soldats, revint nu dépouillé par eux, « même de ses souliers et bas de chausses ».
  Le nouveau Gouverneur de Limbourg se montrait fort exigeant. Le même mois il faisait chercher par les hommes du Ban 4000 fascines « du bois de Damme » et donner 50 mesures dl'avoine à 52 patars l'une. Pourtant, le 14 comme il passait par Jalhay, outre un beau cadeau d'avoine, on lui avait offert « vin, pain blanc, gauffres, biscuits et autre provande ».
  Les troupes de Ruremonde demandèrent des rations le 18, et le même jour les Français en exigeaient pour Maestricht, « parce que les Espagnols en avait réclamé »
  Il était devenu impossible de rien livrer quand, à la veille de nouvelles violences, le Bre de Limbourg déjà cité pour sa générosité se porta de nouveau caution pour Jalhay et lui rendit encore d'autres services.
  Les Impériaux, traqués par les Français, n'avaient plus nul frein et requête fut adressée à leur général à Liège pour l'informer que ses troupes « sachant devoir quitter le Franchimont y commettent des exactions exorbitantes ».

  Le mois d'Août fut employé à faire et fournir des palissades à Limbourg.
  Le 1er Septembre arriva l'ordre de s'y rendre avec les quittances de tout ce que l'on avait livré à Maestricht, sous peine de subir l'exécution militaire.
  La forteresse, en changeant de maitre, ne faisait qu'augmenter ses prétentions. Le 9, l'intendant du Monceau demandait aux Bans 120 hommes pour travailler aux fortifications, 30 charrettes de foin et tous les chariots de Jalhay. Vu la disette de venaison, l'on fut tout heureux de pouvoir offrir au Gouverneur de Limbourg 5 corettes découvertes à Malmedy et payées 16 florins.
  Le 19, S. A. ordonna de transporter les grains dans les villes.
  
Le jeune Robert de Noirfalise, enlevé comme ôtage à Poleur où il demeurait, revint le 9 Octobre avec un ordre du Comte de Nassau demandant de Hasselt, au Ban 362 rations au lieu desquelles l'un de ses officiers, de Xhenemont, reçut 120 patagons à compte rien d'autre n'étant possible.

 En Novembre, les Impériaux établirent leurs quartiers d'hiver à Verviers où se trouvaient encore les blessés français du dit siège et auquel Jalhay continuait ses livraisons.
 Le 26, il lui fut demandé « 30 hommes et 2 officiers pour la grand’garde de Sart, contre les insultes que ce Ban pourrait craindre des Espagnols venant de Ruremonde et du château de Schleyden au comté de St-Vith.
  
A cet ordre, il fut représenté ce qui suit: « Jalhay se trouve le plus dangereusement exposé, étant éloigné de plus d'une lieue des autres endroits, posé sur la voye frontière de tous les abordemens, passages, et situé de toutes parts aux lisières des bois ». En outre, il n'a plus que 200 hommes de force, et le Ban de Sart beaucoup plus. Les partis de Ruremunde, Stevensweerdt et Schleyden sont déjà venus diverses fois insulter dans Jalhay, en y faisant plusieurs prisonniers non encore relaxés pour n'avoir pu payer la contribution leur imposée ».
 
Chateau de Reinhardstein (Waimes)
En même temps, on remit à Monsieur de Corswaren, beau-père de E. de Xhenemont, une somme à compte des rations pour Ruremonde. Et l'on supplia le Gouverneur et l'intendant de Limbourg, vu l'extrême pauvreté des habitants, de ne point les insulter puisqu'ils ont toujours été soumis.
  
Le 29, le marquis de Grana réclamait des contributions pour les Impériaux, les troupes de Limbourg se faisaient donner des guides pour se rendre « au château de Rennastene » (près Malmedy) et Ruremonde demandait un acompte de 500 florins.
  
En Décembre, le camp de Limbourg ayant obtenu du Marquisat encore 200 bêtes à cornes, Jalhay dut outre sa part leur livrer des gardiens. Et comme on avait besoin de planches au dit camp, des officiers se rendirent au bourg, le 15 Décembre, « afin de foncer les maisons pour s'en procurer ».
  
Le capitaine Lion menaça d'exécution militaire , mais E. de Xhenemont eut l'humanité d'avancer la somme exigée ou 200 patagons, tandis que Limbourg demandait de l'avoine et Grana de l'argent pour les hussards postés à Franchimont.

  Le Marquis de Créquy, étant de retour, on lui donna 30,5 stiers d'avoine à 2.5 fl. Le capitaine des sauvegardes du Roi et les officiers de la grand'garde établie sur le thier de Foyr reçurent de même des cadeaux en denrées.

 Enfin, l'on peut dire que cette année fut un comble d'exactions et contributions de tout genre.
  Nous y avons appliqué les détails principaux, afin de donner une idée de ce que le siège d'une ville apportait de maux pour son entourage. Cette prolixité nous permettra de retracer plus succinctement un autre événement de ce genre, comme on verra ci-après.

 L'on conçoit qu'après la tourmente qui venait de s'accomplir, la pénurie était complète.
  
La commune se trouvait obérée au point que personne ne prêtait plus que sur des garanties parfaites et enfin sur celles des possessions de la population toute entière, témoin entre beaucoup d'autres, l'acte qui va suivre, daté de 1676 et par lequel «  les habitants et les Magistrats de Jalhay engagent tous les biens, terres, bois, communes, aisances, revenus, cens, rentes de leur communauté, item, tous leur biens propres, ceux de leurs confrères et de tous et chacun leurs manants et inhabitants, cens et rentes, dettes, claim, crédits, actions, meubles et immeubles présents et futurs en tous lieux, pays, hauteurs et juridictions ; soient ils censaux, féodaux ou allodiaux et comme on les puisse nommer et appeler, tant conjointement que divisément, un pour l'autre et chacun pour le tout, sans bénéfice de division ou de discussion auxquelles il est expressément renoncé pour sus, ens et hors d'iceux prendre, cueillir et percevoir annuellement (telle somme) libre de toutes charges; taxes, tailles 20e denier, aides, claies, impôts, subsides et toutes autres impositions et exactions tant ordinaires qu'extraordinaires, nulles réservées ni exceptées, posées ou à imposer, pour quelles causes, raisons, sujets, prétextes ou nécessites de villes, Princes, Rois, Potentats, Etats, Magistrats et communautés que ce pourrait être ».
Les emprunts basés de la sorte allaient se succéder nombreux et la population, ainsi liée par des contrats hérissés de précautions, se trouva bientôt dans l'impossibilité de suffire au payement des intérêts. Alors elle fut soumise, par les créanciers, à de véritables tortures par saisies de personnes et de biens.

  Jalhay parut destiné à toutes les malchances, pendant que plusieurs de ses habitus gémissaient emprisonnés comme otages toujours près de Ruremonde, les rançons furent remises à un Mayeur de cette contrée. Il les conserva et porta l'indignité jusqu'à venir à Jalhay recevoir compliment de ses bons offices, 56 patagons de gratification et 120 pour adoucir les esprits par des présents qu'il garda aussi.

Puisque nous parlons de tels malandrins, oppresseurs éhontés de notre cher pays, il ne sera peut-être pas hors de propos de connaitre un peu de prose de l'un de ces chefs tristement renommés. Elle est de celui que l'on appela le capitaine des vaches parce qu'il semblait se faire une spécialité de l'enlèvement des bestiaux, la voici telle quelle :

 « Le soussigne Nicolas Lion, capitaine d’une compagnie de cavalerie libre pour le servis de Sa Majeste catholique cognoy et confes par cettre davoir resu des bourgumaite moder de bancq de Jalhay pays de Liege par leurs commis un present de la somme de deux cent et cinquante pattacon, en satisfaction des cours que jai faict avecq mes jens contre ceux du ban du dit Jalhay y estant comprin un de mes soldat teuuez, confessant en outre davoir encore resu des dits bourgumaite par leur commis la somme de trois cent patacons pour le convois de Monsceur Cheumont a conte des restante des raetion que le dit ban doit à Sa Majeste en foy de la verité jaie signe la presente et y pose mon chachet le 31e jour de Janvier 1676.     N. LION ».
  
L'année ainsi ouverte vit se succéder les ordres d'aller démolir les retranchements de Maestricht, le château de Franchimont. les fortifications de Verviers et de reconstruire celles de Limbourg. Et Jalhay vit disparaitre les siennes.
  
Les troupes « de Lovigny et d'Osnabruck hivernèrent ».

 Le 13 Mars, 500 soldats arrivaient d'Eupen pour incendier Jalhay, les supplications parvinrent à les détourner de ce projet ; leur chef accepta 25 florins et un chevreuil pour s'éloigner.  
  
Le surlendemain des dragons envahirent le Ban et mirent cruellement à mort le fils de Tiry Hubert.
  La population, épouvantée à la vue du supplice, s'enfuit à Spa avec ce qu'elle put emporter en emmenant les bestiaux, que des troupes allèrent lui arracher le mois suivant.
  En Avril, les archives furent conduites dans la même ville par ordre de la justice. Aussitôt le retour d'habitants, un capitaine posté à Limbourg vint avec une troupe nombreuse s'établir à Jalhay pour y passer les fêtes de Pâques. Dans l'espoir qu'il ne séjournerait pas trop, on lui exposa la pauvreté du moment, puis « une belle paire de gants » lui ayant été offerte, il répondit préférer de l'avoine.
  Malgré toutes les recherches, il ne fut possible d'y ajouter la moindre pièce de venaison.
  Alors les Magistrats écrivirent au Gouverneur de Ruremonde et à son intendant ces mots : « Nous avons fourni toutes les rations demandées, sauf que le capitaine Lion ayant satisfait pour nous quelque restance, il nous a été impossible jusques à présent de le désintéresser.
   « La course du parti du dit Lion a été payée, celle de votre garnison et les frais de nos prisonniers à Stevensweerdt comptés entre les mains du beau-père du sieur capitaine Lion. Nous espérons que vous aurez la bonté de ne pas nous insulter ni faire aucune limite en réfléchissant à nos misères ».     Après envoi de divers groupes de travailleurs vers les dites fortifications à démolir, le 21 Juin le capitaine Gilis de Sart avisait d'une demande, d'hommes pour Reickheim »
  Jalhay ne pouvant les fournir, fut exécuté et des bestiaux saisis. Alors tous ceux que l'on avait dépouillés par ce rapt, révoltés de cette nouvelle tyrannie, refusèrent absolument toute corvée sinon par argent. Ce qui leur fut accordé pour le moment tant l'ennemi tenait à leurs loyaux et laborieux services.
  En Juillet, Limbourg exigea « bêtes à cornes et 25 moutons à 6 florins ». Arrivés en cette ville, on les fait conduire vers Maestricht. En route des soldats français attaquent le convoi, enlèvent et tuent l'un des conducteurs : Ernoult de Soiron
  Une réquisition frappée le 26 ne trouva plus que deux bœufs au Ban et ce qui y restait de grain fut réfugié à Verviers ou caché.
  Des pionniers ayant été demandés pour le siège de Maestricht, on dut y envoyer tous les hommes disponibles avec assurance qu'il n'en serait laissé que seize à la fois. Mais on les retint tous en disant : « c'est pour le plus grand bien de Jalhay, vu la dissenterie qui y règne ».
  Le nombre de ces travailleurs appelés pour « rewaler les fortifications et lignes de Maestricht » était fixé pour Jalhay à 22, Surister 13, Charneux 13, Foyr 10 et Herbiester 5.
  Tous y furent retenus sept mois entiers.
  Le 10 de Juillet. les Français s'emparèrent du fils du meunier de Jalhay et encore du ,jeune de Noirfalise, de Polleur. Le 2 Décembre, les Espagnols firent de même avec le Bre Henri Pire et Toussaint Pousset de Jalhay.
  Ceux-ci, arrivés à Lambermont, parvinrent à faire savoir qu'on les entrainait à Stevensweerdt. Le second donna de suite 374 florins aux ravisseurs, mais sans nul effet.
  Le 14 Janvier l677, un autre fils du meunier N. Parotte et son oncle le Bre Jean-Pierre Parotte étaient saisis pour Stevensweerdt aussi. Le magistrat ne put être libéré qu'après 72 jours de captivité moyennant un acompte de 450 fl. Il était à peine de retour lorsque son collègue Pierre le Ponty fut saisi et incarcéré jusqu'à rançon qui ne fut possible qu'en Novembre.
  Dès le premier jour de l'année précédente, pour le siège de Maestricht on avait exigé cent charrettes, cinquante charretiers et des pionniers. Les véhicules ne furent rendus que le 24 Janvier de l'année qui nous occupe, mais en payant 100 patagons. Et l'on n'en continuait pas moins à réclamer « fagènes, (fascines) palissades et piquets ».
  Lion étant à Dolhain avec 2 à 300 cavaliers, tout en exigeant de Jalhay une contribution y fit enlever tous les bœufs pour celle que l'on devait payer à Ruremonde.
  Le lendemain Limbourg demanda dix chars à bœufs, trente charrées de foin, quarante de bois, fascines, palissades et des étages jusqu'à complément de cette livraison en outre de l'exécution militaire immédiate.
  Trois jours après, le Bre dut conduire cinquante hommes du Ban au bois de la Rochette pour y faire des palissades et fascines.
  La semaine suivante, on les obligea d'aller démolir les fortifications de St-Vith.
  Lion reparut à Jalhay avec ses troupes le jour de Pagnes et fit souscrire divers engagements à lui fournir.
  Le 20 Mai étaient enlevés, pour Stevensweerdt : Warny Bovy, Bertholet Tourment et Brolet.
  En Juillet, le Prince d'Orange exigeait des rations et en Août, le Baron de Paines, commandant des troupes brandebourgeoises, informait que s'il était fourni par le Ban des pionniers à d'autres armées que la sienne : « Jalhay sera pille et brulé ».
  Bientôt il remplit la première partie de ce programme en mettant d'abord à sac la maison de la Vve Hubert-Jacques Pichot, puis il enleva tout ce que le bourg possédait en « hardes, meubles et chevaux ».  Il joignit au butin les deux Bourgmestres et une contribution de 1500 patagons sur le Marquisat.
  Cependant de celle-ci, il voulut bien exempter Spa, « à condition que les autres Bans payassent la part de cette ville », ce qui fut fait.
  Le lendemain, il fallut envoyer des rations à Bruxelles et des pionniers à Charleroy. Le 21, le Bre de Spa fut député à Ruremonde vers de Xhenemont afin qu'il négociât avec le capitaine Lion le rachat des dits pionniers.
  En ce moment, une armée allemande sous le général Franckenberg, venait par Stavelot et Jalhay envoya vers elle pour traiter de ses prétentions. A ce moment, de Maestricht arrivait une lettre disant: « que le bourg se tienne sur ses gardes touchant le brulement de Vervy », (Verviers) ce qui n'était heureusement qu'une menace.
  Les Magistrats, exposés à tous les dangers, employèrent alors tout leur temps à solliciter la grâce de leurs collègues et administrés gémissant dans les cachots, ainsi que des atténuements de contributions en présence de la disette qui sévissait. Sans cesse ils se rendaient d'une ville à l'autre depuis Bruxelles, Namur et Cologne, d'où arrivaient des demandes d'argent, de denrées et d'hommes.
  Le 1er Août, on fournit des rations et des bestiaux à l'armée du Comte de Spaen, postée à Reickem. Le 2, une exécution militaire vida les étables de Jalhay en pillant dans plusieurs maisons « pour 400 rixdalers ». Bientôt après, le Duc de Brunswick l'apprenant saris doute, se fit donner même somme. En même temps il fallut 63 travailleurs pour la Rochette, d'autres pour Charleroy « conduire du gros bois de Bois-le-Dame à Maestricht et y joindre 40 chariots à mener du foin». L'on ne trouva que 10 de ces derniers.
  Des pionniers et des chariots aussi avaient été demandés le 15 Septembre, pour Louvain. Les troupes de cette ville ne voulaient les rendre, ce qui obligea les Bres d'aller à Ruremonde près de Lion, auquel les Bans faisaient remettre 200 patagons pour ravoir de mène les travailleurs envoyés à Charleroy.
  Pendant ces entrefaites, ce chef rapace envoyait vivre à Jalhay les « compagnies de Don Francesco Samalona, du Comte Brayd et du lieutenant-colonel comte de Staremberg ». 
  Des démarches furent faites le 28 pour écarter 1200 cavaliers désireux de s'y fixer aussi.
  Les Bans offrirent un cheval de prix « à M. Durman » le 16 Novembre, pour services rendus auprès des chefs de guerre à Reickeim ; immédiatement la partie adverse demanda de Fraipont « quantité de sacs d'avoine ». 
  La population s'insurgea enfin contre ces représailles des deux camps, se faisant servir alternativement comme s'ils se communiquaient la valeur des tributs livrés. Chaque habitant fit refus d'obéir à cette dernière injonction, mais la magistrature sachant trop bien quelles en seraient les suites, se hâta de chercher au Limbourg les céréales demandées.
  Ce moment était d'autant plus critique que le nombre d'habitants saisis comme prisonniers de guerre augmentait chaque jour au Franchimont. A leur sujet, les Magistrats des cinq Bans furent députés à Spa vers divers chefs, le 8 Janvier 1678. Après quoi les Bres de Verviers se rendirent près du Baron de Lancy envoyé de l'Empereur, dans l'espoir d’aplanir cette difficulté, laquelle persista, comme on va le voir par des exemples.
  Deux cents cavaliers munstériens, de ceux qui hivernaient à Verviers, se rendirent le 12 en exécution à Jalhay, imposant le Ban de manière à l'obliger d'envoyer une députation vers leur général, alors à Munsterbilsen. Il s'agissait de foin à fournir et introuvable. Des chevaux ayant été demandés aussi, le Bre le Ponty et des habitants se mirent en devoir de les conduire, le 24 Juillet.
Des soldats Espagnols l'ayant appris, ils allèrent se poster en tapinois sur le chemin entre Jalhay et Verviers. Ils attaquèrent le convoi et, dans une lutte sanglante prirent le dessus et emmenèrent quantité d'hommes et de chevaux. La population se mit à la poursuite de ces voleurs sans pouvoir tout délivrer. le Bre et plusieurs de ses concitoyens furent entraînés à Stevensweerdt
  La rançon demandée était introuvable et le Magistrat ne sut, pour adoucir le sort de ses compagnons d'infortune, que fournir des petits cadeaux pour leurs geôliers, entr'autres « des breslets et baies, (gâteaux) de Spa pour 6 fl ».   
  Une troupe allemande ayant encore infligé l'exécution militaire au Ban le 23 Août : Verviers et Stembert prirent les armes de leur franche volonté.  « Leurs milices s’unirent et mirent les oppresseurs en fuite. Jalhay offrit des rafraîchissements aux compagnies libératrices et huit florins Bbt au commandant de Vervy pour leur bonne diligence ».
  Aussitôt après, de Sittard où campait l'Électeur de Brandebourg, affluèrent des demandes de contributions. Le 28 les menaces obligèrent les Bans à se concerter a ce sujet.
  Des députations lui furent envoyées , les négociations n'aboutirent à fixer un chiffre possible et le 6 Septembre l'Électeur envoya son armée camper entre Hèvremont et Goé. Le lendemain elle attaquait Stembert – « où il y eut bataille rendant un chacun malheux » écrivit le Bre. Les Bans offrirent au chef 100 pistoles s'il partait de suite, et Jalhay lui envoya diverses fois ses notabilités. Le 9 elles s'y rendirent de nuit et le commandant leur demanda : « Apportez‑vous pour boire et manger »? A ces mots les envoyés s'en retournèrent de suite chercher ce qui leur restait de poulets et poules. Grâce à ce cadeau, ils obtinrent des sauvegardes au prix de 25 florins.
 En même temps des Munstériens, campés à Robertville, demandèrent leur part d'impôts, et l'Electeur susdit l'apprenant, il en réclama le double dès son retour à Sittard.
  Le 17, une grande troupe allemande passait par Surister, suivie le lendemain de français par Jalhay. De Maestricht on exigeait –«  d'y charier de gros arbres » mais le chanoine N. de Stembert sut parer à ce désir, par 170 patagons.
  Le colonel Berinsen, fixé à Spa et toujours bienveillant à l'égard du Ban, avisa le 29 que l'armée du Duc de Luxembourg allait passer. Les Bans se cotisèrent à l'instant pour un donatif à offrir au vainqueur de Fleurus. A la nouvelle de son approche, Jalhay regretta vivement l'absence du Bre le Ponty, dont le courage et les connaissances étaient d'un grand secours dans les moments difficiles. Mais il était encore sous les verrous. La commune ne parvenant à suffire à la délivrance de son chef, elle supplia qu'il lui fut au moins permis d'assister au passage de la dite armée, ce qui eut lieu. Elle ne foula qu'une partie du Ban. Le 13 elle disparaissait et le lendemain le Bre rentrait en sa prison de Stevensweerdt. Là commandait le Major E. de Xhenemont, auquel les espagnols demandèrent 300 patagons pour le compte de Jalhay, comme prix de la faveur précitée: le retour du Bourgmestre.
 Les passages d'armées rongeaient les pays ainsi que des nuées de sauterelles. Au mois d'Octobre, la misère était telle partout, qu'un grand nombre d'étrangers se réfugièrent au Ban. Ban qui bien à regret, fut obligé de les exclure pour laisser (à peine) le pain nécessaire à ses habitants.
  Cependant, pour contributions non livrées, .Jalhay était encore envahi, le Bre Simon Henri-Pierre enlevé et son collègue obligé de vaquer pendant quarante-six jours à Maestricht en qualité de commissaire des fourrages, cela aux frais du Ban, qui lui accorda 20 patars par jour.
  Le 23 Octobre, de Xhonemont voulut mille patagons pour libérer Jalhay d'un hivernage de cavalerie. Le Ban était dénué au point de ne plus pouvoir nourrir les soldats de passage, une troupe arrivée alors fut logée aux frais du Ban, à Verviers, Ensival et Theux.
  Berinsen mit encore ses soins à écarter les impériaux et à intervenir auprès du Duc de Luxembourg, afin de détourner aussi les français, les deux armées s'approchant à la fois. Jalhay, par reconnaissance, offrit 30 stiers d'avoine à ce négociateur obligeant.
  Le Bre Ponty étant de retour, le 7 Novembre, il fut envoyé avec son collègue vers le colonel de Montchevreux arrivé à Verviers, pour convenir des livraisons à lui faire ainsi qu'à d'autres français posés près de Stembert et à Aix. Jalhay s'acquitta de suite ce qui ne l'empêcha d'être logé de quatre compagnies du commandant Balrot qui reçut, en cadeau, 30 fl. pour tenir bon ordre. Puis vint le tour de traiter avec M. de Palastron parce que de Verviers il voulait envoyer de nouvelles troupes. Cependant le 26 du dit mois, il usa d'une certaine politesse envers le Ban en lui laissant le choix entre infanterie et cavalerie à loger.
  En Mars 1679, les molestations des Munstériens retranchés au château de Schleiden étant insupportables, des notabilités se rendirent près de la comtesse de la Marck qui possédait cette place de guerre, afin d'obtenir un repos de quinze jours –« dans les incursions », ce qu'elle fit et au-delà. On lui envoya un cadeau ainsi qu'aux R. P. Récollets de la dite localité, aussi négociateurs en cette obtention.
  A des capitaines français qui s'établirent à Jalhay de Février en Mai, il fallut compter par semaine 289 fl., un M. Bacon le voulut ainsi. Ces officiers se nommaient : de Loye, Ballot, Colbaut et Raimon. Au valet de ce dernier on donna 2 fl. 4 sous pour qu'il n'usât pas trop de bois à brûler et de chandelles, vu la pauvreté du jour. A ces troupes se joignit, le 6 Avril, le comte de la Fayette avec son parti. Et toute l'année fut remplie d'exécutions et de demandes : par la garnison française de Verviers, par Wegimont, où résidait l'électeur de Strasbourg, par les régiments Lionnois, Beauretour, de Villeroy, enfin par Stevensweerdt et Dinant (où le Ban conduisait les soldats malades et les bagages, dont celui de M. de la Foulade de la garnison de Wezel). 
  Le 6 Juin, Simon Henri-Pierre, de Jalhay, fut enlevé, dépouillé de ses pistolets, relâché, repris et libéré. Le 26 il reçut ordre, par les mêmes soldats, de tenir son cheval prêt pour huit heures, sous peine d'exaction,  à être étranglé et pendu. Même avis fut notifié à tous les possesseurs de chevaux au Ban.
  Le 16 Décembre, toutes les charrettes étaient occupées pour le départ de la garnison de Verviers, lorsqu'un parti espagnol investit Jalhay lequel ne pouvant donner que 40 fl., des otages furent pris et dirigés vers le Sart. Là, d'entre les prisonniers le sieur Servais le Massuy fut renvoyé avec obligation de se faire remplacer le lendemain par le fils de Henri Thiry. Ce jeune homme s'étant livré, à leur passage à Dolhain, il prit rang dans la masse de prisonniers enlevés sur tous les points des Bans par ces troupes malfaisantes.
  Le 30, le Bre alla les visiter à Stevensweerth et put leur faire cadeau  « d'une, tonne de bière pour la partie qui eut lieu a son arrivée ». Il fallut longtemps et de grands sacrifices pour voir libres tant d'infortunés, d'entre lesquels le jeune Henri Thiry qui, dès son retour, devait être à nouveau enlevé le 14 Août suivant.
Le Bre nota que pendant sa courte gestion, les événements l'avaient obligé d'écrire plus de mille lettres.
Un parti de français enleva aussi le Mayeur Jean des Champs et l'échevin Henri Massin. Conduits à l'Hôtel-de-Ville de Verviers, les soldats les contraignirent de signer un chirographe par lequel ils s'engageaient à payer une forte somme pour l'entretien du régiment Lionnois, alors en la dite ville. La commune de Jalhay déclara la promesse nulle et malgré les menaces et refusa net de livrer maille. Du reste toutes les ressources étaient épuisées, à preuve, cette même année le Bre Mathieu Pierre n'ayant su rien obtenir des habitants pour les tailles dues à l'Etat, faisait au Prince ce récit :
   « Les guerres continuant depuis huit années, les ruines ont été insupportables en ce pauvre quartier où les habitants ont subi les dernières misères :

  1° par les troupes de Chavagnac venu deux fois avec 2 à 3000 chevaux, par les brigades françaises, l'arrêt onze à douze jours de l'armée du Duc de Beurnonville, de même, par l'armée de S. M. très chrétienne l'espace de 18 à 20 jours et par celle de M. le comte de Rochefort. En passant en ce district, ils ont gaspillé les provisions internes et externes, pillé, démantelé les maisons, tué des hommes et fait divers actes de grande hostilité.

  2° Pris le bétail, commandé au marquisat de fournir 400 bêtes à cornes aux troupes à Liège, Limbourg, Maestricht et à l'armée du Duc de Beurnonville.

  3° Exigé des contributions immenses aux bureaux des Rois de France et d'Espagne, pour les impériaux, Brandebourgeois, Munstériens et autres; ce qui a fait contracter des obligations dont plusieurs générations ne verront pas la fin.
  La plupart des habitants ne vivent plus que de pain et d'eau, ils ont vendu toutes leurs substances, jusqu'à leurs propres habits et n'ont malgré cela laissé de souffrir beaucoup d'exécutions rigoureuses et prises d'hommes, qui sont restés plus d'un an en prison, avec enlèvement des meubles, bêtes et chevaux; ce qui leur cause une désolation générale ».
L'intendant de Maestricht continuait à exiger des impôts et le quartier d'hiver imposé an Ban fut tellement ruineux, qu'il semblait vouloir mettre le comble à la désolation. Jalhay seul y dépensa 100.000 fl. Bbt. A ce propos le Bre écrivit ces mots: « C'est miracle de voir la population se soutenir, et selon la supputation des Magistrats, les pertes subies par le Ban sont de la valeur » d'une tonne d'or.
  Lorsque les ambassadeurs et plénipotentiaires de l'Empereur Léopold et de Louis XIV eurent conclu la paix à Nimègue, le 5 Février 1070, chacun en avait manifesté sa joie par des actions de grâces. Malheureusement la France, par son ministre Louvois et de fallacieuses découvertes d'un avocat de Metz, prétendit aussitôt avoir des droits souverains sur de nombreuses provinces d'entre lesquelles était compris le Franchimont.
  Cet injuste désir s'étant maintenu, le Ban, pour prévenir de nouveaux accidents, avait réfugié ses bestiaux à Montjoie, où des français allèrent les saisir, en Avril 1680.
  Le 12 du même mois, par décret du parlement de Metz, les habitants des dits pays convoités furent sommés de se soumettre au Roi.
  L'indignation fut grande, mais le prétendant était alors tout puissant. Par lui le séquestre fut mis sur les communes en litige et les contributions exigées avec de déplorables sévérités. Témoin ce fait: dans la nuit du 26 Juin, une troupe arrivée à Verviers, envoyait au Bre de Jalhay « ordre de tenir tous les chevaulx à disposition, sans les débouter, ni cacher, à peine pour les possesseurs, d'être pendus et estranglés ».
  Déclaration fut faite, le 17 Octobre suivant que le Ban de Jalhay appartenait à la France sous prétexte qu'il avait fait l'allie du Comté de Chiny. Le sentiment patriotique, déjà douloureusement impressionné, mit tout en œuvre pour échapper à cette sujétion. En présence du refus de payer les tailles au Roi, ses troupes s'emparèrent de tous les biens communaux et les autorités furent soumises à un joug insupportable.
  Le 24 Décembre 1681, elles reçurent intimation, ainsi que les habitants, « d'aller à Metz rendre foi et hommage à Louis XIV. Ils y déléguèrent Toussaint Counet, de Surister, porteur d'une requête sollicitant en leur nom un sursis de trois mois, à obtenir, soit de la Chambre royale, soit du dit Parlement. Cela parce que la France voulant se faire payer les impôts comme pouvoir régnant. Le pays de Liège défendait de les livrer à peine de les reproduire. Partant de là beaucoup de gens s'autorisaient du conflit pour ne lâcher maille.
  Jalhay fit alors demander au Roi de pouvoir du moins lever des impôts sur soi, (c'est-à-dire les habitants,) afin de payer les créanciers et prévenir les exécutions. »
  Cette dispositon fut accueillie à condition d'en prouver l'emploi.
  Malheureusement la pression exercée par l'envahisseur pour se faire agréer en qualité de souverain devenait navrante. Les Etats de Liège se trouvaient dans l'impossibilité de protéger les communes, elles devaient, hélas! Succomber, pour la plupart, sous le poids des exactions. Aussi, le 2 Janvier 1682, le susdit délégué de Jalhay se vit obligé « de paraître â Metz », ainsi que l'on va voir par la teneur, in extenso, des pièces envoyées pour cette triste incorporation.

  Lettre de Louis XIV au Ban de Jalhay :

  « Nous par la grâce de Dieu Roy de France et de Navarre, au prévôt de Montmedy ou son lieutenant, substitut de notre Procureur général, Receveur des Domaines ou leurs commis salut, scavoir faisons à la relation de nos amés et feaux les commissaires de la chambre Royale par nous establie à Metz, que nos aurez les Magistrats, habitants et communauté du ban de Jalheau ont ce jourd'huy fait en notre dite chambre, en exécution de notre déclaration dit dix septième octobre 1680, par Toussaint Counet fondé procuration spéciale du quinzième de ce mois, les foy et hommages qu'ils estoient tenus nous rendre à raison des biens, droits, privilèges, exemptions et immunités qu'ils ont et possèdent dans la Comté de Chiny. Auxquelz foy, hommage et serment de fidélité ils ont estés receus comme il paroist par l'act cy attaché sous le contreseel de nostre Chancellerie, aux charges ordinaires.
  Sy Mandons et ordonnons a chacun et vous en droit soy comme a luy appartiendra que sy pour cause des dits foy et hommages nous faits ou autres empeschements les dits biens et droit sont ou estoient saisis et mis en nostre main, ou autrement empeschez vous mettiez ou fassiez mettre incontinent et sans délay par provision lesdits Magistrats, habitants et communauté eu plaine et entière jouissance des honneurs. droits, fruits, profits et revenus d'iceux comme ils ont jouy ci devant, pourveus que dans les quarante jours portez par l'ordonnance ils baillent en nostre dite chambre les avis et dénombrement en bonne forme, fassent et payent les autres devoirs et droits sy aucuns sont deus et qu'il n'y ait rien contre nos droits et domaine ou autres causes raisonnables d'empèchement, desquels en ce cas vous donnerez avis à notre procureur général.
  Donné à Metz en nostre dite chambre le vingt deuxième Janvier, l'an de grace mil six cent quatre vingt deux et de notre règne le trente neuffième.
  Signé : par la chambre : Lefebure, collationné puis y estoyent appendus deux seels de cirre jaune avec les trois fleurs de lys impressées sur chacun seel ».
  Un autre parchemin y attaché porte ce qui suit : 
  « Extrait des Registres de la chambre Royale.
     Ce jour les Magistrats, habitants et Communauté du ban de Jalheau, se sont présentés à la Chambre, en exécution de la déclaration du Roy du dix septième Octobre mil six cent quatre vingt, par Toussaint Counet fondé d'approuvation spéciale du quinzième de ce mois lequel, en la dite Chambre, précédé du greffier et du premier huissier, étant à genoux sur un carreau a fait entre les mains de Monsieur le premier Président les foy et hommages deus à sa Majesté, à raison des biens, droits, privilèges, exemptions et immunités qu'ils ont et possèdent dans le Comté de Chiny, Promis foy, loyauté et service à sa dite Majesté envers et contre tous et de se comporter comme bons et fidèls vassaux lequel sont tenus faire envers leur souverain Seigneur.
  Faict à Metz en la Chambre Royale le vingt deuxième Janvier mil six cent quatre vingt deux.
  Signé : FAGNIEY ».
  Même jour parut cette note :
  « Il est donné avis de la signification faite par la Chambre de Metz aux habitants du Comté de Chiny sur peine de la vie d'imposer ni lever aucun denier sans ordre exprès de S. M. ce qui a donné liberté à plusieurs habitants du Ban de Jalheau de refuser de payer les tailles imposées pour payement des rentes d'emprunts faits pour les guerres ».
On y ajouta ces mots :
  « Nous déclarons à tous ceux qu'il appartiendra que nous n'avons pas obtenu le dit arrêt pour le dit ban pourquoi nous consentons que les dites tailles faites sur le dit ban pour le payement des dettes dont il est chargé, soient levées à condition qu'aucune partie des dits deniers ne pourra être consacrée a autre voye qu'au payement des dits intérêts et subordonnement de capital des dites dettes.
  Fait à Metz, le 22 Janvier 1682.  
  RAUAUX. »

En présence des protestations du Prince, le Roi, pour prévenir toute interprétation en fait d'autorité, fit donner à Jalhay lecture de la sommation suivante, contre quiconque pourrait se dire Seigneur du Ban.

  « L'an 1682, le 26° jour de Janvier, en vertu de l'arrest du Conseil de l'Estat du Roy du 17° Septembre 1680 et des arrest de la Chambre royale establie en la ville de Metz le 16 Janvier et 13 Mars 1681, à la requeste de M. le Procureur général de la dite Chambre qui at esleuz son domicilie au dit Metz en son hotel scis dans la petite place, paroisse Sainct Simplice, je Gerard de Drolenval, huissier de la dite Chambre certifie mettre exprès transporté et de cheval au lieu de Jalhay, distant de la ville de Metz de quarante lieues, où estant et parlant aux srs Bourguemres Jaspar Leveaut, je lui aiet déclaré que faute et. par le pretendu Seigneur du dit lieu de Jalhay d'avoir satisfait à la déclaration de S. M. du 17 Octobre 1680 et en conséquence fait les foy et hommage, fourni ses aveux et dénombrement dans le temps porté par la dite déclaration, fait iceux publier et produit au greffe de la Chambre Royale les titres et pièces justificatives des dits dénombrements qu'en continuant les exploits de saisie et assignations précédentment faites pour les dites causes, j'aye au dit prétendu Seigneur, parlant comme dessus, donné assignation de comparoistre au mois par devant le Seigneur de la dite Chambre royale pour voir estre dit que faute de satisfaire aux dits devoirs déclarer la commise encourue de la dite terre et seigneurerie de Jalhay avec ses dépendances et que cependant défenses seront faites au dit prétendu Seigneur de Jalhay, à peine de la vie, attendu le refus qu'il fait de reconnaitre son souverain, de se dire ni qualifier Seigneur du dit lieu de Jalhay ny d'en percevoir les rente; ny revenus, faire exercer la justice à son nom et généralement faire :aucun acte de Seigneur, en conséquence de quoi j'ai assigné, parlant comme dessus, le maire et habitants du dit lieu dans le mesme délay d'un mois pour se voir tenir en défense de recognoistre le dit prétendu Seigneur de Jalhay pour Seigneur ny de lui payer et délivrer les droits et rentes, ordinaires dépendantes de la dite seigneurie, aux juges et officiers dicelle de le recognoistre n'y d'exercer la justice en son nom et aux Bourgres, Maire, Receveur et habitants entre les mains desquels les dites saisies  ont été ci-devant faites pour se voir condamner de délivrer entre les mains de Nicolas Verdavoine commissaire aux anchaistes (enquêtes) féodales de la dite chambre, demeurant à Metz, logé sur la petite place, paroisse St-Simplice, ou ceux qui seront par lui proposés à cette effect, toutes les rentes, revenus et effects dépendantes de la dite seigneurie de Jalhay et à faute de ce, qu'ils y seront constraints par toutes les voyes deyues et raisonnables, mesme par corps, comme dépositaires de bien de justice et pour le voir ainsy de ce et ordonné, je, parlant comme dessus leur ayet donné à tous assignations à comparoir au mois à la Chambre Royale, et afin qu'ils n'en ignorent je leur ayet laissé copie du présent exploit et des enchest y mentionnés les jours, mois et ans que dessus.

J'atteste la présente conforme à l'original, Gérard Drolenvaux premier huissier au Marquisat de Franchimont ».
  Sur ces entrefaites les armées en mouvement ne cessaient de fourrager.
L'année 1082 vit aussi enlever le Bre et le Mayeur, faute de pouvoir envoyer des pionniers à St Gilles lez-Liège, que les impériaux fortifiaient.
  Le 1er Janvier 1684 à 11 heures de nuit, la demeure du Bre Jean Paquay fut assaillie par des soldats proférant des menaces terribles contre tous les magistrats que le dit régent parvint à prévenir en s'échappant de sa maison.
  Les troupes surgissaient par tous les points, le Prince défendit de les recevoir, mais comment leur résister ?
  En Mars il y en eut grande affluence allant au camp de Limbourg.
  En Mai, le Prince de Chimay, quittant Luxembourg qu'avait emportée le Maréchal de Créquy, passait, s'en retournant à Diest avec la garnison vaincue.
  Le 12, les français acrivèrent « par tes prés de Dison (près de Jalhay) pour camper au pré Lemaître ».
  Le Maréchal de Créquy, avec les troupes du dit siège, traversa encore le bourg le 24 Mai: «  Ses bagages étaient menés par 333 charrettes et cette armée était très bien fournie de femmes » dit le Bre d'alors, en notant le fait.

  Pour le 27 Juillet était annoncé le passage du Marquis de Joyeuse désireux de camper à Limbourg. La veille il arrivait à Butchenbach. Le Bre Jean Pasqueau alla à sa rencontre afin de le détourner de Jalhay s'il était possible. Il dut attendre devant la porte près d'un feu jusqu'à minuit, avant d’être admis à l'audience Il y reçut quatre sauvegardes pour 50 patagons.      Force fut de subir le passage de ce chef de guerre, pour lequel, afin de le recevoir avec honneur,
  « On fit chercher à Vervier de la chair de mouton, du vin et autres délices, » ainsi que s'exprime un compte. Il partit le jour même allant occuper Hodimont et Ensival. Il rebroussa chemin, le 15 Aout et se rendit de nouveau à Jalhay pour 24 heures. Cette fois il conduisait 2 à 3000 hommes, femmes, enfants, 40 charrettes de blessés et 3500 chevaux. A leur départ toutes les provisions étaient épuisées.
  Le Prince espérant protéger ses sujets fit annoncer, le 18, qu'il avait ramené de Bonn une garde à cheval ; le lendemain Jalhay recevait pour sa part quatre de ces recrues.
cavaliers occupèrent le Franchimont, imposant Creppe, Winanplanche, Becco et Jevoumont de 300 rations et 15 muyds moitié avoine. » -
  Le 10 Septembre, ils enlevaient toutes les charrettes dans beaucoup de localités, exceptant de ce rapt Jalhay - parce que les soldats de Luxembourg lui avaient occasionné de grands frais.
  Le Marquis de Joyeuse ayant réoccupé le bourg en Septembre, les Bres lui offrirent « un présent »  pour l'ordre maintenu, et prièrent ce général  « d'avoir toujours pitié de leurs misères ».  Ils furent bien satisfaits de trouver pour les lui donner six gélinottes et de la venaison. Ce chef s'étant rendu avec quelques officiers à Léau, il fit demander cinq muids d'avoine et son armée resta six semaines encore à l'entour de Jalhay, où elle avait succédé aux espagnols. Les Bans n'en furent pas molestés par des violences, mais les frais occasionnés furents tels qu'aucune taille ne put titre payée à l'État, flans l'année.
  Le 27 Septembre le dit Marquis, ainsi qu'un grand nombre d'officiers parcouraient les Fagnes pour marquer les chemins. Ils firent demander à Jalhay trois guides à cheval, mais ce que l'on y comptait de montures était au loin, crainte de surprise. En compensation il fut livré tout ce que le Ban possédait en volaille et venaison. Quant aux truites, dont ces Messieurs paraissaient très friants, il n'en était plus sur les lieux, on n'en trouva qu'à Malmedy.
  Des chaleurs excessives avaient causé la stérilité du sol, de plus, une combustion spontanée des Fagnes, très intense, vint ajouter à l'effroi et aux douleurs du temps, en ruinant les forêts.
  Les résultats de la guerre, unis aux intempéries, amenèrent en 1685 une famine qui décima le pays et pendant laquelle on vit au Ban, même des bestiaux périr de faim.
  Notons aussi que le 14 Septembre les Etats de Liège y envoyèrent, pour la forme, des troupes afin d'avoir raison des hommages rendus jadis à Louis XIV. Elles campèrent au lieu dit el Clisor. Il fut aisément prouvé que l'on n'avait cédé qu'à la violence, à l'abandon; à la faim. L'estime du Prince fut rendue au Ban infortuné dont l'état était alors en tout semblable a celui que décrivait Ernest de Bavière lui-même en 1587, comme on a vu page 26.
 Aussi le Bre Mathieu Pierre, élu en 1687, trouva-t-il la situation des plus embarrassées encore. En présence de la justice sévissant contre les habitants pour les tailles arriérées, il fit cette déclaration touchante: Les médiocres et les pauvres sont réduits à un état déplorable tant par les tailles que pour les contributions de guerre et corvées que leur imposent, en grande anxiété et par force, les partis. Ils sont prêts à verser des larmes de sang si cela pouvait les soulager. Je prie les Magistrats d'user de discrétion envers ceux qui ne peuvent payer entièrement, et d'appliquer les préceptes. donnés au pied de l'autel par notre pasteur, en son exhortation nous faite à l'octave de la dédicace, afin d'attirer sur nos têtes les bénédictions plutôt que les malédictions.
  Le même demanda à la justice de décider « si les villages du Ban sont, ou membres à part ou un même corps avec lui, pour y répartir les pertes des pillages et accidents, aussi légitimes à l'un qu'à l'autre ».
  Il réclama aux Etats de Liège une indemnité 1° pour le logement des troupes françaises de M. Picholle lorsqu'elles logèrent à Jalhay avec infanterie et cavalerie pour aller brûler au Limbourg, 2° pour le passage des armées de France et de Luxembourg dont Jalhay fut, au Marquisat, seul et insupportablement chargé. Nous ne voyons si sa demande reçut un bon accueil; quant aux premières de ces troupes, semblables à des forcenés, elles commirent de grands désordres.
  Enfin lorsque Mathieu Pierre eut rempli son mandat avec énergie et talent, il inscrivit en sa remise de comptes ces mots: « Mon administration a été difficile, traversée des guerres et pénible jusqu’à être traîné par les cheveux ».
  Le 26 Septembre 1687, des bandes armées dépouillèrent encore le bourg de la plus grande partie des meubles et vêtements, il n'y fut laissé aucune couverture de lit. Aussi, le mandement somptuaire émis par S. A. imposant les vêtements de soie et les bijoux portés, n'y trouva rien à glaner.
  Le dénuement paraissait y avoir atteint sa dernière limite.
  Pour l'année 1688, nous ne rencontrons que cette seule note: «  Le 31 Décembre, il est fait inventaire des pillages et brulemens subis ».
  La guerre se ralluma le 17 Avril 1689, entre la France et les puissances alliées; trois jours après le Ban était côté à 1089 livres 1 sol, six deniers, sur les 100,000 imposées par M. Mathieu pour Louis XIV, sur le pays en-deçà de la Meuse. Ordre vint aussi de conduire de la paille à Bruxelles.
  Les villes de Stavelot et Malmedy furent complètement embrasées le 1er Octobre par les français, tout le Ban attendait sur les Fagnes l'ennemi qui, rassasié de destruction en ce moment, ne porta pas sa torche incendiaire au Ban. Mais les enlèvements de notabilités continuaient, Jalhay en subit et en vit passer souvent. Tel le convoi de prisonniers, du 22 Décembre même année, composé des officiers de considération civils et militaires du pays de Stavelot, entr'autres le Greffier de Salm et le Mayeur de Lierneux, tous conduits à Maestricht par le capitaine Le Jeune, de l'armée Brandebourgeoise.
  Au milieu de ces désordres, les magistrats se multipliaient et donnaient l'exemple du dévouement. Les Bres surtout, sans cesse sur la brèche, faisaient des efforts surhumains pour prévenir ou écarter les événements calamiteux.
  La position de ces administrateurs devenait on peut dire impossible. Ceux de Jalhay adressèrent requête aux Doyen et Chapitre pour que l'un de ces deux magistrats ou leur délégué reçut un sauf-conduit  « afin de pouvoir se rendre librement à Liège et circuler dans les rues pour les affaires de la commune, sans crainte d'être arrêté et mis en prison, par les créanciers ou des soldats ».
  Le 1er Avril 1690, le colonel Medacq, étant à Sart, menaçait de brûler Jalhay, les Bres y coururent, il les rassura et en reconnaissance ces magistrats offrirent à sa troupe quantité de bière, misse et hidromelle. » 
  Quelques jours après, le général Berenseaux, nommé par la ville de Cologne, enlevait les bestiaux du Ban et les Français postés à St-Vith éveillaient de grandes craintes; S. A., pour satisfaire ces étrangers, dut imposer la principauté de 50.000 écus.
  Ensuite se déroula, pendant toute l'année, une extrême variété d'exigences arrivant de tous les points.
  En retour du bon ordre que les Bres tâchaient de maintenir pendant la présence des armées, le premier soin des Brandebourgeois à leur passage du 23 Octobre, fut de briser la porte de la demeure de l'un de ces magistrats dévoués.
Le 13 Novembre, une exécution militaire avait eu lieu au sujet de fourrages; Jalhay n'ayant plus rien à donner les exécuteurs s'en allaient emmenant pour gage Bertholet-Pichot. Arrivés « à la maison de Gotte » (fond de Gotte ?) ils se ravisèrent sur le choix qu'ils avaient fait comme otage et le renvoyèrent en lui faisant promettre d'être remplacé, immédiatement, par le Bre Pierre Lange. Celui-ci se résigna pour ne pas laisser en défaut le libéré, il se rendit à destination et fut gardé à vue. Après huit jours d'incarcération, il demanda de pouvoir appeler ses collègues de Jalhay pour conférer des affaires de sa commune, ce qui lui fut refusé. Cependant son fils, charmant adolescent, étant parvenu à pénétrer jusqu'à lui, on vit se dérouler une scène attendrissante. L'enfant venait s'offrir en place et lieu de son père qui se trouva ballotté entre les devoirs de sa charge et la douleur de laisser sous les verroux cette tendre victime de l'amour filial. Cependant le devoir magistral l'emportant, il résolut de partir. Alors les transports de joie de l'enfant en voyant son père délivré furent si  touchants, et l'expression du père si émouvante, que les geôliers, saisis d'une compassion irrésistible, les rendirent libres tous les deux.
  Pendant l'hiver de 1690 et surtout en Janvier 1691 « Jalhay était comme enseveli sous une couche de neige et de glace » dit une lettre du temps.
  Le 20 Mars, les français menacèrent le pays de représailles pour le brûlement d'Aywaille et imposèrent de mille florins Jalhay bien qu'étranger au fait reproché. Le gardien des Récollets de Verviers arrangea au mieux cette affaire avec le général des demandeurs.
  Pour contenir leurs garnisons de Foirsé et de St Vith, Lambert de Fays, Seigneur d'Andrimont, fit un prêt au Ban qui se vit obligé aussi d'envoyer 400 fl. par mois à Luxembourg, et les Brandebourgeois hivernaient à Surister, sous le major Le Jeune. 
  On dut en outre satisfaire aux réquisitions de la garnison de Verviers, le Prince ayant désigné cette ville comme place de défense.
  Le 20 du mois d'Avril, une émotion très vive agita le Ban à la nouvelle que 4000 français s'avançaient, par Stavelot, avec des allures mystérieuses.
  La population, devenue pauvre jusqu'à un degré navrant, se massa à Jalhay autour des magistrats, tendant vers eux des mains suppliantes en disant: qu'allons nous devenir ? Les femmes, les enfants pleuraient, la plupart de faim. A cette vue, le Bre Pierre Lange, le Mayeur Jean des Champs et l'échevin Jean Parotte se lèvent, mus par une même pensée et sans pouvoir proférer une parole, font mine de s'éloigner. La foule étonnée et comme prête à les retenir, se demandait que vont-ils faire? Ayez confiance en nous, firent alors ces braves. De ce pas ils se portèrent vers le commandant des troupes signalées et lui dirent: “vous paraissez vouloir fouler un pays abimé de privations, acceptez-nous comme étages, pour tant de malheureux, jusqu'à ce qu'il plaise à Dieu de pouvoir nous libérer ».
  Comme si ce beau dévouement devait recevoir prompte récompense l'officier, rempli d'admiration, répondit: « Rassurez-vous, il ne sera fait nulle peine ni à vous ni aux vôtres, nous n'avancerons plus d'un pas, nous nous contenterons de protéger 200 cavaliers envoyés en exécution près d' Aix ».
  Cette année 1601 ne devait pas être plus favorable que la précédente, la France exiga 4400 fl. de contribution au lieu de 3985 des années précédentes; Luxembourg 135 malders d'avoine à 3 patagons l'un, 150 des mêmes pour « remplir ses magasins », plus 2600 écus et 738 rations à 25 patars.
  Le Bre Manguette dut avancer 18.000 fl. pour les comptes de l'année et le Bre des Champs 53.000 pour ceux arriérés des trois années antérieures.
  Malgré ces prêts et nombre d'autres, les exécutions militaires et de créanciers furent très cruelles.
 Les généraux Berinseaux et Wilbeck « ravagèrent les champs pour une valeur de 20.000 florins ». Le second était au service de Duc de Neubourg.
  Une lettre de l'époque cite, comme suit, l'effet des passages des troupes : « Ici à tout bout de champ ce ne sont que gros partis entrant dans les maisons. Ils s'y rafraichissent, logent et ces soldats enlèvent beaucoup de petits meubles et semblables choses ».
  Dans le même temps le Prince, espérant de rechef protéger son pays, organisait à Verviers une compagnie pour la défense des Bans. Jalhay y contribua pour sept hommes qui coûtèrent 1185 fl. de frais et d'engagement, plus 1300 fl. par trimestre pour l'entretien. A ces soldats on donna le nom d'élus, parce qu'un choix avait été fait d'entre les hommes présentés à cette fin. Outre 45 fl. au départ, Jalhay leur accorda 5 sous par jour en sus de la solde des Etats du pays. Celle-ci, ayant été interrompue faute de ressources, ils rentrèrent dans leurs foyers. Aussitôt l'on emprisonna le Bre jusqu'à réintégration des réfractaires.
  Lorsque, le 30 Mai, fut signalée l'approche de l'armée du Maréchal de Boufflers, presque tous les hommes valides du Ban, y compris le Bre, se trouvaient près du Prince retiré en la citadelle de Liège.
  Faute de plaideurs et d'assistants, la justice avait suspendu ses plaids au bourg et le nouvel arrivant y envoya ordre de lui livrer, au camp devant Liège, « fourrages, charrettes et 15 vaches, à peine d'être brûlé ». Jalhay n'avait alors plus nul foin et seulement quatre charrettes. Cette contribution fut douloureuse, chacun se doutant que ce chef venait bombarder la capitale.
  Bientôt de nouveaux ravages, rapts d'hommes et brutalités des soldats atteignirent encore des limites extrêmes. Des dragons et autre cavalerie française arrivés en exécution, pillèrent quantité de maisons et en brûlèrent quatre avec tout ce qu'elles contenaient. 
  En Juin le Ban hébergeait les soldats de Lunebourg, et la France demandait une seconde contribution. Heureusement la garnison de St-Vith remboursa une livraison de denrées et l'on put suffire pour ce moment. Souvent les Krènkiniers ou archers Liègeois, molestèrent aussi Jalhay par ordre de créanciers. Le contraire eut pourtant lieu à Liège le 3 Septembre 1691 : Le Bre Lange qui s'y trouvait fut assailli par plusieurs prêteurs qui voulaient l'entrainer en prison. Il fit appel et se mit sous la protection de gardes susdits, Gerardy et Boete, qui le dégagèrent et l'escortèrent jusqu'à son départ. L'avocat Poncelet de Liège, son cousin, avança 4000 fl. pour apaiser les poursuivants.
  En Décembre le Bre de Verviers, Lambert Frankinet, fit pareil prêt en présence d'exécutions opérées au bourg par les deux archers dont il vient d'être question.
  En Janvier 1602, le camp d'Embour se faisait servir des denrées.
  Le 3 Mai, le général T'Serclaes, Comte de Tilly, menaçait aussi, à cause de l'impossibilité de lui fournir des pionniers à Huy pour le Prince. Deux jours après, force fut de conduire vingt vaches au Marquis d'Harcourt à Malmedy. On y ajouta
par politesse onze stiers d'avoine, laquelle était très rare; aussi ce dit chef fit cadeau de la moitié au comte de Tessé.
  Le 12, il fallait donner à Octavio J. Nigrelli qui occupait Huy, 101 patagons. De ce point surgirent aussi bien des désagréments.
  Le Ban, quoiqu'exposé à voir commettre par les troupes bien des délits, aussi envers les passants non militaires, veillait autant que possible à leur répression. Le 26, un convoi de marchandises traversant la Fagne, fut attaqué et pillé par des soldats. Le Bre y courut, parvint à faire lâcher prise aux voleurs et mena le tout à Stembert pour le mettre à l'abri.   Malheureusement le lendemain une exécution militaire par les Français tourmenta pendant une semaine Jalhay qui, le jour de l'Ascension, dut régaler tous les oppresseurs du moment avec force bière et vin. Ils s'étaient campés sur le cimetière:
  A demande de onze chars à quatre chevaux, il fut constaté que le Ban ne possédait plus que quatre montures, qui furent livrées.
  On sait qu'ensuite des dévastations du Palatinat par les Français, l'Empereur et les Hollandais, ceux-ci occupant la Chartreuse, avaient, par leurs menaces de brûler Liège, obligé le Prince à déclarer la guerre à la France.
« Cet événement mit la communauté en combustion par les passages, logements d'armées et contributions excessives à la France, aux Brandebourgeois et autres puissances étrangères » De ce nouveau conftit, voici l'un des épisodes: deux lettres écrites par des témoins oculaires, l'une de Limbourg et l'autre de Jalhay, nous permettent de suivre la marche de cette aventure cruelle.
  Le 23 Juin, le Marquis du Crochet, commandant français entrait au bourg avec plusieurs compagnies d'infanterie. Peu après s'en étant allé avec 300 cavaliers et 200 fantassins au pays de Juliers, ils avaient surpris la ville de Geilenkirchen et l'ayant pillée et réduite en cendres, revenaient chargés d'un énorme butin. Ils reprenaient le chemin de Jalhay, lorsqu'arrivés à Limbourg, vers six heures du soir, le Marquis résolut d'y loger et le lendemain 20, à deux heures de relevée, ils reprenait sa marche. A cet instant arrivait sur Hauteheim, près de Dolhain, le comte de Ville, commandant des dragons de Neubourg, avec 500 de ses cavaliers « animés comme des lions. » Apercevant les pillards, il s'élance vers eux tout d'un trait. Ceux-ci s'éloignent en toute hâte, il les atteint au bois de Hévremont et, dans un choc formidable, les met en déroute complète. « Les assaillis abandonnent bagages, équipages, trompettes, tambours et quarante chevaux, entr'autres le beau cheval du Marquis.» Tous se dirigent immédiatement vers Jalhay, tour à tour poursuivis et arrêtés par les élans impétueux des dragons.
  La lutte se continue furieuse à travers le Ban tout ainsi qu'une trombe, en y ravageant les moissons. Cependant une troupe nombreuse de français se concentre derrière Herbiester, « un combat sanglant y est livré et la défaite du Crochet s'accomplit. Alors eut lieu une véritable chasse à l'homme »
pour en attraper encore parmi les buissons et les grains. -
  Pendant les péripéties de ce drame, les dragons pillèrent plusieurs maisons du Ban. Heureusement le Mayeur, Théodore Darimont, reconnut plusieurs de ses amis parmi les vainqueurs, et par ses exhortations prévint d'autres dégats.
« La victoire du Comte fut complète, cent français étaient morts et autant faits prisonniers, dont un Baron que l'on disait être du pays de Juliers. A l'un des officiers vaincus on coupa les deux bras ».
  La lutte étant terminée, à 7 heures du soir, de Ville s'en retourna loger à Dolhain et « ce même jour on enterra déjà quatre français au cimetière de Jalhay, dont un ramené de derrière Foyr ».
  En Juillet, parurent des troupes françaises, sous de Marsaut.
  Le 15 on s'aperçut que des compagnies étrangères engagées par le Prince pour la défense du pays se transformaient en bandes de voleurs et dévalisaient les passants. Le Bre de Jalhay, avisé au Bois de Breux, lorsqu'il portait le prix d'une contribution à Liège, leur échappa en rebroussant chemin.
  En Août, sa commune reçut les troupes allemandes de Henri de Baixmon, celles de Neubourg sous le général Wilbeck, celles de Munster, conduites par le brigadier Corfière, qui pour 200 fl., alla s'établir à Stembert, enfin celles du capitaine de Lorne. Celui-ci arrivé le 10, campa « dans la haye le pouille. Jalhay lui livra pain, bierre, brandevin, fromage et tabact ».
  Le 20, la France défendit « de payer l'impôt dit oeil du moulin au Prince, à peine d'exécution ».
  La misère sévissait cruellement, mais les religieuses Récollectines de Verviers l'adoucirent quelque peu en prêtant 2000 fl.
  Les alliés voulant empêcher les Français de s'emparer de Liège, les demandes de pionniers pour les travaux de la citadelle de cette ville et St-Gilles se succédaient rapidement; M. Jean Groulart, grand Mayeur de Maestricht et Seigneur de Surister, obtint de faire cesser cette seconde corvée.
  D'autre part les Français, campés à La Roche, imposaient des contributions, quand un autre M. Groulart, parent du susdit, qui habitait cette dite ville, s'interposa favorablement.
  Les créanciers malheureusement recommencèrent leurs razzias d'attelages du Ban sur les marchés. Les Brandebourgeois reparurent et Louis XIV demandait « 728 rations, en Représailles » de ce que ceux de Modave et de Foirsé ont fait sur le Comté de Chiny. « Pour ce nouveau prétexte d'impôts, Jalhay fut cotisé à 800 fl. » Il n'avait plus nul argent et peu auparavant les Bres avaient visité quarante personnes à Liège sans trouver un sou. Cette fois M. Simar Grandry de Fraipont, les sauva de l'exécution en prêtant la dite somme, que le Bre dut porter à Luxembourg. Lorsqu'il fut question de la rendre, en Décembre, les sentiers battus étaient si dangereux à parcourir avec du numéraire, que le Bre dut « prendre un guide pour marcher hors des chemins afin d'aller seulement à Fraipont ».
  Ce même mois, le Prince gratifia Jalhay de 400 fl. à cause des dépenses occasionnées par le passage des troupes des alliés.
  Le 25 Décembre, il fut demandé 55 hommes pour les travaux de la citadelle, que dirigeait un sieur Pascal Le Duc.
  L'année suivante 1693, d'énormes dégâts furent commis au Ban par le séjour entr'autres de 15.000 hommes de l'armée des alliés, conduits par les généraux Bérinseaux et Wilbeck.
  En Février, les Français y étaient si nombreux que « le Greffier en logeait 25 et leur servait une charrée de bois par jour. » Les provisions furent consommées au point qu'il fallut chercher hors du pays grains, fourrages, &c.
   Une pénurie extrême existait encore en 1694, alors que « des troupes, sous Heyden », exigèrent 300 stiers d'avoine. L'on n'en trouva point et les soldats s'éloignèrent moyennant 300 pistoles; Monsieur Guillaume Simonis, de Verviers, prêta cet 'argent.
  Si tous les habitants étaient solidaires pour les dettes, la commune, dès le retour de jours favorables, faisait de son mieux pour indemniser les plus appauvris d'abord. Pourtant il lui arriva de devoir attendre jusqu'à vingt années avant de pouvoir rien offrir aux molestés.
  Comment en aurait-il été autrement, en présence de cette multiplicité d'infortunes ?
  Le Marquis du Crochet, dont on a vu plus haut l'abaissement, reparut avec des troupes nouvelles le 26 Février; « ses officiers étaient entr'autres Montal, Baiar et Delauffe ». Ils conduisaient 120 hommes et choisirent cinq maisons seulement pour les loger ; en même temps, leurs compatriotes du régiment Lionnois, arrivèrent enlever le mayeur des Champs et Hi Massin, échevin.
  Sept cents Brandebourgeois se postèrent dans les bois de la Fagne le 1er Mars et le 21 ordre arriva, de Liège, d'arrêter et d'y conduire tout partisan non muni de bons passeports. En réponse les susdits allèrent camper à Jupille.
  La famine étant aux portes, une députation fut envoyée à Aix, le 2 Avril, vers Hernandès, lieutenant-gouverneur de Limbourg, afin de pouvoir acheter du grain dans son duché, « attendu la fermeté du pays et la grande nécessité du pauvre peuple ».
  Sur ce, les Brandebourgeois, fixés à Jupille, ordonnèrent à Jalhay « d'y livrer 1600 rations, à peine d'être brûlés, » mais des troupes Liègeoises arrivèrent au Ban pour le protéger. Aussitôt leur départ, les français s'y rendirent en exécution, le 29, et y furent suivis, le 2 Mai, par les troupes de Hernandès sous le capitaine Malkotte, remplacées le 4 par celles de S. A. conduites par le capitaine de la Croix.
  Alors on se mit en quête de venaison pour deux protecteurs Messieurs de Malonne qui de Liège avait su exempter Jalhay du foin à livrer à Jupille, et au célèbre. Menno de Cohorn qui avait empêché d'envoyer des charrettes exigées par le Conseil de guerre pour Maestricht. (Les coqs de bruyère offerts en retour, furent achetés. 7 fl. 2 sous pièce.)
  Le 23 Juin le bourg fut littéralement rempli de soldats venus de nuit  suivis successivement de ceux des capitaines Legrand, de Marsala et de Lahaye.
  Les Etats de Liège, ayant menacé Jalhay d'une exécution s'il ne s'acquittait d'impôts et de la livraison de travailleurs pour la citadelle, y envoyèrent des soldats. Ceux-ci furent enveloppés par les ennemis et emmenés prisonniers.
  En Septembre, Jalhay revit les soldats de Montal, le 9, ils s'établirent sur le cimetière. Ceux de Marsaut enlevèrent le Bre et le Mayeur. Alors le capitaine de Lorne, avec sa compagnie, quittant son camp de Malmedy, arriva jusqu'à Bolinpont où les magistrats lui représentèrent l'impossibilité de livrer nul aliment, et moyennant 67 pistoles, il consentit à aller loger à Goé.
  Le 11 Octobre, « les troupes du Baron Hokerix campèrent à Jalhay, ravagèrent toutes les avoines » et un convoi de foin exigé par Liège fut saisi à Fraipont par les français can tonnés sur ce point; ils y donnèrent souvent lieu à des faits semblables envers tout le Franchimont.
  Le 1er Janvier 1691, il fallut livrer « une charrée d'avoine à Aix pour Hernandès ».
  Le 20 Avril, la commune ne pouvant plus rien donner aux prêteurs, ils s'emparèrent de Joseph Nizet, de Jalhay, qui fut emprisonné à Liège. Ce même jour le Ban remettait comme côte part 15 fl. 15 patars, pour un cheval offert par le marquisat au Commissaire du camp de Boufflers.
  La désolation se présenta poignante encore par le fait que voici:
  Le 28 Mai, le colonel Halansy, des troupes du marquis d'Harcourt, toujours campées à Malmedy, fit irruption sur le Ban avec cent cinquante cavaliers; un Commissaire de guerre du Roi les accompagnait. Par une course rapide, ils traversèrent Herbiester, Jalhay et Charneux, chassant devant eux « toutes bestes à cornes qu'ils rencontraient et dont le nombre s'éleva à deux cents ». Le tout étant rassemblé, ils
dirent à la population accourue qu'ils allaient « faire désordre si on s'opposait à cet enlèvement fait pour l'armée de Louis XIV. » A ce moment un avis officieux apprenait que le Maréchal de Boufflers faisait demander au Marquisat un convoi de trois cents tètes de bétail.
  Le Magistrat se hâta de faire observer aux assaillants que son Ban ne pouvait être imposé plus que les autres. Nonobstant la razzia s'accomplit sous prétexte que l'ordre signé du Maréchal n'était pas présent. Alors, profitant de ce que le bourg était sans défense et aussi pour inspirer la terreur, ils pillèrent trois maisons, emportant meubles, linge et vêtements.
  Immédiatement après ces méfaits accomplis, ils allèrent à Sart, pour y ravir tout d'un trait les troupeaux aussi. Déjà ils avaient forcé les habitants à les rassembler, lorsque l'ordre signé de Boufflers y arriva. Cette contribution prit donc un autre chemin, tandis que la dépouille de Jalhay était chassée vers Malmedy.
  Le Bre, dont on n'avait pas seulement pris les vaches et boeufs, mais aussi le cheval, s'imagina de faire contre mauvaise fortune bon cœur et d'opposer la ruse à la violence. Ayant suivi le troupeau bous prétexte de le guider aisément par des chemins à lui connus, à chaque sentier de la forêt qu'il savait être habituel à certains groupes de bestiaux, il trouvait moyen de les y chasser, les dérobant ainsi à la vue des soldats sans être soupçonné. Un bou nombre échappèrent donc avant d'être arrivés au moulin de Sart, surtout par la Heyd de Gospinal.
  Ce Bre dévoué atteignit Malmedy tellement exténué par ses courses dans toutes les directions, et si incapable de marcher que, par commisération, son cheval lui fut rendu.
  Néanmoins, il resta trois jours encore au milieu des ennemis, « payant à boire aux gardiens jusqu'à ce qu'il eût perdu tout espoir de rien récupérer pour son Ban ».  Mais pendant son équipée, voici l'un des incidents dont il fut témoin :
  De deux familles de Jalhay, très éprouvées par la guerre, celle de Jaspar Le Moine ne possédait plus qu'un boeuf, et la Ve Simon Henri Pierre une vache pour tout avoir au moment du rapt précité. Le dit Jaspar et Henri fils de la Ve, absents lorsqu'il s'était accompli, reviennent pour être témoins du désespoir général. Aussitôt ils s'élancent à la poursuite des spoliateurs, traversent comme un trait les troupes surprises de leur air résolu et atteignent le troupeau à Malmedy. Sans hésiter, ils reprennent leur bien et retournent, aussi rapidement qu'ils étaient partis, à travers les bataillons étonnés de cette audace à succès.
  Aussitôt après ces faits, le Maréchal de Boufflers exigea du Ban, avec dureté, son contingent des trois cents bestiaux demandés au Marquisat, le fixa à septante tètes de gros bétail, qu'il fallut conduire à son camp de Ciney. Il s'en perdit trente et une avant d'arriver à destination et le demandeur contraignit de les remplacer immédiatement. La cour de Justice prit l'affaire à coeur, réclama vivement, attestant que « parmi le premier convoi étaient quantité de beaux boeufs et belles vaches représentant une valeur considérable ». Il fut répondu par le billet suivant:
  « Je ne doute que l'on en tienne compte pour d'autres contributions, faites savoir a ceux de Jalhay qu'ils en retireront un bien de ce qu'on leur a pris, soit de Mr de Marie, intendant de l'armée de M. de Boufflers, ou du commissaire du bureau qui était avec le détachement qui est allé les prendre.
       MATHIEU,
« Intendant général de S. M. à Luxembourg. »

  Mais Jalhay ne reçut que de nouveaux ordres de fournir.
  Les troupes des alliés occupaient le pays en donnant lieu à des vexations étranges, en voici un exemple :
  Le 25 Juillet suivant, le Bre Gilles Henkinet, appelé au camp de Namur, s'y rendait pour traiter de contributions réclamées, lorsqu'il fut arrèté et emprisonné au palais de Liège où les gardes l'obligèrent à leur payer à boire; quelques-moments après ils fut procédé de même et à pareille fin envers le Greffier de Jalhay, C.-D. Schick, que l'on était allé prendre à l'hôtel du Champion, aussi à Liège.
  Les armées d'occupation avaient introduit toute licence, surtout pendant l'interrègne de Louis d'Elderen à Joseph Clément de Bavière, c'est-à-dire du ter Février 1694 au 18 Septembre suivant.
  Et le Conseil de guerre que ces étrangers établirent pour exiger les taxes et impositions de l'Elat, fit supporter d'âpres rigueurs.
  Des demandes de denrèes pour le camp de Huy, le 13 Septembre, prouvèrent que le Ban était dénudé complètement de foin et d'avoine.
  Le surlendemain des soldats arrivèrent opérer des visites pour s'emparer de tout ce que le Ban possédait en beurre et fremages « qu'ils emportèrent dans leurs musettes ». 
  La disette de toutes choses, fit enlever encore Bre et Mayeur ne pouvant plus rien donner, le 10 octobre cinq jours après leurs confrères allèrent demander répit aux prétentions des Brandehourgois arrivés à Aywaille. Ils répondirent en enlevant les bestiaux, le 21, et envahirent le Ban le 26. Pour d'autres soldats venus le 29 “ on ne put offrir à leur receveur que quelques truites et un levreau vivant ».
  En Novembre les exécutions continuant à sévir, pour l'absence de fourrage, on glana sur les Fagnes jusqu'aux moindres brins; ils n'étaient pas trop bons, écrivait le Bre, mais je donnai 2 fl. 4 sous, 15 liards au maréchal Carnis pour en avoir reçu.
  Le lendemain nouvelle exécution se présenta au sujet de pareille denrée à conduire à Liège. On s'y rendit avec ce qui restait, mais la Meuse étant trop haute il fallut porter ces foins de Pexheu rue à l'Académie.
  Six jours après, pour même local, force fut encore d'en trouver, le Bre l'y conduisit, le 10. « Arrivé à Fraipont, il paya de la bierre aux bateliers pour être expédié le premier vu le nombre de communautés qui attendaient pareil service ».
  Le 19 reparurent les espagnols, le 22 les troupes allemandes passaient par Foyr sous le général Heyden et l'intendant de Margasse. Le 23 le Bre et Jean Parotte étaient arrêtés à
pur cinq jours. Ils s'en retournaient lorsqu'en passant par Verviers ils virent opérer, au marché, la saisie des attelages Jalhay. Le Bre s'offrit aussitôt comme ôtage pour leur libèration et le même jour, à nouvelle demande de foin sans résultat possible, plusieurs habitants furent emmenés.
  Des arrestations et exécutions eurent lieu aussi, les 5 et 6 Décembre; le 15, Jalhay reçut 300 hommes par une pénurie de toutes victuailles, et l'on ne sut réunir qua 24 f1. pour offrir aux trois capitaines. Le lendemain – « Surister était loin d'être assez grand pour les troupes dont on le chargea ».
  Le 17, un partisan hollandais, Coppé, y arrivait avec sa bande armée, demandant à avoir de suite de la viande, sinon qu'il ferait tuer lui-même les bestiaux.
  A cette prétention inattendue, un grand désordre se produisit entre les soldats qui faisaient mine de s'emparer des boeufs, et les habitants s'élançant pour les protéger.
  La lutte s'engagea terrible, à l'instant de nombreuses victimes jonchèrent le sol, mais l'énergie des habitants l'emporta. Les soldats, obligés à la retraite, furent poursuivis et « dans leur fuite tuèrent le fils Jouette ».  Entr'autres prisonniers, ils parvinrent à entraîner le capitaine de Jalhay, Gillet Jaspar et l'un des échevins, accourus les premiers à l'appel de secours et enveloppés aussitôt.
  Heureusement échange fut possible, ceux de Surister ayant retenu plusieurs des assaillants. L'un deux conduit à Jalhay, y mourut bientôt de ses blessures.
  Les magistrats portèrent plainte à Toppe, commandant de Maestricht, d'où étaient venus les dits agresseurs, mais ce fut en vain; les scènes de ce genre étaient alors trop habituelles aux chefs de bandes.
  Ordre arriva d'envoyer des pionniers aux fortifications de Grivegnée le 18. Le Bre, l'échevin Laoureux et le capitaine de Jalhay, Thomas de Vinamont, furent arrêtés sur le chemin de Liège, le. 26, et incarcérés pour onze jours à cause de rations arriérées.

  En même temps on imposait au Ban une réquisition de pionniers pour Huy et Liège, ainsi qu'une livraison de 325 mesures d'avoine. Enfin pour terminer le mois, il fallut envoyer foin et avoine, à Limbourg, pour les corps armés de Heyden et Margasse, qui occupaient cette dite ville et Baelen.
Le premier Janvier 1695, le susdit Coppé avec un grand nombre d'hommes, osa reparaître à Jalhay pour y loger et tirer argent. Le 7, deux cents soldats de même arme les y rejoignirent; le 11 de nouveaux venus enlevèrent Henri Massin et le fils du capitaine. Celui-ci, rassemblant tout ce qui lui restait, courut délivrer son enfant et l'autre prisonnier fut ruiné par sa rançon, pourtant il n'en était pas au terme de ses épreuves.
  Aussitôt libéré, des troupes nouvelles se présentèrent en exécution, le 16 Février, le saisirent à leur tour et avec les plus affreuses menaces le sommèrent de s'exécuter de même qu'avec leurs devanciers.
  Cet infortuné, à bout de ressources et de protestations, forcé de présenter une valeur quelconque à ces spoliateurs impitoyables, alla prendre son fils encore bien jeune et le leur présenta en disant: «  voilà mon seul et unique bien ». Ils emmenèrent l'enfant et avec lui Henri Darimont, jusqu'à payement de la somme fixée.
  
La commune aux abois fit exposer au plus offrant l'impôt dit oeil du moulin afin de payer les redevances à l'Etat et aux créanciers. Cela ne suffisant, le tocsin assembla les habitants pour contracter un nouvel emprunt; à l'instant M. Lambert Franquinet, de Verviers, ému de compassion, offrit 4000 fl. en prêt, pour écarter des violences nouvelles.
  
Le Prince voyant se consommer la ruine de ses Etats, faisait des efforts pour repousser les ennemis et par contre exigeait des impôts fort lourds pour ce temps de détresse. Les communes étaient très en retard de payement et les menues venant du pays même se mêlaient à celles des étrangers.
  Cette situation déplorable obligea les Bres de Jalhay de faire à leur tour, les 12 et 13 du mois qui nous occupe, une exécution contre leurs concitoyens n'ayant pas su payer les tailles, et dont les bestiaux furent mis en fourrière.
  Malgré cette rigueur, l’un des Bres fut arreté à Liège le 4 Février suivant par des créanciers, enfermé pour vingt jours en la maison de l'avocat Poncelet, rue du Pot d'or, et gardé par le lieutenant Thomas et Steck.
  Libéré en vertu d'un suspens d'exécution accordé par le Prince pour tout le Marquisat, le même Bre fut encore appréhendé bientôt après pour sept jours, avec tous tes collègues du Franchimont, pour rations non livrées aux ennemis insatiables.
  Le 2 Avril, des Brandebourgeois, en grand nombre, occupaient Surister. Jean Manguette et Léonard Dreis, tous deux de Jalhay, devinrent à leur tour la proie de soudarts, le 6 Avril.
  Le 23, la commune envoyait de toutes parts des députations pour solliciter des emprunts et quatre journées de recherches assidues ne fournirent que 3.400 fl.
  Le 5 Mai, des capitaines français inventoriaient tous les fourrages du Ban; dans l'espoir qu'il en laisseraient pour le peu de bestiaux restant, le Bre ne put leur offrir, comme cadeau, qu'un seul patagon. Le Mayeur crut devoir profiter de ce moment pour présenter requête à ces officiers, afin que Jalhay récupèrat quelqu'indemnité pour les troupeaux enlevés par les leurs.     Pour toute réponse, ce magistrat fut saisi et conduit à Luxembourg, où il resta trente-quatre jours sous les verroux.
  On peut dire qu'à cette époque la principauté de Liège subissait les horreurs d'une invasion multiple.
  Au mois de Juin l'on ne faisait par tout le Ban pain et bière que pour les troupes espagnoles arrivées à Limbourg. Tout l'argent que l'on pouvait recueillir par le travail et l'emprunt servait aux rations ordonnées « par M. Mathieu » l'intendant précité, ainsi qu'il désintéresser les habitants d'Oneux. Ceux-ci avaient tenu des troupes désignées pour Jalhay incapable, à leur arrivée, de les nourrir.
   La population diminuait de jour en jour, par les luttes, le désespoir et la misère, lorsqu'il fut demandé au Marquisat 640 pionniers pour le siége de Namur, d'où les alliés allaient déloger de Boufflers; comme premier contingent, le bourg en fournit vingt, un second suivit et aux officiers venus pour le prendre, le Bre ne sut offrir que « du tabac pour dix patars afin que ses concitoyens fussent traités doucement ».  C'était avec une peine extrême que l'on décidait les habitants à se rendre aux dits travaux, d'où les demandes d'hommes arrivaient chaque jour.
  La difficulté d'en fournir produisit des scènes pénibles au Franchimont.
  Le 1er Juillet, une cavalerie s'étant emparée de tous les bestiaux de Theux s'élancait vers Jalhay à même fin, quand les priêres du Bre la firent dévier par Hévremont.
  Le 13, le jeune Jaspar Tourment, de Jalhay y apporta, de Namur, une lettre du colonel Rambach pour un nouvel envoi d'hommes. Au même moment arrivait l'ordre de fuir avec le bétail, la cavalerie française quittant Malmedy pour le bourg. Le lendemain l'exécution militaire, à cause des pionniers, désolait le Ban dont tous les hommes valides desservaient les armées. On s'empressa de charger Rambach de fournir des hommes, au compte de Jalhay, pour le poste nouveau; ce qui n'empêcha point de voir le Ban dépouillé de toutes ses victuailles, comme punition de retard, et son Mayeur enlevé le 16 pour 21 jours.
  Pendant tout ce mois, des soldats ne cessèrent de passer en volant tout ce qu'ils trouvaient à leur convenance.
  Le 2 Novembre fut pratiqué un nouveau mode d'exécution militaire, laquelle eut lieu sur les biens d'un seul, qui fut l'échevin Pierre Lemaitre, faute d'envoi de pionniers à Huy.
  L'année se termina par deux combats qui eurent pour théâtre Jalhay même, les 2 et 29 Novembre. Les antagonistes étaient des troupes françaises et un partisan nommé Montal. « Durant la mêlée on devait leur tirer à boire » écrivait le Bre Les français y furent vaincus.
  En même temps trois habitants de Lambermont coururent de nuit au bourg prévenir la magistrature que Coppé arrivé dans leur village « menaçait fort Jalhay ». Ces braves gens reçurent cinq escalins pour cet avis.
  Le Bre Gilles Henkinet, le Mayeur Thiry Darimont, l'échevin Henri Massin et le fils du capitaine Thomas de Vinamont furent enlevés ensemble le 12 Janvier 1696 et « enfermés en la maison Latour à Liège ».
  En présence d'une imposition nouvelle de 1.000 stiers d'avoine sur le Marquisat, Jalhay dut demander grâce. En cette extrémité, le Magistrat décida de faire contribuer aux impôts tous les décimateurs.
  Plusieurs troupes parcouraient le Ban pour obtenir de l'argent, il n'en était plus et riant pressait pour avoir celui des tailles.
Les Bres ne pouvant guère en obtenir, mirent arrêt sur les bestiaux des récalcitrants.
  Le 2 Septembre, l'impossibilité de répondre à une demande de fourrages, fit enlever encore Henri Massin et Henri Thiry, fils, par ordre du Conseil de guerre. Ils furent emprisonnés au palais à Liège, pendant que l'exécution était lancée sur le Ban. Pour comble, il fut parcouru en Février par 300 hommes d'armes conduits par un sieur l'Amiral et le 10, on entrainait encore le Mayeur en prison, à Liège.
  Une députation y fut envoyée le 22, afin de démontrer l'impossibilité de fournir de l'avoine au magasin de l'Académie. Mais le conseil de guerre, continuant ses duretés, frappa Jalhay d'exécution, le 4 Mars, enleva le Bre pendant que ses bestiaux étaient mis en fourrière, le retint pendant six jours en la maison Poncelet et ne le libéra que sous caution donnée par la femme de l'incarcéré.
  Le 27 vit une exécution nouvelle.
  Du 2 au 16 Avril, le Ban se trouva rempli de troupes « dont étaient celles de De Noel, lesquelles traversèrent six fois la Fagne ». Ordre vint de « fournir argent à la Compagnie de Fraikin ».
  Le 9 se succédèrent tout d'un trait, demande de rations, exécution militaire et arrestation du Bre, qui trouva enfin quelques centaines de florins à 2 % par mois.
  Le Vendredi-Saint ne trouva pas grâce pour une exécution infligée par des troupes étrangères. « Grande vergogne pour un tel jour »! s'écria le Bre, qui dans ses comptes ajouta :
« Et j'ai dû donner au sergent exécuteur 30 patars et un fléon (flan) de 10 ». Quatre jours après Hernandès ordonnait de lui mener de l'avoine à Aix; « on n'en trouva que huit stiers dont quatre furent mêlés d'orge à 30 sous l'un ».
  Le 12 Mai Jalhay vit venir des troupes françaises, conduites par le capitaine Gaillard disant: qu'il voulait « être servi sans parler ». Elles occupèrent le cimetière.
  Le même jour l'armée des Brandebourgeois et des Hessois passait par Bailoux et Henri-Chapelle.
  Le 22, Gaillard céda le terrain aux Brandebourgeois, qui voulurent « être servis de vin », il n'en était plus goutte au Ban, Verviers en fournit.
  Le lendemain la journée fut remplie par « plusieurs passages de partis très-incommodes vu la quantité de viande et de vin exigée ». Ensuite vinrent « les volontaires d'Aix, à qui on distribua du vin et des tisselets ».
  Au début de Juillet passèrent des troupes Hollandaises et le 8 des Français butinant tous les chevaux. « Ils en demandèrent deux en sus », puis un gros parti du capitaine De Lorne reparut deux fois. Le 29, le fils du Mayeur Goffin (?) « arrivait au Ban avec gros monde et menaces, parce qu'on avait foulé ses terres ». On s'empressa de tuer un boeuf pour ses gens. Le Bre Henkinet nota l'incident que voici: «Le 1er Août, un parti de soldats sont venus en ma maison, où ils ont fricassé, bu, mangé, rompu le pot, puis je me suis mis en route quatre jours pour appaiser les créanciers. »
  Le reste du mois fut affligé de diverses foules; celle du 20 était du fils de Gaillard précité, disant vouloir « quantité de jambons, viande, brandevin, bierre et argent ». 
  Des bestiaux du Bre furent saisis le 2 Octobre, « le 15 arrivèrent les partis de Roquelaure, de Geuillard et Champagne »,  et le 28 vit une «exécution par trois huissiers ». 
  Surister fut envahi le 19 Novembre par un nombre considérable de français dont une partie se rendit à Jalhay dans l'intention de saisir le curé et l'entrainer à Luxembourg pour le rançonner. Mais la population lui fit tel rempart qu'il ne tomba dans leurs mains. Alors la fureur des assaillants se porta contre le presbytère qu'ils tentèrent d'incendier; grâce aux mêmes secours, leurs efforts furent vains.
  Des vagabonds, voyant que toutes les infamies étaient tolèrées par les gouvernants envahissseurs, se réunirent par bandes nombreuses, se revêtirent d'habits militaires et prenant les allures de troupes régulières, commirent nombre d'iniquités. Le Ban devait en être aussi victime.
  En Novembre 1696, un grand nombre de ces brigands, portant les costumes des soldats de Neubourg et de Munster, se jettèrent dans Jalhay. Par leurs atrocités, ils obligèrent les habitants à prendre la fuite avec ce qu'ils pouvaient emporter de hardes et de bétail. Les intrus en provoquant cet abandon manifestaient le désir de s'établir dans le bourg, mais, aussitôt qu'ils virent sur la Fagne les malheureux expulsés chargés de tout ce qu'ils possédaient, ils les poursuivirent, les dépouillèrent entièrement, puis s'évadèrent.
  La population rentra plus ruinée que jamais, dans les demeures dégradées par ces scélérats.
  Ce n'était pas tout, peu de temps après, la compagnie du Ban étant absente, quatre soldats paraissent devant la maison du Mayeur Pottier, où s'étaient réunis « pour des rendages à faire par les Magistrats, le Receveur de S. A., Ch. François de Micheroux, Renard Haultenone, Major du Régiment franchimontois et l'Intendant des forêts », venus par ordre du Prince. Les dits soldats pénètrent furieux dans la salle, y commettent de grandes insolences, en sortent, puis reviennent frapper les portes avec leurs fusils et de grosses pierres, qu'ils lancent au travers des fenêtres jusque sur la table où ces chefs travaillaient. Ils rentrent, saisissent et maltraitent le Bre et l'un des Echevins; les Conseillers les défendent et l'un d'eux manque d'y laisser la vie. Ces coquins, comme saisis de rage, renversent le Bre Thomas Parotte et le traînent par les cheveux jusqu'en sa maison en le frappant, courent dire en la demeure du Mayeur qu'ils tueront celui-ci et brisent les fenêtres de ce justicier. L'Intendant va vers eux les priant de s'apaiser, ils l'assaillent, s'emparent de Michel Pirotte Denis, le font marcher avec force bourrades devant eux, en menaçant de le tuer. S'élançant de nouveau dans la maison du Mayeur, des fenêtres ils font feu contre tout ce qui se présente, enfin ils courent se poster derrière la demeure du Greffier, promettent de tuer quiconque sortira et qu'ensuite ils mettront le feu au bourg.
  Cette bagarre n'avait duré que peu d'instants; les assistants étant revenus de leur surprise, le tocsin fut sonné. Le premier répondant à l'appel, Jacques Pichot, est entouré par ces malfaiteurs. Il allait payer de sa vie le secours apporté, quand d'autres habitants armés le dégagèrent, réduisirent ces misérables et leur infligèrent une correction qui, on le voit, n'était que trop bien méritèe.
  De nouveaux ennemis passant en Décembre mirent des bestiaux à rançon; « Mr d'Olne, qui habitait Liège, intervint et sut abaisser la somme fixée jusqu'à 300 fl. On lui offrit pour ce service une corette et un coq de bruyère, payès 9 fl. »
  Outre les travaux cités de Namur et Huy, le Ban fut soumis, pendant l'année dont il est question, à fournir des pionniers pour les constructions défensives élevées à Ronde-haye, Chênée, Grivegnée, la Chartreuse, la citadelle et St-Gilles, travaux souvent interrompus par des prises d'armes pour occuper et défendre ces divers points.
  Jalhay donnait à ces travailleurs de 25 à 30 sous par jour, plus 3 sous de bière.
  Le Greffier en constatant ces faits ajoutait: « Le pays est dépouillé de bestiaux vu l'impossibilité de les nourrir, tous les biens sont engagés à des étrangers. Les livremens se faisant sans bonification aucune, et la seule ressource étant la vente du bois à brûler pour Verviers, la commune est réduite de moitié depuis la dernière guerre.
  Elle ne compte plus que 200 maisons dont 30 saisies et abandonnées, ne pouvant suffire aux taxes, et le tiers des autres très-pauvres. Néanmoins elle est obligée de payer par an 12.000 fl. d'intérêt pour les emprunts, 1.350 à S. A., 5.400 en sus pour les sept années de guerre. De son côté, la France exige 6.252 fl. annuels, plus 2.000 de représailles dont on a ressenti l'effet en Novembre 1696.
  Les Magistrats suffisent à peine aux saisies, débats, vacations, voyages, entremises avec les créanciers, crenkiniers, huissiers, etc ».
    En Janvier 1697 se succédèrent à de courts intervalles les partis des capitaines Devosse, Denoël, Delnaife et Lafeuillade.
  Le 30, le Ban eut au moins la satisfaction, rare, de voir se produire un quasi protecteur par la sauvegarde suivante :
  « Louis Comte de Guiscard, Chevalier des ordres du Roi, Lieutenant-Général de ses armées, Gouverneur et grand Bailly de Sedan, Commandant les troupes de S. M. dans les places et pays d'entre Sambre et Meuse, défend à ses troupes de faire aucun tort et dommage au bourg et dépendances de Jalhay, d'y enlever aucun effet, d'y loger et se rafraîchir, sous peine, à ses officiers d'en répondre, à ses soldats d'être punis très sévèrement, à condition de payer régulièrement les rations et contributions imposées sur les biens.
   Fait à Dinant, le 30 Janvier 1697 ».
  En même temps, le Gouverneur de Limbourg faisait demander « de la venaison à plumes ». On envoya à la recherche, sans succès, même à Malmedy, qui ordinairement fournissait en pareille circonstance. Pour n'exciter de reproche, on expédia 50 stiers d'avoine au demandeur qui bientôt après ordonna de lui livrer « un mouton gras et deux autres pièces ».
  Afin d'obtenir quelqu'allègement dans les impôts, la commune fit des remontrances aux Etats à propos « de ce qu'elle avait souffert depuis les grandes guerres d'Allemagne ». 
  De ce dernier pays les corps armés ne cessaient d'affluer, Jalhay en subit les 6, 11, 12, 13, 18, 20 et 30 du dit mois. Au premier arrivant on put donner, mais sans rien autre, 17 livres de truites à 5 patars. Le deuxième, sous Boharmont, était composé d'un grand nombre d'allemands, et se fixa au bourg pendant qu'une forte armée de sa nation passait par Limbourg. Le troisième était conduit par Devosse.

  Un malheur frappait encore le Ban le 21 Avril; à l'approche de troupes très redoutées pour leur rapacité, les habitants s'empressèrent de refugier dans l'église le peu qu'ils possédaient. Les soldats arrivant animés de fureur s'en font donner les clefs et s'emparent de tout ce qu'ils trouvent à leur convenance. Non contents ils attaquent la maison du receveur qui parvint à fuir « avec sa femme près d'être mère ». Ils pénètrent en la demeure, volent 65 fl. que contenait la caisse, pillent et enlèvent ce qui restait de bestiaux au bourg.
  Les habitants se trouvant alors sans nulle ressource, la commune leur distribua tout son avoir, 400 fl., et le curé en emprunta 3000 à sa famille pour les nécessités du moment.
  Le 30 Juillet, la terreur se répandit de nouveau par le retour des troupes du partisan « Geuillard, de conduite insupportable », à leur arrivée, les Magistrats siégeaient, « chacun se retira au plus vite croyant à de nouveaux malheurs ».
  Un gros parti du capitaine Bihain parut le 15 Août et le 13 du mois de Juillet, le Bourg revit Boharmont et ses gens.
  Le 27, le Bre de Jalhay avec celui de Verviers, Osterman, se mirent en route, accompagnant une armée traversant le pays. Ils la suivirent pendant sept jours ayant avec eux des messagers qu'ils envoyaient prévenir leurs administrés des mouvements des troupes. Ainsi ils allèrent par Namur et Dinant jusqu'à extinction de danger pour les leurs. Jalhay en cette circonstance indemnisa son chef de 7 escalins par journée.
  Les prètentions du camp français de Malmedy redevinrent pressantes le 1er Octobre, et le 4 le Ban revoyait les régiments de Roquelaure et de Marceau.
  Le premier y retourna le 24 avec une cavalerie faisant grands dégâts « il s'éloigna sous condition de lui envoyer à Malmedy » deux pots de beurre. 
  Le trente du mois fut signée la paix de Ryswyk et les populations accueillirent cette nouvelle avec des transports de joie. Pourtant cette aspiration à des jours heureux fut troublée par la disette de grains, laquelle amena une famine désolante. Ainsi allait se fermer la suite d'événements désastreux dont le 17° siècle se montra si prodigue.
  En 1698, le receveur du Ban Henkinet, clôturait ses comptes en disant: « on me doit beaucoup à raison de la grande pauvreté et cherté des vivres ».
  Leur prix fut encore excessif toute l'année suivante, pendant laquelle l'incident saillant fut le passage de la garnison de Luxembourg.
  A sa venue la rivière de Dison était grossie et l'officier demanda des charrettes, des échelles et les harnas du Bre pour la passer.
  En 1700, la dette de Jalhay s'élevait à 300.000 florins de Liège, plus 50 à 60.000 fl. d'intérêts arriérés. A ce sujet, l'un des Bres jetant un coup d'oeil rétrospectif sur le passé disait, par une supplique au Prince: « Les troupes de Lorraine réduisirent en une nuit Jalhay en cendres avec tous les effets des habitants. Le second bond fut le quartier d'hiver des Français qui, par les excès de leurs exactions, obligèrent nos Magistrats à emprunter à 13, 14, 15 et 16° denier et payer pour honoraires de quatre-vingt à cent écus pour une somme de 3000 francs ».
  L'on a pu remarquer ci-dessus l'appréhension d'une guerre de créanciers, prévue par le Bre Mathieu Pierre, en 1678; ce brave Magistrat disait vrai, et cette guerre fut acharnée, terrible, pour ces pauvres débiteurs.
  Par les traités, dont l'un des textes a été reproduit plus haut, tous les habitants se trouvaient donc appréhensibles dans leurs biens et leur personne.
  Dès qu'une échéance n'était pas satisfaite, les créanciers faisaient saisir comme on a vu l'un des Bourgmestres sur quelque point où il se trouvât, s'il ne payait, procédaient à l'enlèvement de ses bestiaux d'abord et de ceux des administrés après.
  Parfois aussi les créanciers envoyaient les archers Liègeois, dits krènekiniers (cranequiniers), vivre à discrétion au Ban. Entr'autres faits, on vit neuf d'entre ces suppots, en tel cas, y ravager nuit et jour les pommes et les poires, en Septembre, et revenir en Octobre saisir des bestiaux pris au hasard partout où ils les rencontraient.
  L'insulte alla jusqu'au point d'annoncer la vente des aisemences ou terrains communaux sans prévenir la commune, mais nul n'offrit, non plus qu'à l'annonce de la location.
  D'autres créanciers choisissaient le moment où les Jalhaytois se trouvaient avec leurs attelages et denrées au marché de Verviers pour saisir contenant et contenu. En ce cas, on vendait le tout au plus offrant, les frais de vente et de fourrière à la charge des dépossédés.
  Les scènes de ce genre étaient fréquentes, mais à côté de leur tristesse, il arriva souvent aussi à l'assistance apitoyée, de n'offrir quoi que ce fut pour chars et bestiaux mis en vente, au contraire on la vit indemniser ceux-là qui voulaient profiter de ces moments de détresse pour acquérir à bas prix. Toute la première moitié du 18e siècle surtout fut affligée par ces saisies.
  Quand s'ouvrit le 18e siècle, une accalmie d'évènements politiques faisait briller partout des rayons d'espoir, lorsque la guerre se ralluma de nouveau. Charles II, dernier roi d'Espagne de la maison d'Autriche, possesseur de Limbourg, étant mort le 1er Novembre 1700 sans laisser d'enfants, avait, comme on sait, légué par testament, sa couronne au Duc d'Anjou, Philippe V, petit-fils de Louis XIV. Aussitôt l'Empereur et ses alliés se portèrent contre le roi de France et jamais peut-être notre pays ne fut foulé par un plus grand nombre de gens de guerre qu'en 1701. Heureusement, pour se créer des partisans et ne réveiller le souvenir des déprédations de jadis , les français payaient une partie de leur dépense. C'est ainsi qu'ils donnaient à Jalhay un écu pour un chariot de bois de chauffage. Un brigadier, nommé d'Avaret, avait établi près du bourg un camp de 2000 hommes qui consumaient quarante de ces chariots par jour, mais comme on ne pouvait y suffire faute de bras, les soldats en se servant eux-mêmes, commirent de grands dégâts dans les forêts.
  En Octobre ce camp fut occupé par des dragons et autre cavalerie, ils exigèrent pour le coucher 6804 rations de paille de quinze livres chacune.  Bientôt le nombre d'autres impositions en hommes et vivres devint énorme.   Ces troupes prirent leur quartier d'hiver dans Jalhay et l'obsession y fut extrême. En Décembre la population surmenée les menaça d'émigrer en masse si elles ne restaient dans les bornes du possible.
  Au cours de l'année 1702,1e Bre écrivit au Prince ces mots :
« Le Ban est réduit à un état déplorable par la tourmente furieuse de la dernière guerre. Et ce n'était là que le commencement d'une nouvelle suite de douleurs.
 Pourtant alors la misère était telle qu'une troupe de soldats parut à Jalhay alors qu'il ne s'y trouvait absolument rien à manger. « On ne put leur offrir, écrivait le lire du temps, que cinq écus et Henri Dohogne pour les conduire vers Goé ».
  Par une singulière coincidence, ce même jour, le frère du Gouverneur de Limbourg arrivait en grande pompe pour faire visite de bon voisinage. L'on comprend l'embarras de la réception en telle pénurie.
  La forteresse voisine, occupée alors par les français alliés aux espagnols, allait être assiégée encore et sa ruine nouvelle augmenter celle des localités qui l'entouraient.
  En Octobre et Novembre de cette année 1702, les troupes destinées au siége de Limbourg se réunissaient à Liège et Jalhay fut imposé d'un convoi de fourrage, très important. Il s'exécuta de son mieux afin de se rendre favorable l'armée qui s'approchait de lui. Malheureusement un parti français, conduit par Destilleux, guettait les envois adressés aux alliés, il s'empara de celui de Jalhay à Fraipont et le réduisit en cendres.
  Il fallut le remplacer et tout ce que le Ban avait conservé pour ses bestiaux fut expédié par même chemin. Ce second envoi allait subir le sort de son devancier, au même endroit, quand le convoi des fourrages de Theux survenant il fit diversion et fut embrasé, tandis que le premier parvenait à se soustraire en se sauvant par Olne.
  A de nouvelles exigences, accompagnées de menaces effrayantes, les habitants glanèrent tout ce qui pouvait exister par les champs de Foyr et les Fagnes. Ce contingent parvint sans peine à destination, mais il fut trouvé si mauvais par les commissaires, qu'ils voulurent le jeter à la Meuse et se saisirent du Bre qui l'accompagnait. Il ne fut délivré que par argent, car Jalhay, le 29 Novembre, ne possèdait plus aucune espèce de provision et soixante bonniers de bois venaient d'être détruits par le feu.
  A peine le dit envoyé était-il de retour, que la garnison de Luxembourg, en passant, enlevait les bestiaux du Bre Raway.
le 27 sept 1703, restitution du chateau de Limbourg par les français aux alliés.

  L'année 1703 vit se succéder, on peut dire journellement, des passages de troupes, et les exécutions militaires furent nombreuses à propos de pionniers à fournir à Huy, de charrettes et chevaux demandés par les hollandais établis à Spa.
  Ceux-ci firent irruption à Jalhay dans la nuit du 26 Février, enlevèrent comme ôtage le fils de Simon Petit Simon et l'emprisonnèrent à Maestricht. En même temps un créancier s'emparait du Bre, qui fut mené dans la même ville. Là Mr de Wuille, de Maestricht, ému de compassion à sa vue, se fit son cautionnaire. Le magistrat, heureux d'être rendu à ses administrés en un moment critique, voulut prouver sa reconnaissance à son libérateur. A cette fin, songeant que la chose la plus rare en ces jours était la venaison, il parvint à se procurer un chevreuil et deux gélinottes. Celles-ci étaient considérées alors sur notre sol comme le rara avis, il paya cette paire seize florins et l'autre pièce quatorze. Le lot étant réuni, le Bre appela son frère, ils posèrent le tout, par un support, sur leurs épaules et traversèrent ainsi le pays couvert de troupes. Par une chance heureuse, ils arrivèrent sans encombre à Maestricht et déposèrent leur offrande aux pieds de celui qui avait su donner un exemple d'humanité généreuse, en ce temps de calamités.
  Mille florins prétés par M. Hesalle, l'un des échevins de Liège, furent accueillis comme la manne, ils fondirent aussitôt en de nouvelles exécutions et le Bre écrivait :
« Nous sommes accablés, on ne sait plus de quel côté tourner la tête ». Et ce cri de détresse était exhalé par tout le Franchimont.
  L'on a vu que dès l'année 1678, la misère avait réduit le Ban à cent familles en état de payer les impôts. En 1702 un rapport du Bre disant ne pouvoir les prélever, se termine comme suit :
 « Les étrangers ne payant que les deux tiers des tailles, selon le réglement de 1686, les habitants aux abois, pour jouir de cette immunité, laissent saisir leurs propriétés par les créanciers afforains et les reprennent à bail au préjudice des deniers publics.
  Les Princes de Liège s'émurent souvent de cette position faite aux communes, mais celles-ci se trouvant sous le poids de promesses écrites pendant de terribles pressions, il était difficile d'y porter remède.        Néanmoins l'effet fut tenté de nouveau, par l'ordonnance de Joseph Clément de Bavière, datée de Namur, 23 Février 1703, disant:
  « Les trois Etats de nos pays sensibles aux calamités publiques dont la guerre et les malheurs des temps affligent les villes et communautés de nos pays, il est conclu et arrêté une suspension de toutes poursuites et exécutions pour arrérages de rentes dues par nos villes et communautés, et pour frais causés à cet égard, jusques après le mois d'Août ».
  Malheureusement un nouvel orage grondait vers Limbourg, d'où les puissances alliées se préparaient à déloger français et espagnols par un siège qui eut lieu en Septembre 1703. Pendant sa durée le Franchimont eut encore énormément à pâtir, malgré les précautions que semblait prendre le duc de Marlborough, de populaire mémoire.
  L'état de son armée nous est donné par un manuscrit du temps comme suit :
  « Sa force comprenait 25 bataillons et 10 escadrons aux ordres du Prince de Hesse Cassel qui établit deux camps, l'un à Sart, l'autre à Bailoux, tandis que le Marquis de Lavaray avait le sien à Foyr ».
  Un quatrième camp ètait à Stembert, sous le gènéral Bouleaux. Jalhay et Polleer se trouvaient occupés pas des grand'gardes, et chacun de ces foyers imposait sa part de contributions.
  Enfin le camp d’attaque, assis près de Hêvremeont, à une demi lieue de Jalhay « lui causa, dit un rapport, de grosses pertes par les maisons renversées, pillage et ruine des hameaux, malgré les sauvegardes chèrement payées ».
  Le camp de Sart précité, compléta alors par son terrible voisinage, la désolation du Ban. Pour ce seul point Jalhay dut payer 26,143 florins dans le courant d'Octobre.
  Dès l'occupation de Limbourg par les alliés, 22 Décembre, le Ban fut taxé à 40 rations par jour; le lendemain le Comte de Tilly étant en la dite ville, demanda à Jalhay 50 charrettes à mener du foin. Le 27, eut lieu l'exécution militaire faute de pouvoir envoyer des pionniers à Huy. Et les Hollandais entrés et fixés à Limbourg, exigèrent du Marquisat 2720 florins par jour, en promettant remise d'un septième aux communautés qui payeraient sans retard.
  Les nouveaux occupants de la forteresse la firent restaurer par des pionniers des Bans. Alors les vexations en corvées, contributions et pillages des forêts se firent sous les plus affreuses menaces et défenses de se plaindre au Prince des spoliations de ce dernier genre. Elles intéressèrent les deux Pays et le Comte de Tilly dut intervenir, en qualitê de Gouverneur du Limbourg, pour y mettre fin.
  Alors le Ban fut obligé de maintenir une garde permanente aux frontières, pour prévenir les dégâts et défendre son territoire.
  D'autre part, le camp Hollandais de Lanaken était d'une exigence affligeante; l'un de ses chefs, Brunet de Rochebrune, réctama de nouvelles impositions le 7 Août 1704. A des observations inspirées par une misère profonde, les suppliants reçurent pour toute réponse ces mots: « Il faut souffrir, on use envers vous des mêmes droits qu'envers les autres ».
  Ce même mois tout ce que Jalhay possédait de moyens de locomotion fut réquisitionné pour desservir le camp et les travaux des fortifications de Limbourg. Il était à peine débarrassé de cette besogne, lorsque des troupes françaises survenant, le 29 Octobre, elles s'emparèrent de tous le bois de chauffage disponible. Cela fait, ils brûlèrent toutes les charrettes et chars de quelque qualité qu'ils fussent, ainsi que tous leurs accessoires. Ils partirent laissant la commune dépouillée de tout instrument de transport et outils.
  Au Ban la misère était si profonde en 1707 que le conseiller Pierre Thomas étant mort, ses collègues se chargèrent de sa besogne « afin d'épargner à la commune les dix écus de son gage ».
  Mais, mieux à l'aise en 1711, ils donnèrent « ordre, le 22 Octobre au Bre Bazin, de faire faire par un peintre une carte figurative de Jalhay pour ètre présentée au Conseil ».
  L'année 1714 fut marquée de blanc par le bonheur de voir la paix se rétablir. En Juillet le chancelier et les Membres du Conseil Impérial, qui régissait la principauté Liègeoise, ordonnèrent au Ban une reddition des comptes d'impôts arriérés. Sa magistrature répondit: « Impossible d'y vaquer en cette saison précieuse, chacun labourant personnellement un pays ingrat requérant toute assiduité, impossible d'y vaquer avant la fin de la moisson et semailles prochaines, suppliant d'avoir terme jusqu'à la St-André ».  Cette supplique fut signée par six des anciens Bourgmestres.
  Comme diversion, Jalhay eut l'honneur de voir passer Pierre-le-Grand, Empereur de Russie, en 1717, le 13 Juillet ordre fut envoyé aux magistrats, de faire réparer les chemins et les élargir pour qu'il n'arrive aucun inconvénient aux carosses et bagage lorsque S. M. Czarienne passera quittant Spa pour Aix.
  Cette même armèe, l'épizootie sévissait fortement dans les pays voisins, et la pauvreté avait atteint au Franchiront un degré navrant.. A preuve, le Bre, pour se conformer aux ordonnances, ayant mis en location les pièces de terre et biens abandonnés ou saisis, pour défaut de payement d'impôts, leur nombre s'éleva, de Février à Juillet, à trois cent et douze. L'offre la plus hante fut de vingt-six florins, pour la terre dite aux Arliers, ensemencée de regon et d'avoine. Le nombre de pièces louées fut de trente-quatre en Février, huit autres trouvèrent preneur en Juillet.
  L'hiver suivant revit les armées impériales, lesquelles ne devaient plus reparaître qu'en 1731, alors que Jalhay, à leur merci, se trouva de nouveau entièrement spolié.
  Entretemps les dettes et la reddition des comptes suscitèrent tant de contestations, qu'en l'année 1734 le Prince Georges-Louis de Berghes, de charitable mémoire, voyant s'empirer l'état financier des communes, s'en alarma vivevement. Il leur représenta que l'une des causes principales des déficits, existait « en la facilité d'entreprendre et soutenir légèrement des procès pour des choses de nulle conséquence, par où les communes s'épuisent et se mettent hors d'état d'acquitter leurs charges ». Il demanda la liste de ces procès et fit défense d'en former ou tenir dorénavant, sans le concours et le consentement d'au moins les deux tiers de tous les intéressés, propriétaires, surcéans et afforains. En même temps il signalait l'abus d'impôts sur divers biens et la cotisation personnelle. Cependant malgré les recommandations précitées, il permit d'intenter action contre tout impôt arbitraire.
  Malheureusement la situation ne s'améliora, car quelques années après le Bre écrivait au Prince ce qui suit: « Nous n'avons que trop expérimenté notre décroissance au dernier quartier d'hiver des troupes impériales, arrivé en 1735, lequel, Pour combler les maux précédents, nous a anéantis par les passades et repassades, séjours et exécutions militaires.
  «Les Etats d’alors peu soigneux de leurs frontières les ont abandonnées pour garantir les enceintes  de leur capitale, en nous ordonnant de repousser la force par la force, comme si un petit ban sans forteresse ni barrière, était capable de résister, lui qui ne peut seulement repousser les partis qui viennent journellement l'assiéger et l'abîmer rien qu'en rafraichissements ».
   A cette époque, en nos contrées le désarroi était général, les populations ruinées, affolées, erraient d'un point à l'autre et la détresse de chacun les faisait repousser au-delà des frontières. Les campagnes, les forêts étaient remplies de malheureux et de déserteurs que la faim poussait an crime. Il n'était plus de sécurité que dans les villes bien fermées. Ces troupes errantes augmentèrent en 1736, des patrouilles incessantes ne pouvaient parvenir à les écarter. A Jalhay, par ordre, nul ne se rendait aux travaux des champs sans être armé, afin d'être prêt à secourir les gardes en péril. Alors aussi des intempéries préparèrent la disette tant citée de l'an 40 (1740) et comme résultat, pendant l'année suivante, une épidémie décima la population du Ban, ses Magistrats la relatèrent comme suit en une supplique à S. A.
  « Les étranges calamités et la misère extrême règnent actuellement en votre pauvre communauté de Jalhay, d'un côté elle est affligée par la véhémence d'une maladie désolante qui se communique au point de ne laisser personne exempt. Elle a enlevé de ce monde quantité de gens, père et mère à la fois, les principaux chefs et soutiens des familles. La plus grande partie des habitants sont encore alités, malades ou moribonds et à l'extrême, sans apparence, de modération, ce qui réduit le peuple à un êtat d'impuissance en toute chose.
  D'un autre côté la rareté et cherté des vivres, causée par la défense de correspondre avec le Limbourg, prive la communauté de tout négoce ». 
  Le curé nota le premier fait en son obituaire, sous la date du 2 Juillet, disant: « Depuis Janvier la paroisse est accablèe de maladies, nombre de chefs de famille sont passés de ce monde à l'éternité. Plus de 200 personnes sont encore malades, réduites à une profonde misère, ne pouvant gagner leur subsistance, et plusieurs honnêtes ménages ont dû avoir recours à la fabrique des communs pauvres ».
  Et comme si tous les fléaux devaient frapper à la fois, à cette dernière date, débutait la guerre terrible dite de la succession d'Autriche. Ce conflit, suscité comme on sait contre Marie-Thérèse, soutenue par le seul Roi d'Angleterre et ayant pour adversaires la France, la Prusse et l'Espagne, ce conflit devait durer sept ans. Ayant eu pour théâtre tour à tour l'Allemagne, la France et notre pays, les passages de troupes à Jalhay étaient incessants. A la fin de l'année, le Bre complétait le tableau de la situation en disant au Prince:
  « La communauté est réduite à deux cents pauvres manouvriers et artisans sans aucun commerce ni revenu qu'un petit labour, auquel ils s'emploient jour et nuit comme les plus misérables galériens de la Barbarie. Nous possédons dix-sept cents Bonnier de bois mais la misère les fait gaspiller et détruire avant d'être venus à coupe ».
  Comme secours le Prince accorda vainement répit pour deux années vis-à-vis des créanciers et impôts, vu, dit-il,
  « L’impossibilité à raison des calamités, maladies, interruption de commerce et cherté des vivres ». Les créanciers n'en tinrent compte, l’un d'eux reçut en gage toutes les forêts et bois de la commune; il les mit en location.
Verviers qui par son commerce croit tous les Jours à proportion que et décroissons.
et Stembert ont la draperie qui los fait fleurir, 'Dieux ses usines et son négoce de fer très important et Spa ses saisons et ses eaux minérales qui lui fournissent un profit considérable.
Le Ban do Sart a voulu aussi se raviver avec sels eaux minérales, mais son négoce a d'abord été supprimé par la force de ceux de Spa, et croupit avec nous presque dans le môme labyrinthe do charges et de péages.
  En 1743, ils exécutèrent bestiaux et hommes, les 12 Janvier, 12 et 22 Février, 16 et 19 Mars, 1er Avril, 28 Juin, 1er et 30 Août et 8 Octobre.   Dans les ventes résultant de ces saisies, les bœufs atteignirent en général le prix de 48 florins de Liège.
  L'année suivante revit mêmes scènes et fut employée, toute entière, à régler les comptes et frais de procès. Alors fut provoquée à Liège une assemblée de créanciers dans l'espoir d'obtenir de les satisfaire alternativement. Malheureusement l'accord n'aboutit et le Mayeur fut cité au Tribunal des XXII, pour n'avoir pas fait exécuter les assignations expédiées, pourtant il n'en souffrit aucun désagrément.
  Afin de resserrer les liens qui unissaient les villages du Ban, il fut arrêté, en 1735, que la communauté de Jalhay se compose de cinq bans qui ne font qu'un corps et un commun intérêt, Jalhay en est le clocher et la justice comme chef de la juridiction.
  La subdivision du Ban en Bans ne nous est offerte que par ce seul exemple.
  Les troupes françaises et allemandes s'y succédèrent à peu près sans interruption de 1745 à 1748, leurs impositions atteignirent des chiffres excessifs égalés par le prix des denrées. Nombre d'habitants, malgré leur patience et courage, ne pouvant plus se livrer aux travaux de leurs terres, sans cesse foulées, demandèrent à Verviers des ressources en tissage et filage. Mais la gêne était très grande partout le pays. Les ouvriers de la ville industrielle firent des émeutes pour empêcher les fabricants de donner du travail aux habitants des campagnes, à moins qu'eux n'en eussent selon leurs besoins. Cet espoir de ressource s'étant évanoui pour le Ban, alors qu'il avait encore tant à souffrir, le fit abandonner forcément par une partie de sa population. De nombreuses propriétés furent de nouveau délaissées à la commune, faute de pouvoir suffire aux impôts.
  En 1746, il n'était plus nul moyen visible de satisfaire à aucun payement et cependant la guerre continuait, véhémente; le Prince supplia et obtint la promesse que désormais son pays serait respecté. Comme ses prédécesseurs en pareille occurrence, il fit poser aux frontières des enseignes portant ces mots : Neutralité du pays de Liège.
  Vain espoir, les bandes armées se ruèrent sur notre sol avec plus de rapacité que jamais.
  Un temps, des hussards autrichiens paraissait avoir pris à cœur de martyriser à leur tour les habitants de Jalhay. Le 9 Décembre, un de leurs officiers subalternes, le cornette Marfowisky, s'y distinguait par ses brutalités sans frein et toute résistance était punie par des voies de fait insupportables. Le Bre Jaspar Manguette, révolté de l'impunité accordée à ce misérable par ses chefs, le menaça d'une correction, à propos d'un transport de bagages contrevenant aux ordonnances du Prince. Mais ce magistrat fut accusé aussitôt d'avoir voulu attenter à la vie des soldats. Le colonel le fit saisir et, sans vouloir l'entendre, pas plus que son interprète, qui, voulant parler, fut frappé violemment d'un bâton, le Bre fut couché sur une botte de paille et deux caporaux lui donnèrent 80 coups de gourdin. Le sang jaillit bientôt de la bouche et des narines de l'infortuné qui, l'exécution accomplie, fut laissé sur le sol, près de rendre le dernier soupir.
  On considéra comme miracle que la mort n'eût pas immédiatement succédé aux coups, vu la violence du supplice.
  La victime fut longtemps à se rétablir, mais sa constitution exceptionnelle triompha de ses douleurs. Son éloignement des affaires pendant l'hivernage de ces troupes malfaisantes fut une nouvelle source d'embarras, tant son énergie s'était dévouée pour servir d'égide aux molestés. Thomas de Vina mont fut chargé de l'intérim puis le peuple élut Thomas Adam, auquel J. Manguette joignit encore ses services aussitôt sa guérison.
  La paix ayant été conclue à Aix-la-Chapelle en 1748, l'année suivante, le Bre, tout en clôturant ses comptes, y inscrivit ces mots: « La guerre de 7 ans en a duré huit pour Jalhay ».
  Un léger secours parut en ce moment, le Prince ayant accordé 30.000 écus comme indemnité aux communes ayant subi les quartiers d'hiver de 1747-48. Mais le nombre des partageants était considérable et nous ne voyons de combien Jalhay en profita.
  Il ne sera peut-être pas superflu de citer quelques faits relatifs à ce quartier d'hiver, dont il vient d'être question, lequel dura du 11 Novembre au 3 Avril par le régiment de Wurmbrandt, sous les capitaines Kleinfeld et Winkelman.
  « En Janvier les Etats de Liège avaient aussi accordé une certaine somme, comme paye aux soldats, or l'un des commissaires de Jalhay, Jean Raway, se rendit à Spa pour conférer à ce sujet. Les soldats impatients, sous prétexte qu'il était cause du retard des fonds alloués, le saisirent et l'emprisonnèrent pour cinq jours.
  Jalhay dut fournir le pain au détachement de la compagnie Winkelman posté à Esneux, en outre, des officiers occupant le bourg voulurent l'obliger à établir un hôpital militaire, par la raison que Polleur en possédait un pour l'hivernage. Ils ne réussirent, vu l'état des finances, mais forcèrent Jalhay à leur faire des avances de paye, et le 18 du dit mois l'exécution militaire le frappa pour retard à ce sujet. Puis arrivèrent du 21 au 27 « les régiments de Wurtemberg et de Marie-Thérèse ». Le 29 la compagnie de Winkelman vit son fourrier recevoir « une gratification de 4fl. pour bons services ».
  En Mars, Jalhay hébergeait un bataillon du régiment Charles de Lorraine, quinze compagnies du régiment de Wurtemberg, dont trois de dragons. Le général Spada avec son état-major et 30 cuirassiers du régiment de Birkenfeld.
  Le 26, c'était le tour d'une ambulance avec 70 malades et blessés, « à laquelle on dut procurer 4530 florins et des attirails de chevaux pour des habitants prisonniers; crainte qu'ils ne s'évadassent, on livra aux charretiers prisonniers des compagnies et gardes qui contèrent 296 fl ».
  Le 3 Avril les officiers prévinrent que vu leur prochain départ « si on ne les paye ils emmèneront comme otages les Bres et garderont les charretiers requis pour les bagages ». 
  Jalhay ne possédait plus nul argent, plusieurs des Magistrats se mirent en route pour en trouver, heureusement le conseiller Liègeois Rubens, alors à Verviers, prêta 50 ducats à Jean Raway, pour calmer les deux compagnies ameutées. Mais au retour de cet envoyé elles étaient parties, entraînant le Bre Jean Manguette et le commissaire Jaspar Darimont qu'elles employèrent à conduire les bagages. Raway les rejoignit à Ensival et leur remit la somme, qui ne fut plus trouvée suffisante. Manguette seul fut relâché, tandis que le commissaire dut cheminer plusieurs jours encore, jusqu'à ce que l'on eut rencontré prêteur pour sa délivrance.
  Dans les armées d'alors si les bons coeurs semblaient rares néanmoins il s'en trouvait et Jalhay savait les reconnaitre. L'on vient de voir une gratification accordée à ce sujet; en voici une seconde, du même hivernage. Le régiment de Wurtemberg, lors de son passage, s'était emparé de tous les boeufs et harnais pour ses bagages. Un lieutenant du nom de Feichtinger, hivernant à Jalhay, parvint par son énergie à faire lâcher prise aux ravisseurs. Et malgré la pauvreté du moment, le bon auxiliaire fut gratifié de deux ducats, par les Bourgmestres reconnaissants. 
  En 1753, le Bre Jean Pierre Bazin, supplia le Prince de le décharger de sa commission, en disant: « Tous les coffres sont épuisés par la dernière guerre. Nous avons subi des frais immenses par les troupes allièes, sans indemnité d'une obole, tandis que ceux qui ont reçu les troupes du Roi, ont eu l'avantage d'être payés. L'argent étant rare, impossible de satisfaire aux créanciers qui travaillent à leur ruine en procurant la nôtre en citations, décrets, exploits, exécutions de krenkiniers, arrêts, etc., etc., quoique pendant la dernière occupation, il n'ait été possible de lever un liard des tailles et que depuis sa fin on ait payé 22.000 écus de frais de guerre ».
  L'année d'après le numéraire était si difficile à trouver, que le payement de l'impôt dit waide avoine, ou 25 sous annuels par ménage, ne put se faire. Même fait, répété pour les autres taxes, entraina des exécutions chez les familles les plus honorables. Les enquêtes prouvèrent que la moitié de la population était dans l'impossibilité la plus complète de rien donner.
  Sur ce, une seconde guerre de sept ans se déroula de 1756 à 82 et dans laquelle la Prusse, sous Frédéric II, allait devenir puissance de premier ordre.
  Cette lutte valut à Jalhay plusieurs quartiers d'hiver très coûteux. Sa population, détournée du travail agricole, ayant persévéré dans son désir de se créer, par la filature de la laine, une ressource, elle lui fut enfin acquise et la soutint jusqu'en notre siècle.
  L'année 1770 vit régner à la fois la disette et l'épizootie. Cependant la population éparse regagnait ses foyers avec affection, mais une épidémie enleva, même année, 70 enfants.

  L'année suivante le grain était rationné; nos communes allaient le chercher au dépôt établi à Liège et le Ban en reçut 70 stiers par semaine. Il représenta vainement ne pouvoir eu nourrir ses 1200 communiants et 500 d'âge plus tendre, « vu la saison qui ne permet de vivre comme en hiver avec un peu de pommes de terre et de farine d'avoine tout à fait épuisées, même ce que l'on aurait du semer ».
La supplique ajoute « qu'en supposant à un pain par semaine pour chaque habitant, cela donnerait le chiffre de 200 stiers ». Mais les charrettes envoyées à cette fin revinrent souvent vides vers la population affamée.
  Au mois d'Octobre 1771, l'épizootie achevait d'enlever ce qui restait dans les étables. Trois ans après le Magistrat, au sujet des tailles non payées, dut procéder encore à la location de propriétés qu'il lit saisir, au nombre de quatre vingt-quatre. L'offre la plus importante atteignit 40 florins pour la location de la terre dite Clusin ou Clisor.
  Ce fut pendant ces tristes circonstances que Jalhay vit se produire les présentations et cérémonies de son érection en seigneurie.
  Quoique ce titre lui eut été donné anciennement, néanmoins nulle preuve écrite ou réclamation de primauté ne parut alors. Pourtant le château continuait d'être possédé par des descendants et alliés des Groulart, seigneurs de Surister. Car Jalhay resta pendant des siècles le siège de la branche cadette de cette famille et nombre de ses membres y occupèrent longtemps les charges principales à la Cour de justice ainsi que la haute foresterie du Ban.
  En l'année 1771, le Prince de Liège accorda à Jalhay le titre de seigneurie en faveur de Pierre-François de Lantremange, chanoine tréfoncier de la cathédrale de St-Lambert. Son diplôme le dit: « primus Thoparcus » ou premier seigneur de Jalhay.
Ce prélat, né à Liège, reçut le Ban en engagère avec les droits inhérents, y compris la nomination des membres de la Cour, sous l'agréation de S. A. Eut outre il y inslalla pour son Bailli Antoine-François Detroz dont il sera parlé ci-après.
  Il fut le seul Bailli que le Ban ait possédé.
  Ces nouveaux titulaires tentèrent vainement de garer leur siège des malheurs de l'époque, la disette, la cherté des denrées enchérirent au point qu'en Mai 1775 les habitants supplièrent les Bres de venir à leur aide.
  Pour répondre à cet appel, ces chefs ne purent que permettre, à une personne de chaque ménage, d'aller faucher les litières dans les taillis et bois de 5 ans, « à condition de n'y travailler avant le soleil levé, sous peine d'amende ».
  Afin d'aviver le bourg le Prince octoya, le 4 Août 1785, l'établissement de deux foires à jour fixe, les 16 Mai et 3 Octobre.
  Malgré les calamités du 18e siècle, grâce aux soins des Magistrats et au bon vouloir des habitants, l'état financier ne s'aggravait plus.
  La dette de Jalhay était telle qu'en 1700. Mais la révolution allait pressurer encore le bourg déjà tant réduit.
  Le mouvement politique au Franchimont partit surtout, on le sait, du congrès de Polleur, dont la première réunion eut lieu le 18 Août 1789.
  La magistrature de Jalhay, sollicitée de s'y associer, assembla ses administrés le 23, devant la maison de ville, afin d'y élire des représentants pour la séance du 26, « à l'effet, dit l'invitation, d'y confecter avec les Bres et députés des villes et communautés du Franchimont ». 
  Bientôt furent désignés le Bre Jean-Lambert-Louis de Vinamont et les commissaires ou conseillers de Régence, Mathieu Bazin et Pascal Dohogne. On leur adjoignit: Léonard Parotte, Jaspar-Simon Manguette, Thomas Adans, Jaspar Grégoire et Jean-Antoine Counet. Ils parurent à Polleur au jour indiqué. Là, engagés à nommer un député, le surlendemain ils choisirent Jean-Joseph Bazin, qui ayant armé sa démission, fut réélu « avec plein pouvoir de s'adjoindre et substituer une ou plusieurs personnes recommandables par leur amour pour la patrie ». 
  La séance du 29 demanda au Ban 50 hommes pour protéger  Theux et le 30, il y eut assemblée à Jalhay, à l'effet de voir confirmer la nomination du susdit représentant par tout le peuple, ce qui eut lieu. Mais, pendant la réunion préparatoire, trois voix s'élevèrent disant: II faut d'abord casser le vieux magistrat. Aussitôt les membres de la régence qui étaient en la maison commune se montrèrent, et, de la fenêtre, le Bre prenant la parole dit: « Messieurs les bons manants et citoyens, il n'est nul besoin de me casser, je me retire, faites un nouveau Bre à ma place, et un nouveau commissaire à celle du sieur Dohogne ».
  La foule fut surprise et désolée, vu l'estime générale acquise à ces chefs en présence de leurs longs et laborieux services.
  Les provocateurs proposèrent d'accepter l'offre, mais l'assistance, sauf les trois précités, déclara avec élan que ces élus lui convenaient parfaitement et qu'elle ne prétendait en choisir d'autres. Ils furent donc maintenus, quoiqu'en général les communes eussent nommé des Magistrats nouveaux, la plupart reçus grâce à l'éblouissement de ces jours passionnés. Mais Jalhay ayant acquis l'expérience sensée que donne le malheur avait toujours apporté un soin que l'on peut appeler sévère, dans le choix de ses administrateurs.
  La fermentation qui agitait le pays fut augmentée par le départ du Prince pour Trèves, le 22 Août.

  Le roi de Prusse offrit d’abord sa médiation en qualité de membre du Cercle de Westphalie. Le 24 Novembre, il fit retirer les troupes qui, venues au pays de Liège, avaient démissionné les magistrats élus sans l'assentiment du Prince, et retira enfin ses soldats, le 10 Avril 1790. 
  Le 1er Mai suivant, les habitants furent convoqués au son d'une clochette, pour que tous chefs de ménage, hommes, femmes, ecclésiastiques et séculiers nommassent un électeur qui, avec ses égaux des autres communautés, devaient élire leur premier député du district du Franchimont à l'Etat-Tiers.
La pièce suivante en exprime le résultat et l'espoir : 
« A la régence de Jalhay » ,
« Messieurs et chers concitoyens,
  J'ai la satisfaction de pouvoir vous annoncer avec certitude que lundi dernier 3 courant, jour qui doit faire à jamais époque dans les fastes de la nation, les représentans de nos villes siégeant à l'Etat-Tiers ont enfin décidé sans retour, en faveur des habitants des campagnes, la grande et importante question de la représentation à l'Etat et qu'en conséquence j'ai été admis à l'assemblée de l'Etat-Tiers comme député du district de Franchimont, moyennant que je me qualifie au contenu du reçès qui, en admettant les représentans des campagnes élus selon le plan d'organisation provisoire dressé à ce sujet, exige d'eux qu'ils fassent conster d'être à la fois domiciliés et possesseurs au moins d'une maison et de deux bonniers de bien dans le lieu de leur district.
  Puisse l'exemple donné par les représentants des villes de ce pays se reproduire bientôt de proche en proche dans celles des provinces voisines où les campagnes gémissent encore sous l'aristocratie des villes, puissent aussi les autres districts des campagnes de ce pays suivre l'exemple que leur a donné le district de Franchimont, en se hâtant d'élire et d'envoyer des députés à l'Etat.
  C'est le seul et infaillible moyen d'établir sur une base inébranlable l'ouvrage pressant et salutaire de la régénération du pays, dont la tâche nous a été imposée.
L.-F. DETHIER, député du district de Franchimont à l'Etat Tiers du pays de Liège.
Theux, ce 8 Mai 1790 ».
  Pour répondre à ce désir, J. Bazin de Jalhay, fut « constitué pour assister à la prochaine séance de l'assemblée nationale du Pays de Liège en qualité de représentant de Jalhay ».
  Le 7 avait eu lieu, au bourg, l'élection des officiers de la compagnie; le 22, le Congrès fit savoir qu'elle devait 40 hommes pour renforcer l'armée patriotique.
  Le lendemain parut l'ordre d'être prêt avec balle et poudre, pour marcher à première sommation. Au milieu de la nuit, le tocsin éveilla en sursaut la population. Ce n'était là qu'un artifice imaginé par de nouveaux chefs pour éprouver l'exactitude de la compagnie qui fut sur pied instantanément, comme toujours. Mais, par hasard, immédiatement après même signal l'appelait pour se rendre au camp de Bilsen, car de cette ville s'approchait l'armée palatine, envoyée pour soutenir le Prince.
  Cependant Liège retint au passage et pour elle, cette garde Jalhaisienne, qui depuis des siècles servait si fidèlement la principauté. « Les Seigneurs du Comité civil et militaire, accordèrent par jour à ces hommes délite, 8 sous de haute paie. » Quinze jours après le Ban fut obligé de solliciter leur retour, des bandes de pillards dévastant ses forêts.
  Dès lors la fatalité devait s'attacher encore pour plusieurs années au Ban, comme pour compléter ses épreuves.
  Cette même année 1790, Jalhay, tant ami de l'ordre, vit accomplir deux scènes révolutionnaires. Une bande armée y parut le 23 Avril, tambour battant, et s'arrêta devant la demeure du receveur, Bodson. Elle enleva de la façade un tableau représentant les armes du Prince et alluma près de l'église un hucher où fut jeté le blason.
  Le 12 Mai, nouvelle agression eut lieu contre le même fonctionnaire, qui, s'étant présenté pour apaiser les assaillants, fut frappé d'une cognée et menacé du pilori, mais il parvint à se dégager et fuir. Les meneurs exigèrent alors la remise des registres pour en gratifier deux des leurs qu'ils nommèrent, séance tenante, l'un receveur et l'autre contrôleur. En même temps la dame du démissionné, restée au logis, fut sommée de livrer la caisse sous peine de pillage, et les envahisseurs, vu leur nombre, forcèrent les Bourgmestres d'assister à cette mutation. Ils leur firent en même temps défense de délivrer désormais des passavants aux armes du Prince, mais bien à celles de Franchimont.
  La caisse réclamée fut apportée, ouverte et trouvée vide; alors la dite dame, pour se dégager des mains des émeutiers, fut forcée d'emprunter la valeur d'un mois de recette, qu'ils emportèrent aussitôt.
  Le 20 Juin arriva l'ordre d'envoyer à l'armée « autant d'hommes qu'il y en a ». Pourtant un nombre fut désigné, ils tirèrent au sort et partirent.
  Jalhay, généreux autant que possible, en voyant se succéder des convois de soldats malades ou blessés, voulut, en 1701, réorganiser un hôpital. On l'établit « en la marguelerie (maison du vicaire) où furent installés vingt bois de lit, avec matelas, travers, couvertures, meubles et ustensiles ». Le tout avait été acheté aux Bres de Stembert, pour 290 fl., à condition que si cette localité en manquait à la venue de soldats, l'ensemble serait remis avec une perte de 100 fl. pour Jalhay.
  Le Prince étant rentré à Liège le 13 Février, des malades des troupes impériales occupèrent le dit gite ainsi que l'Hôtel de Ville, approprié de même. Cependant on s'aperçut bientôt que tout soldat de passage, valide ou non, voulait profiter de telle hospitalité; force fut donc de se défaire de ce matériel bienfaisant.
  A cette époque, mieux que jamais, les communes ayant à leur tète des chefs prudents étaient les favorisées; Jalhay avait cet avantage par son digne Bre Jean-Lambert-Louis de Vinamont. Mais son âge était très grand, il annonça l'impossibilité de siéger désormais et la séance en laquelle il devait être remplacé fut annoncée pour le 25 Mars 1791.
  En cette occurrence chacun désira trouver un motif pour le maintenir, or, d'un accord tacite, au jour indiqué nul ne se présenta au local de l'élection ; de Vinamont s'y trouva seul. Néanmoins toutes les formalités préliminaires requises il les remplit sans sourciller, continua de procéder, déposa son vote, fit le dépouillement, la proclamation, et nomma ainsi, successivement pour Bourgmestre: Théodore Paquay-Darimont et pour conseiller Jean-Léonard Thiry, de Foyr. Les opérations terminées, il les relata en des procès-verbaux disant: « Les douze heures étant sonnées et les voix comptées, la pluralité est tombée sur la personne de . . . par une voix, et fut appelé au serment selon le mandement de Son Altesse ».
  A ce résultat la population se frottait les mains d'aise, en riant sous cape, certaine de voir invalider l'effet de cette séance bizarre. Pourtant le Prince confirma, le 8 Mai suivant, cette élection unique, sans nul doute, dans les fastes électoraux.
  La République, on le sait, avait été proclamée en France le 22 Septembre 1792, et Dumouriez ayant gagné la bataille de Jemmapes sur les alliés le 6 Novembre suivant, le pays fut traversé par un nombre considérable d'émigrés français et de soldats autrichiens. Le dit général les repoussa au-delà de la Roer; le 28, il entrait à Liège et le Prince était déclaré déchu.
  Cependant des succès ayant de nouveau favorisé les impériaux, le 12 Mars 03 ils reparurent et rétablirent le Prince sur son siége. En retour le général Jourdan, par la bataille de Fleurus, du 26 Juin, les força de rétrograder ; enfin, le 27 Janvier 1794, le Prince de Liège quittait, de nouveau sa capitale. Pendant ces événements, les impositions frappaient le Ban, obligé de suffire à toute éventualité. Entr'autres ordres, en Février 93, il avait été requis, sous des peines sévères, de fournir « tous les fourrages en foin et paille que l'on pourra trouver à Jalhay et environs, à livrer à l'instant à Verviers »,  où était une armée française, sous le général Lamarche.
  
Alors la République ayant exigé un inventaire de tout ce que possédait la commune, l'on trouva :

1.392 mesures de seigle,
5.090 mesures d’avoine,
27.015 mannes de pommes de terre de 40 livres chacune, 
48.853 pesées de foin de 12 livres, pour la plupart de
la Fagne du ci-devant pays de Limbourg, 
79.770 bottes de paille de 6 livres,
20 chevaux,
1.712 bêtes à cornes.
47 chêvres ou gattes,
15 cochons,
33 livres de boeur,
75 livres de miel,
45 livres de lard,
83 livres de laine,
20 livres de savon.  

  Le nombre des habitants était descendu à 1596, 104 de moins qu'en 1771, logés en 290 maisons et chaumières. D'entre eux, « 796 se trouvaient sans grains, beaucoup en avaient très peu et 252 ne possédaient absolument rien ».
  La population, on le comprend, était loin des fêtes même civiques, nonobstant la cérémonie de la plantation de l'arbre de la liberté fut annoncée; elle eut lieu à Jalhay, le 7 Octobre 94. La mise en scène n'en fut guère coûteuse, la commune paya : « Pour l'arbre 15 patars. — A. ceux qui l'ont planté 15 id. — Pour un bonnet rouge à mettre sur l'arbre, 1 florin. — Pour breuvage chez Jean Raway, 1fi. Total : 3 florins, dix-sous.
  Pendant ces jours de commotions, l'armée de Sambre-et-Meuse absorbait énormément; pour elle il fut fait de larges brêches au susdit inventaire. « En attendant de livrer la totalité ». écrivait le Commissaire de guerre. Aussi, la famine se présenta bientôt poignante et meurtrière.
  Voici quelques exemples de contributions forcées, d'entre un nombre infini : En Janvier 94, il fut exigé la 8° tête de bétail, puis les demandes se succédèrent sans interruption, « à peine d'être traités comme attentateurs à la liberté ».
  Les livraisons se faisaient, en ce moment surtout, pour les troupes fixées à Verviers, Visé, Liège et Cornelis Munster.
  En Mai, le Prince étant de retour demanda 50 pionniers, « avec bèches, pioches et charrettes à deux chevaux, munies de planches, pour Dinant, afin d'y travailler aux ordres des puissances coalisées ». Après son exil, les demandes du mois d'Août arrivèrent des camps de Sprimont, d'Esneux et de Leuvegnez. Le 22, le premier demandait 10.000 bottes de foin de 15 livres et 15 charrettes à deux chevaux avec des vivres pour huit jours; de Stavelot on exigeait vingt vaches; la Chartreuse cent pionniers porteurs de vivres pour une semaine; enfin de Herve, une  foule d'ordres se succédaient aussi. Sur ce dernier point était ètabli le parc militaire du général Comte de Baillet de Latour. Toute la population valide du Ban s'y relayait par moitié à chaque décade, comme garde et avec le plus grand nombre de ses attelages. Le Bre lui même, le dit mois, y fut retenu forcément pendant vingt jours et le bourg voyait arriver des bandes armées, sans interruption.
  En Septembre les troupes établies à Spa, demandèrent 3.800 bottes de paille par décade et Surister fut sommé de fournir à lui seul «le chauffage et la paille au général Zock »... Il avait été pris aussi la 7°, puis la 5° des bêtes à cornes, dont nonante pour le Ban, en imposant les trois quarts des contributions « à ses six plus hauts cotisés ».
  L'hiver était d'une rigueur désolante et tous les vivres épuisés. Au mois de Novembre, on fit annoncer de par l'autorité supérieure, que les nécessiteux devaient recevoir les pommes de terre et légumes trouvés dans les maisons des émigrés. Mais telle ressource n'existait pas à Jalhay.
  Il fut alors imposé des visites domiciliaires et l'on recourut à de nouveaux inventaires pour connaître ce que l'on pouvait livrer encore aux armées de la République. Celui du 21 Novembre démontra qu'il n'existait plus au Ban, pour toute provision, que 2200 boisseaux d'avoine et 2550 bottes de foin de 15 livres.
  Espérant voir ces chiffres augmenter, les délégués, doutant de la sincérité du rapport, firent appel aux dénonciateurs. Ce dernier mot surprit, il semblait inconnu à Jalhay et la population si digne, si vaillante et expirant de misère, répondit par un morne et dédaigneux silence.
  Afin d'apporter quelqu'allégement à cette situation déplorable, Nicolas Legrand fut nommé administrateur des cantons de Spa, Sart et Jalhay, vain espoir.

  Le 1er Janvier 1793, le général de Baillet de Latour réclama 3000 rations de foin, de 15 livres et 200 mesures d'avoine: il ne fut plus trouvé au Ban que 20 de celles-ci et 100 des premières. Alors aussi, vu la disparition de toutes choses, aux quatre commissaires envoyés par les représentants du peuple, le magistrat ne sut donner, comme don de bienvenue, qu'un paquet de tabac.
  (L'on a pu remarquer que même cadeau s'était fait, dans de pareilles circonstances, deux siècles auparavant.)
  En Février suivant fut frappée la réquisition « de toutes les voitures, chevaux et bœufs pour transporter tout ce qui restait de fourrages », par la force armée, sans égard aux réclamations frivoles. Des dragons chargés de cette besogne déclarèrent qu'il n'y avait plus au Ban « que du foin moitié bruyère, impossible à manger pour leurs chevaux ». Néanmoins il leur fut commandé de ne partir qu'avec 1300 bottes de 15 livres et 2040 de paille de 10 livres.
  Quant à la contribution d'avoine, les visites domiciliaires, faites par les mêmes soldats, prouvèrent que la commune n'en possédait plus que 89 stiers, conservés pour les semailles. Aussi, l'officier Merlier qui devait les enlever, écrivit à son Comité ces mots :
  « Une grande partie de ce transport est tirée des semences des cultivateurs, qui s'en sont volontairement dépouillés pour en faire un sacrifice à la République, tout en déclarant que l'avoine en leur commune avait, depuis 4 ou 5 décades, sauvé la vie aux pauvres habitants, vu la pénurie de toute espèce de grains ».
  Le Bre ajoutait à ce tableau en disant: Quant aux voitures il n'en est plus que trois dans la commune et quatre hors de service, les chevaux étant épuisés faute de nourriture. Quant aux boeufs ils souffrent de même tout en servant à la culture et aux transports.
  Les 4 et 17 Mars eurent lieu des exécutions militaires.
  Le 18, la république demanda tout le foin sauf les tries a garder pour les bestiaux.
  Le Magistrat répondit qu'il n'avait plus rien à donner, sinon sa démission.
  En réponse il reçut l'ordre d'envoyer de suite des vaches de 200 livres. Le Ban en possédait peu de ce poids, il offrit les meilleures et l'on en renvoya quatre à remplacer, avec menaces « d'arrêter le Magistrat et faire subir des mauvais traitements ». Il fut pourtant convenu que l'on prendrait les bestiaux de 150 livres.
  A peine étaient-ils livrés que la population apprit, à son grand désespoir, que les trois commissaires qui venaient de disparaitre de Spa, leur siége, étaient des fripons. Ils n'avaient nul pouvoir de frapper ces impôts et exécutions qui venaient de peser si lourdement.
  En présence de l'exaspération des dépouillés, les nouveaux demandeurs jugèrent utile de substituer l'adulation aux menaces et Jalhay reçut cet appel aux sentiments patriotiques:
  « Vous ne serez pas sourds à la voix de nos généreux libérateurs, qui ont tant de fois scellé de leur sang le sentier de la liberté qui vous est rendue; son écho retentit jusqu'à vous et nous voyons déjà l'empressement que vous allez mettre dans l'exécution des arrêtés, sinon, nous serons obligés de vous abandonner». Loin de pouvoir offrir, Jalhay en Juin pétitionna dans l'espoir d'obtenir un peu de grain pour la commune en détresse. Heureusement elle fut remboursée de certains objets livrés, ce qui permit de vivoter quelques jours, en achetant à Spa cinquante mesures d'épeautre pour les plus infortunés.
  Cependant le bourg était visité sans cesse par des troupes de malheureux affamés, fuyant les localités voisines en s'imaginant obtenir une bribe aux foyers producteurs de denrées. Jalhay, dans l'impossibilité de pouvoir secourir quiconque vit même, le 2 Avril, sa magistrature quémandant, de par le pays, du pain pour sauver la vie à ses administrés et trouver partout la misère à son comble.
  Pendant cet hiver néfaste, deux cents habitants du Ban y moururent de faim. Cependant, tout avait été imposé pour eux, maisons, chevaux, chiens, et chacun y avait donné les preuves les plus touchantes d'affection et de secours mutuels.
  En Juin les commissaires de guerre, toujours impitoyables, ordonnèrent de livrer « tous les chevaux, à peine d'y être contraint par la force armée à cheval ».
   Les montures encore existantes avaient été données pour le parc de Herve et le Ban n'en avait plus que deux. Les menaces se succédaient portant pour entête: « La République ou la mort » ou: « Liberté, égalité, mort aux tyrans ». Le magistrat au désespoir y répondit par des remontrances au-dessus desquelles on lisait, en grands caractères : « Liberté, égalité, humanité, paix, union et justice »!
  En retour, au lieu d'atténuement, il lui fut reproché « de ne pas livrer les charrettes pour Venlo, d'avoir scèlé beaucoup de choses en grains et avoine » et que « plusieurs dîmes appartenant aux calotins de Stavelot »,  n'étaient pas rentrées aux magasins.
  Quoique Jalhay n'eût rien eu de commun avec ce dernier sujet, il dut livrer de suite tout ce qu'il possédait de foin « sauf la nourriture de dix jours pour le gros bétail et d'un mois pour chaque cheval ». 
  En Juillet suivant, l'armée demanda 67 bêtes à cornes, 71 à laine, 13 charrettes pour Spa et d'autres pour Ruremonde.
  Le 30, tous les chars et charrettes de la commune étaient réclamés « pour la translation de l'hopital de Spa à Stavelot, mais pas moins de 15 à 16 à quatre bœufs ». Ce qui eut lieu le lendemain.
  En Septembre, à demande de trois cents chevaux, faite à l'arrondissement, le Ban qui n'en avait plus un seul dut en acheter quatre de 12, 15, 22 et 28 1/2.couronnes; plus, dix-huit vaches de 148 livres et 27 moutons. Ce contingent n'empêcha point l'administrateur de réclamer aussi de l'argent par un billet ainsi conçu: « Il parait que vous êtes fatigués d'être traités en douceur, et vous voulez me forcer à l'exécution militaire, pour la dernière fois je vous avertis ». 
  Il fallut de grands efforts pour recueillir 1100 francs à compte des 2196 demandés par le susdit.
  Un nouvel ordre menaça les municipaux de la prison et de 150 cavaliers a héberger, « il fut suivi, le 25, de celui de livrer les denrées voulues sinon d'être écrasés par l'exécution, haussés d'un quart, emprisonnés pour six mois et dépouillés de la moitié des grains battus et non battus ».
  Le 1er Octobre 1795, la Convention proclama, comme on sait, l'incorporation à la République française de la Principauté de Liège, dont une bonne partie forma le département de l'Ourte avec Liège pour chef-lieu. Jalhay s'y trouva compris pour le arrondissement.
  Il lui fut alors demandé « un état des biens ayant appartenu aux ci-devants Evêque de Liège, Chapitre Cathédral, ex-Prince de Stavelot, ci-devant clergé de France, Ordre des chevaliers de Malte, émigrés, généraux ennemis, d'y joindre la liste des usines et d'envoyer de suite toute recette faite pour tels sujets; ces biens appartenant à la subsistance des armées ».    Jalhay répondit ne rien posséder de ce genre, que les fonds du Prince-Evêque étaient sous la régie des domaines nationaux. Qu'en outre les dîmes du Ban étant des revenus de particuliers non émigrés, elles ne pouvaient être acquises à la nation, non plus que le moulin à farine, seule usine de la commune et appartenant à l'un de ses habitants.

 Les émigrés ayant été admis à reprendre possession de leurs biens , la famille de Lantremange fit sa rentrée à Jalhay, à la grande satisfaction de chacun.
  Au préalable, la Municipalité avait attesté le désir de ce retour par une supplique disant: « Madame de Lantremange née de Piette, ainsi que sa famille et toutes les personnes qui lui sont attachées sont de moeurs douces, sensibles et compatissantes au point de s'attirer l'estime et l'attachement de tous leurs concitoyens. Conduite qui a fait regretter leur départ avec autant d'amertume qu'elle fait souhaiter leur retour avec ardeur ».
  Voici l'apostille de l'acte de leur réintégration :
  « 23 Brumaire 4e année de la République ou 14 Novembre 1795, Bonjean, Maire, Mathieu Bazin et J.-J. Manguette, officiers municipaux, assistés des citoyens J.-P. Lange, Gillet Adans, A.-J. Grégoire et Léonard-J. Rauwai, ex-officiers municipaux furent, par arrêté de l'administrateur de l'arrondissement de Spa, chargés de lever les scellés apposés sur les biens et effets de la dame Ve Lantremange à Jalhay, et la réintégrer dans sa propriété, selon l'arrêté du 3 prairial dernier. Ayant fait appeler Nicolas Darimont ex-huissier et Jean-Joseph Parotte, établis gardes maison par l'ex-administrateur N. Legrand et l'ex-municipalité, tous pénétrèrent dans la maison et cour, et remirent les clefs à Henri Lantremange fils; ils constatèrent que les scellés étaient tels qu'à leur réapposition, faite après que les meubles et effets eurent été pris et conduits à Spa ». Tous signèrent, ainsi que F. Demasy, secrétaire de l'administrateur.
  L'enlèvement des dits meubles avait eu lieu le 11 Avril 1794, par ordre de l'Inspecteur des domaines, en faveur de l'Hôpital militaire établi au Vaux-Hal à Spa.
  L'emprunt de 600 millions fut annoncé comme « loi salutaire pour porter les derniers coups à l'agonisante coalition et amener cette paix si chère après laquelle nous soupirons tous », disait la circulaire du 23 Décembre. A ce sujet, le magistrat de Jalhay fut invité à se rendre à Spa, « sous peine de 300 livres d'amende et d'être traité comme rebelle à la loi, pour y désigner les citoyens les plus aisés ». Il répondit :
  « Notre commune, connue pour être la commune la plus pauvre, est chargée de capitaux levés par les anciennes guerres; la fortune de nos principaux ne s'élève pas à une valeur nette de 2.500 francs. Nous n'avons ni commerce, ni industrie et nous ne connaissons personne qui ne doive travailler constamment pour vivre. Ajoutez y les frais énormes de la présente guerre.
  Il ne nous reste aucun argent, et si la filature qui nous occupe, pour la manufacture de draps de Verviers, venait a manquer seulement un mois, nous verrions renaître la disette et périr, comme l'an dernier, le demi-quart de nos habitants ».
  Néanmoins Jalhay donna 1.500 fr. au dit emprunt forcé.
  En ces jours de détresse, nul n'osait circuler avec des valeurs; en Décembre le chef d'un détachement reçut 10 francs pour prêter sept hommes d'escorte à l'argent d'une contribution à porter à Verviers.
  On accueillit comme chance heureuse l'arrestation d'une charrette de sel passant en contrebande en destination pour Luxembourg. Vendue 243 francs, « Jalhay en réserva un stier pour les ouvriers de la forge nationale du Marteau, vu le besoin où ils se trouvaient. Le reste fut débité par petites portions, afin que les sans-culotte pussent s'en procurer aussi ».
  En Janvier 1796, il fut demandé ce que contenait la caisse communale; la rèponse fut ce seul mot: « Rien ». Après épuisement du numéraire et des denrées, on réclama des souliers, « à 10 l. 10 sols la paire; Jalhay devait en fournir 64 paires à chaque décade, jusqu'à complément des 40.000 paires à livrer par les sept arrondissements voisins. A ce moment le cuir était introuvable, les agents de la République firent en vain des visites domiciliaires à Stavelot et Malmedy, enfin il fut saisi partout où l'on en rencontra.
  Ce même mois Jalhay reçut l'invitation suivante :
  « Le Commissaire du Directoire exécutif près l'Administration municipale du canton de Spa.
  Frères et amis 1
  Le moment tant désiré est enfin arrivé, c'est aujourd'hui que vous ressentirez les bienfaits de la constitution, il fallait endurer de grands maux, essuyer bien des entraves pour arriver au port où tendait notre espérance.
Le 4 pluviose (Dimanche 24 Janvier 1796) sera pour vous, un des plus beaux jours de la révolution; vous êtes invités à vous trouver à Spa pour l'installation constitutionnelle de l'administration municipale, en y publiant de nouveau, avec toute la solennité requise, le décret d'exécution du 9 vendémiaire an 4e, par lequel le peuple français vous a remis irrévocablement vous et votre territoire à la république.
  Vous y verrez aussi la célébration de la mort du dernier Roi de France, la loi y appelle expressément les fonctionnaires publics, les employés du Gouvernement, les notaires et généralement tous ceux qui sont salariés par la rêpublique pour y prêter le serment d'une haine èternelle à la royauté et d'un attachement inviolable à la constitution républicaine.

  La plantation de l'arbre de la liberté aura lieu dans cette auguste cérémonie, l'abolition des dîmes, comme droits féodaux, y sera proclamée.
  Une fête civique terminera cette glorieuse journée. 
  Publié le 24 Janvier 1796, vieux style ».
  Mais dans le même moment, Jalhay assistait avec douleur au départ des membres des plus importants de sa commune.
  Car, dans ces événements elle perdit sa Cour de Justice, par la création d'un Tribunal de première instance à Malmedy. Ce transfert lui fut très-préjudiciable par la disparition de nombre d'hommes éclairés qui l'avaient toujours assistée de leurs lumières et de leur influence.
  Par eux le goût des études s'était implanté au Ban, à preuve, il vit naître la plupart de ses avocats, Echevins et Mayeurs et en donnait aux localités environnantes ainsi qu'à Liège, &c.
  Le dernier acte dressé par la Cour de Jalhay porte la date du 3 Décembre 1795.
  Quant à la dette du Ban, les intérêts avaient été servis autant que possible, mais ils cessèrent faute de ressources dès le départ des émigrés. Ceux-ci, à leur retour, adressèrent de vives réclamations, auxquelles les débiteurs opposèrent l'impossibilité de satisfaire, à cause des guerres qui persistaient.
  Un arrêté du 9 Termidor an XI ou 27 Juillet 1803, décida que les communes des neuf départements réunis, ou belges, conserveraient leurs biens à la charge de payer leurs dettes.
  Divers projets d'accomodement surgirent et la plupart des localités manifestèrent leurs désirs à ce sujet. 
  Le préfet du département de l'Ourte, par arrêté du 6 Septembre, statua que les Conseils municipaux pourraient appeler dans leur sein les créanciers.   Ceux-ci ne furent pas satisfaits, disant être ainsi distraits de leurs juges naturels. Les tribunaux et les conseils leur proposèrent divers arrangements que la plupart refusèrent en sollicitant le rappel du susdit arrêté.
  Jalhay, espérant aplanir la difficulté proposa, à ses créanciers, 1° de quitter tous les arrérages, 2° que le capital ne portât plus d'intérêt et, 3° de se contenter annuellement, par mode de remboursement, de l'équivalent de la moitié d'une échéance, jusqu'à extinction des capitaux. Ces dispositions furent repoussées et les suppliques des dépossédés reprirent leur cours à l'avènement de Napoléon 1er.
  Enfin un décret impérial, du 29 Septembre 1804, obligea les communes quant aux anciens capitaux non sujets à liquidation, de servir désormais régulièrement les intérêts courants et d'acquitter ceux antérieurs, depuis l'an 1800, dans un délai de 10 ans au plus.
  Tandis que le Ban périclitait de nouveau en l'état de ses finances, par des impositions forcées, le déplacement des frontières, la bonne tenue de la route d'Aix vers Liège, son embranchement par Dison, Rechain et Battice, firent délaisser entièrement le chemin de Jalhay pour les transports du Franchimont vers l'Allemagne et vice-versà.
  En sorte que quand finit le premier empire français, les localitès du Ban étaient des plus dépouillées, endettées et délaissées qui fussent.
  Heureusement tant de séries de maux n'avaient point abattu l'énergique volonté des Jalhaytois qui payèrent vaillamment aussi leur tribut aux scènes sanglantes des premières années de notre siècle.
  Dès l'ère de paix proclamée, ils s'appliquèrent avec une ardeur remarquable à leurs rudes travaux agricoles et quinze années de quiétude suffirent pour ramener l'aisance en la commune tant de fois flagellée.
  Quand éclata le signal de notre indépendance nationale, on sait qu'un samedi soir, le 28 Août 1830, une bourrasque révolutionnaire produisit de grands dégâts, en pillages, à Verviers. A cette nouvelle, Jalhay réorganisa sa compagnie qui se rendit le lendemain en la dite ville et se présenta aux autorités en disant : « Le pays a besoin d'hommes, nous voilà, à votre service ».
  En ce moment de désordre et de panique, chacun fut charmé, autant de cette attention délicate que de la tournure martiale de cette troupe généreuse.
  Selon le journal de Verviers qui relata le fait, « la vue de ces hommes robustes rappelait les 600 braves, leurs ancêtres, qui se dévouèrent en 1468, car ces gens, dans leur modestie, aiment la liberté et l'ordre ».
  Ils furent accueillis avec reconnaissance, casés dans les salles de l'ancien tribunal, et leur présence sympathique concourut fortement à rétablir la sécurité dans la ville émotionnée.
  Ils étaient munis d'armes de toutes sortes et n'avaient d'uniforme dans le vêtement que la blouse bleue, laquelle devint pour un temps le costume militaire et caractéristique de notre armée patriotique, comme on sait.

  En leur bel acte de dévouement les Jalhaytois préservèrent aussi Verviers d'un coup de main prémédité pour ouvrir les prisons.
  Peu après, le bourg eut, a subir, par cas fortuit, un événement des plus déplorable et bien inattendu.
  Jalhay se développe principalement par une longue rue, s'étendant de l'Est à l'Ouest. En 1835 il possédait encore toute sa physionomie ancienne datant de la reconstruction de 1647. Ses bâtisses, d'aspect pittoresque, étaient en général en charpente et couvertes en chaume. Bondées de récoltes, entourées d'abatis abritant les instruments de labour, elles étaient précédées de tas de litières, de bois à brûler, etc. Le tout formait donc un entassement énorme de matières inflammables.
  Le 23 Mars un vent d'Est, très violent depuis plusieurs jours, continuait de souffler lorsque le feu se déclara dans un tas de ramilles, près de la maison du sieur Wadrier. Elle était l'une des dernières du bourg du côté de l'Orient. Aussitôt, rapides comme une traînée de poudre, les brindilles enflammées voltigèrent sur les toitures. En dix minutes tout le centre du bourg ne formait plus qu'un brasier effroyable.
  La combustion fut si instantanée, que feu le Rd curé Neuray s'étant élancé au premier cri vers le début du sinistre, il y était de quelques instants lorsque déjà son presbytère, situé à l'extrémité opposée du bourg, était en flammes. Il y retourne, en arrache quelques meubles et les dépose en un pré voisin, où ils s'enflammèrent bientôt après, à l'insu de quiconque. Tout fut consumé, y compris l'autorisation sacerdotale du curé, pendant qu'il portait secours ailleurs.
  En même temps la maison vicariale, ainsi que l'école, étaient détruites et la maison de ville brûlait.
  Le desservant s'y précipite avec le Bourgmestre Grégoire et le fils de celui-ci, pour sauver les archives; ils y parviennent en les lançant au dehors. Ces dévoués quittaient le modeste édifice tout embrasé, lorsque la toiture s'écroule et le Bourgmestre y reste, recouvert de débris incandescents.
  Les assistants, saisis d'épouvante, s'élancent à son secours dans cette fournaise, le retirent vivant de l'horrible péril et, par un hasard providentiel, sans blessure grave.
  A ce moment tout le bourg présentait une masse de flammes et de fumée, d'où partaient les cris lamentables des femmes et des enfants. Il devenait impossible d'approcher des maisons atteintes. Les habitants n'avaient pu que chasser au dehors les bestiaux, lesquels s'élançaient affolés dans toutes les directions.
  L'atmosphère semblait être de feu; aussi, l'élément destructeur, malgré la distance, s'attacha-t-il bientôt à la pointe supérieure de la flèche de l'église.    Des habitants de Sart, accourus en secours, y pénètrent armés de haches;   Denis Bayer, atteint au faite le premier, suivi de Servais et d'autres. Ils attaquent le feu, qui ne veut lâcher sa proie, alors mouillant des couvertures ils les appliquent sur les faces menacées de la tour et leurs efforts la préservent en y entretenant l'humidité. Mais la charpente du choeur prend feu, le Bourgmestre s'élance vers ce point, par une échelle dressée à l'intérieur. Il touchait déjà la toiture, quand l'échelle se brisant, il est précipité d'une grande hauteur; heureusement il tombe sur une table, qui amortit la chute.
  Relevé encore sans blessure sérieuse, il court immédiatement vers de nouveaux dangers avec un élan tel qu'il lui valut le surnom d'homme intrèpide, que lui décernèrent les habitants émerveillés.
  En même temps le garde champêtre, Michel Dessart, parvenait à placer une échelle sur la toiture entamée; l'échelon sur lequel il posait le pied cède, ce malheureux père de famille tombe sur le toit et rebondit sur le cimetière. Relevé dans un état pitoyable il sut pourtant échapper à la mort qui longtemps le menaça.
  Les premiers instants de stupeur et d'effroi passés, l'appréhension devint extrême, qu'il n'y eut des victimes nombreuses restées sous les ruines. Car les maisons disparaissaient avec rapidité dans les tourbillons de l'embrasement. Et l'on savait des chefs de famille absents et des enfants seuls au logis.
  Au moment où le fléau était le plus intense, on se souvint qu'une jeune fille folle n'avait pas été vue ce jour-là. Plusieurs des assistants se portent vers sa demeure toute en feu. M. Lejeune-Leboutte, de Verviers, y pénètre au péril de sa vie, trouve la malheureuse indifférente au péril et résistant au sauvetage. Cet homme dévoué, que le hasard avait amené sur le lieu du sinistre était très robuste, il la saisit, la jette sur son dos et l'emporte au travers du foyer incandescent. Le même jouit bientôt d'un autre bonheur :   La dame Thys voyant le feu s'approcher de son logis, avait, en courant ouvrir les portes à son bétail, déposé son jeune enfant au dehors de la demeure, sur un tas de bruyères. A peine la mère l'avait-elle quitté que le feu entourait le petit et entamait déjà les mailtots quand Lejeune survint pour l'arracher aussi à la mort. Le péril se présentait imminent partout, l'air était rempli de débris enflammés, le vent redoublant de violence les emportait par masses ardentes, que l'on voyait, avec terreur, s'abattre sur les localités voisines.
  On peut dire sans métaphore, qu'en moins de temps qu'il n'en faut pour raconter le fait, soixante-sept maisons avec tous leurs appendices étaient anéanties, y compris tout ce qu'elles renfermaient.
  Il aurait fallu avoir un cœur de roche, écrivait le Bre au journal, pour ne pas verser des larmes de sang à la vue de tous ces infortunés sans pain et sans abris.
  Les cris des femmes et des enfants déchiraient l'âme. Ils ont tout perdu, provisions, mobilier, fourrage et les bestiaux n'ont maintenant qu'une maigre nourriture qui leur manquera bientôt.
  Pour ceux-ci heureusement, le temps se maintint sec quoique froid, et c'était étrange à voir que ces deux à trois cents bêtes à cornes, effrayées, beuglant et parcourant la fagne en toute liberté.
  Un récit du lendemain du sinistre disait la vue de ce malheureux village offre le spectacle le plus désolant, tout y est calciné; il ne reste à cette population que le ciel et la terre desséchée.
  Ce n'était que trop vrai. Si le voyageur y ayant passé le matin était revenu le soir du désastre, il eût cru rêver, tant la plupart des habitations étaient complètement disparues. Des voûtes de caves réduites en poussières, laissaient voir des amas de pommes de terre grillées dans ces profondeurs.
  La place des fenêtres était indiquée sur le sol par des boules de verre fondu et le plan de certaines demeures n'était marqué sur la terre que par les seules éclaboussures argentées du plomb des gouttières.
  Heureusement personne ne périt dans cette destruction et l'on constata, comme fait étonnant, que parmi les animaux, seuls un chat et une poule étaient disparus.
  Disons encore que les habitants animés du courage du désespoir avaient fait des efforts inouïs pour préserver le bourg d'une destruction totale.
  Les feuilles en firent de superbes éloges et le Journal de Verviers ajoutait :   On a vu le Bre Grègoire, pendant plus de dix heures consécutives, se précipiter, toujours l'un des premiers, au milieu des plus grands dangers. Mais on ne saurait donner trop d'éloges à la conduite que M. Neuray, curé de l'endroit, a tenue pendant et après le désastre.
  La perte s'élevait à plus de 500.000 francs. Quant à la cause de l'incendie, il y eut deux versions: la première disait qu'un fumeur passant avait jeté une allumette enflammée au point où l'incendie éclata. L'autre voulait que des cendres ardentes eussent été versées sur un fumier. 
  A la nouvelle du malheur essuyé par Jalhay, il s'ouvrit un admirable concours en faveur de ceux-là qu'alors encore on appela, « le brave peuple.»
  Le Roi et la Reine envoyèrent immédiatement deux mille francs.
  Le Ministre de l'Intérieur, la Province et le Sénat firent chacun de même; la Chambre des Députés en donna mille.
  La Société générale pour favoriser l'industrie nationale 500.
  La garnison de Hasselt, officiers et soldats, un demi jour de solde.
  Il fut même proposé, mais sans effet, que la contribution de 10 % imposée alors au pays, fût, quant à la part du district, versée au profit de ces victimes.
  Des souscriptions furent ouvertes par toutes les communes de la Belgique, par les ouvriers de l'établissement Houget et Teston, alors à Hodimont, ainsi que par le Journal de Verviers, et le Nouvelliste de la même ville. Ces deux dernières produisirent, en huit jours 4.184 francs 31 cent. qu'une Commission répartit aussitôt.
  Feu M. le Docteur Rutten, de Verviers, offrit ses soins gratuits aux incendiés et feu le pharmacien G. Defooz fit de même pour tous médicaments à leur livrer pendant une année.
  Quoique nombre de maisons ne fussent pas assurées, elles furent reconstruites en grande partie. Néanmoins l'état précaire du bourg persistait par le mauvais état des chemins, lorsqu'en 1837 fut émis le projet de construire la belle grand’ route si utile, le reliant à Verviers, ce qui se réalisa pendant les années 1849 et 1850.

Il fut proposé alors de la prolonger vers l'Allemagne; Jalhay refusa, s'y opposa même et fut accusé d'égoïsme. Votre serviteur ayant demandé à feu l'honorable Bre P. Darimont la raison de tel refus, il répondit: « Faut-il vous l'avouer ? C'est en souvenir des horreurs que l'ancienne route vers ces points nous a values, et par crainte de leur retour ». Mais la solution de continuité fut comblée en 1877, par la belle communication partant de Bolinpont vers la Baraque-Michel, ou elle croise la route reliant Malmedy avec Eupen et rejoint celle de Zourbroud.
  Une autre grande voie relie Jalhay avec Surister, Sart et Spa depuis 1872 et l'on en projette une nouvelle vers le bassin de la Gileppe.
  Grâce à ces belles artères, savamment tracées, la commune tant éprouvée jadis et qui compte aujourd'hui 2080 habitants, jouit d'une prospérité qui va grandissant et dont elle est bien digne. Car c'est avec le plus beau courage qu'elle souffrit et combattit toujours pour la plus noble des causes, la défense de la patrie, tout en reportant tous ses vœux vers la paix et le labeur.
  Comme rapport et contraste avec ta note qui précède, en voici une tracée en 1649, temps de douloureuse mémoire :

  « Jalhay, pillé, saccagé, brûlé sauf 5 maisons en 1647, a 59 ménages. dont 27 mendient.
     Herbiester, pillé en 1647 et 2 maisons brûlées, a 27 ménages, 9 mendient.
     Charneux,                                                           a 47 ménages, 17 mendient.
     Surister,                                                              a 33 ménages, 10 mendient
     Foyr,                                                                   a 24 ménages, 9 mendient
     Bouvegné,                                                           a 2 ménages. 

  Beaucoup de pauvres, beaucoup de veuves et plusieurs ménages expatriés ne pouvant exister à cause de la pauvreté et ruines ».
  En 1761, Jalhay comptait 13 personnes secourues, Herbiester 6, Charneux 5, Surister 10 et Foyr 4.
  Aujourd'hui cette commune n'a pas de pauvres ; fasse le ciel qu'il en soit toujours ainsi.

FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE.


ANNEXE

  La généalogie des Seigneurs de Surister du nom de Groulart a été publiée par M. F. V. Goethals, en deux parties, dans son Miroir des notabilités nobiliaires de la Belgique, des Pays-Bas et du Nord de la France. T. II, p. 365 à 378 et p. 947 à 950.
  La première date s'y présente comme suit :
« 1. Jean Groulart, surnommé de Jalhay, à cause de la Seigneurie de ce nom, au marquisat de Franchimont, dont il fit bâtir la tour vers 1450.
  Un manuscrit, dont il fut parlé déjà p. 16, nous permet de remonter plus haut pour la présence de cette famille sur notre sol, en disant: La famille Groulard est originaire du pays d'Elboeuf, près de Rheims, en France ; un membre de cette famille noble est venu faire l'acquisition de la Seigneurie de Jalhay et de Suristerre près de Verviers, vers l'an 1380.
Quelques années après étant venu s'y fixer, il se livra à l'exploitation des minerais gisant sous ces pays et celui du Marquisat de Franchimont. Il occupait de nombreux ouvriers lorsque survinrent les démêlés qui amenèrent par la suite le sac de Liège. Ce Seigneur ayant pour le malheur de sa famille embrassé le parti des habitants de Liège, excita ses ouvriers à se joindre à ceux du pays de Franchimont pour porter du secours aux Liègeois, lorsque le duc de Bourgogne et Louis XI s’approchaient de Liège pour la soumettre.   Deux membres de la famille Groulard se trouvaient à côté des chefs du Marquisat de Franchimont, lorsqu'ils trouvèrent avec leurs braves au nombre de six cents une mort glorieuse, dans une sortie hors des murs de Liège qu'à la suite de cette défaite le duc de Bourgogne put anéantir presque complètement. Non content de cette terrible vengeance, il fit poursuivre dans les forets des Ardennes tous les Liègeois qui s'y réfugiaient; les pays de Franchimont, de Jalhay, de Suristerre, furent en grande partie ravagés et les exploitations détruites.
  La famille Groulard, se trouvant pourchassée et en grande partie ruinée, alla pour quelque temps chercher un refuge au pays d'où elle provenait ».    L'absence ne fut pas longue, car le généalogiste précité nous montre le fils du bâtisseur de la susdite tour, nommé aussi Jean, faisant hommage, pour sa Seigneurie de Surister, au Prince-Evêque de Liège, le 27 Septembre 1474.
  Voir pages suivantes ce que nous avons pu recueillir au sujet des Seigneurs de Jalhay créés au 18° siècle.

Généalogie de la famille van Lanterminge ou de Lantremange , Seigneurs de Jalhay.


Arnold van Lanterminge ayant épousé Geneviève Losen, il eut de ce mariage deux enfants, nés à St Trond:

  1. Arnold van Lanterminge, baptisé le ? Septembre 1582.
  2. Jean van Lanterminge, baptisé le 18 Février 1585. Celui-ci épousa, le 2 Février 1610, à N.-D. de St-Trond,  Marie Lintermans , dont huit enfants , tous nés à St-Trond :

    • Arnold van Lanterminge, baptisé le 24 Janvier 1611.
    • Robert van Lanterminge, baptisé le 21 Avril 1613. Il se fixa à Liège.
    • Marie van Lanterminge, baptisée le 2 Février 1615.
    • Geneviève van Lanterminge, baptisée le 5 Juillet 1617.
    • Anne van Lanterminge, baptisée le 23 Janvier 1620.
    • Jeanne van Lanterminge. baptisée le 21 Décembre 1622.
    • Jean van Lanterminge, baptisé le 30 Octobre 1625.
    • Marie van Lanterminge, baptisée le 2 Août 1628.

  Robert de Lantremange précité sous le nom de van Lanterminge, licencié dans les deux droits, Jurisconsulte, Avocat, Echevin, Député de la Cour de Liège, Conseiller du Prince Evêque et de la Souveraine Cour féodale, (dont il était sous-lieutenant en 1651,) et Administrateur des postes de S. M. Impériale.
  Dans une sédition qui éclata l'an 1685 à Liège, au sujet du rétablissement de l'impôt du 60e auquel il avait souscrit en qualité de député de l'Etat, sa maison fut envahie, sa bibliothèque enlevée et il fut banni de la ville. Ayant adressé une requête, aussitôt ordre fut émis « d'agir à son égard selon l'équité », ce qui eut lieu; ses biens lui furent restitués.
  Mort à Liège l'année suivante, son inhumation eut lieu le 24 Février 1686, dans l'église de St-Severin.
Il avait épousé Madeleine Steynen, baptisée à St-Trond le 17 Mars 1616, inhumée à Huy, dans l'église de St-Denis, le 3 Février 1687. Ils eurent trois enfants: Pierre-Robert, qui suit, né à Liège en 1645 et deux filles nées à St-Trond. Catherine-Elisabeth le 21 Septembre 1646 et Marie, le 10 Septembre 1648.

  Pierre-Robert de Lantremange, né à Liège, baptisé à N.-D. aux Fonts, le 3 Juillet 1645 ; (Parrain Dom Pierre Steeven, chanoine de Nivelles, Marraine Catherine Raymundi). Jurisconsulte, Administrateur des postes et Conseiller de S. M. Impériale Léopold 1er, qui l'ennoblit par diplôme du 15 Janvier 1697. Cet acte fut rendu héréditaire pour les enfants et descendants du promu avec titre de Chevalier du St-Empire, le 19 Avril 1698, le tout attesté le 8 Janvier 1699 par mandement de S. A. le Prince de. Liège et par son héraut d'armes, (Gilles Le Fort, de Verviers). Ce document fut reconfirmé par diplôme du 26 Décembre 1822. 
  Par convenances du 17 Septembre 1676, Pierre-Robert épousa Marguerite Le Maître, fille de Jean, bourgeois de Liège (fils unique de Pierre) et de Catherine Gordinne, de Liège), baptisée à N.-D. aux Fonts le 15 Avril 1653. (Parrain Pierre Le Maitre; Marraine Jeanne Hurard , veuve de Gérard Gordinne). Ils testèrent le 16 Octobre 1708, elle mourut le 9 Juin 1711, lui le 20 Janvier 1733 et reposèrent dans la tombe qu'ils avaient fait ériger dans l'église des Dames religieuses de Ste-Claire à Liège, où ils avaient fondé un anniversaire. Ils eurent deux fils qui suivent :

  1.   Englebert de Lantremange, chanoine et écolâtre de la collégiale de N.-D. à Huy.
  2.   Eugène-Alexandre-Robert de Lantremange, né à Liège, baptisé à N.-D. aux Fonts le 13 Janvier 1678. (Parrain Godefroid Adalric Baron de la Margelle, chanoine de St-Lambert, au nom du Sgr Eugène Alexandre comte de la Tour Taxis; Marraine Madeleine Steene. Ce baptême fut la confirmation de celui du 29 Décembre précédent, par licence supérieure) Chevalier du St-Empire, Jurisconsulte, Avocat, Conseiller à la Cour féodale le 11 Avril 1700 par reposition de Henri de Courtejoie baron de Grace, nommé Conseiller du Conseil ordinaire par la Régence Impériale le 22 Août 1713, Député des Etats du pays de Liège, et Administrateur des postes de S. A. le Prince de Liège en Hollande et vice-versa.   Par convenances du 17 Mars 1713, il épousa Pétronille de La Tour, fille de Jean (Trésorier-général des Etats du Pays de Liège et Comté de Looz), et d'Elisabeth dite Isabeau de Slins, née à Liège, baptisée à N. D. aux Fonts, le 7 Novembre 1680, dit un écrit. Son mari mourait le 15 Avril 1713, elle le 5 Janvier 1750, et tous deux enterrés dans l'église Sainte Claire à Liège. Ils laissèrent deux fils, qui suivent :


  1. Pierre-François de Lantremange, né à Liège, baptisé à N. D. aux Fonts, le 4 Septembre 1716. (Parrain, Pierre de Hallebaye, Chanoine de St-Paul, pour Pierre-François Le Maitre, Marraine Isabelle de Slins, épouse de Jean de La Tour.) Chevalier du St-Empire, Licencié ès-lettres et sous Diacre, en 1759. Ayant obtenu la prébende de Lothaire Charles-François-Joseph Baron de Schenck de Smidtzburg, le 14 Février 1760, il fut reçu Chanoine Tréfoncier de St-Lambert le 19 du même mois.
  A cette fin, il prouva d'avoir fait ses études à l'école collégiale de St-Denis, à Liège, à celles de Louvain et de Reims, et à cette dernière il obtenu le grade de Licencié en droit.
  Vu ses lumières, le Chapitre cathédral l'envoya siéger en qualité de Conseiller à la Cour allodiale, le 7 Janvier 1767, et le nomma Conseiller de S. A. à la Chambre des finances. Il fut reçu Chanoine et Écolâtres de N. D. à Huy, le 26 Mai 1774. Son nom figure sur la liste des francs-maçons qui, à Liège, assistèrent, le 12 Octobre 1775, à l'inauguration de la loge nommée La parfaite intelligence.

  Ayant obtenu du Chapitre, sede vacante, par engagère, la Seigneurie de Jalhay, il y séjourna souvent, y mourut le 7 Novembre 1781, fut conduit à Liège et enterré dans la Cathédrale.
  Son papier mortuaire porte qu'il était le premier Seigneur de Jalhay en 1770 et que nul ne le fut avant lui, sinon le Prince. « Erat Toparcœ primus hujus loci ab anno 1770 nullus entra fuerat sed Princeps erat ».

  2. Jean Remacle de Lantremange, né à Liège, baptisé à N. D. aux Fonts 21 Décembre 1722, (Parrain Jean Bernacle de La Tour son grand père, Marraine Jeanne Le Maître Ve d'Etienne de Halebaye,) Chevalier du St-Empire, Licencié dans les deux droits à Reims en 1745, Administrateur des Postes connue son père, Conseiller de la souveraine Cour allodiale et Bourgmestre de Litige, nommé par le Prince, en la rénovation Magistrale du 19 Septembre 1773.
  En 1781, il se fit inscrire à la Chambre de Ste-Gertrude « en conformité du règlement de 1681 », et fut reçu comme « aisé de la Chambre St-Nicolas », institutions Liègeoises, qui remplaçaient les corps des métiers. Il mourut le 19 Juin 1783.
  Par convenances du 4 Mai 1767, il avait épousé à Rognon Marie-Barbe-Joséphine de Piette, née à Liège en la Paroisse St-Séverin, baptisée à N. D. aux Fonts, le 14 décembre 1742. (Parrain le Rd Sgr Gérard Jérôme de Hennet, Abbé de St-Gilles, Marraine Marie-Marguerite-Josephine de Nette.)
  Elle était fille de Théodore, Echevin, Conseiller de S. A. le Cardinal Jean-Théodore de Bavière, Prince de Liège, et de Marie-Barbe de Coune. Elle mourut le 28 Octobre 1807 et fut inhumée à Ste-Claire, près de son mari.
  Ils eurent sept enfants, dont deux morts très-jeunes, voici les autres :

  1.Marie-Barbe-Françoise de Lantremange, née à Liège le 4 Mars 1708, baptisée à N. D. aux Fonts, (Parrain Pierre François de Lantremange, Tréfoncier, Marraine Marie Barbe de Coune, Douairière de Théodore de Piette, Echevin). Mariée en 1res noces, le 27Avril 1789, à Jean Henri Lhermiotte, Avocat et Echevin de Maestricht. Il mourut à la fin de Févier 1793, laissant un fils, Jean Maximilien Joseph, né le 18 Février 1792, baptisé à N. D. aux Fonts, et qui fut aussi Echevin de Maestricht.
En 2des noces elle épousa, le 27 Mai 1798, à Liège, Gabriel Lemarchand, né dans la commune de La Ferrière, département du Calvados, Capitaine au 12° Régiment de cuirassiers. Ils eurent une fille, Marie Henriette Eugénie, née à Liège le 22 Octobre 1805, morte le 4 Mai 1807.

  2.Henri-Philibert de Lantremange, né à Liège le 25 Mai 1769, baptisé à N. D. aux Fonts (Parrain Henri-Philippe de Coune, son grand-oncle. Chanoine et chantre de St-Martin. Marraine, Marguerite Catherine de Piette, sa tante,) mort le 28 Août même année.

  3.Maximilien-Henri-Théodore de Lantremange, baptisé à N. D. aux Fonts, le 17 Juin 1770. (Parrain, le Tréfoncier Maximilien Henri de Coune, son grand-oncle. Marraine, Marie Elisabeth Théodorine de Piette, sa tante.) Chevalier du St-Empire. Il commenca ses études à l'école collègiale de St Denis à Liège, y eut pour maitres le Recteur J.-F. Faisant, de 1737 à 40; à Louvain, les professeurs Bringo, Chiavary et Trichagen. Il acheva ses classes à Reims puis « fréquenta les actes publics ». De ces travaux attestèrent huit témoins de cette dernière ville et dix-huit de Louvain, lorsqu'il fut reçu Chanoine de St-Lambert, à l'âge de 21 ans, ayant déjà le titre de Chanoine de N. D. à Tongres. Sa réception à Liège se fit comme coadjuteur de son oncle Pierre François, précité. Il entra au Chapitre le 23 Novembre 1791 en qualité de Chanoine gradué et fut le second Seigneur de Jalhay.
  En Juillet 1794, il reçut ordre de l'Empire de se retirer en Allemagne où il resta jusqu'au traité de Luneville, 9 Février 1811.
  A cause du désir vivement exprimé d'habiter son pays, il ne fut point porté en 1803 sur la liste des pensionnaires de l'Allemagne.
  En 1816, il fut admis à porter la décoration de Tréfoncier de l'ancienne cathédrale de St-Lambert et reçut de ce chef une pension du roi Guillaume 1er. Ce souverain, par décret du 5 Novembre 1816, avait fait connaître qu'il était disposé à se charger, pour les Pays-Bas, du payement des pensions dues au Chapitre de Liège, à dater de Juin de la dite année.

  Ce Seigneur Tréfoncier mourut à Liège, le 28 Janvier 1838.

  A défaut de portrait, l'un de ses ports d'armes offrira quelques renseignements. Car après avoir disposé en maître de toute la chasse du Ban, il paya 30 francs le permis lui délivré par le Préfet de Micoud, et le dévisageant comme suit :

  • Taille 1m77.
  • Cheveux châtains, Front haut,
  • Soureils châtains, Yeux bruns,
  • Nez long,
  • Bouche moyenne, Visage ovale,
  • Teint ordinaire.
  En 1823, pour 2 francs, le Comte de Marnix, Grand veneur pour les Provinces méridionales des P. B. et Grand officier de la couronne, lui accorda de chasser avec un ami dans les domaines de Hertogenwald et de Jalhaye.

4. Marie-Marguerite-Henriette-Pétronille de Lantremange, née à Liége le 17 Décembre 1771, baptisée à N.-D. aux Fonts. (Parrain 1e Chevalier Henri-Guillaume-Philippe de Coune, Marraine Mlle Marguerite de Piette, sa cousine). Mariée à Liège le 10 Janvier 1793 à Louis Gounion de St-Léger, capitaine au 49° régiment d'infanterie ci-devant Vintimille, au service de France, mort à Emaus, paroisse de Ste-Gertrude, le 27 Juin 1797.

  Ils eurent un fils, Adrien-François-Théodore Gounion de St-Léger, baptisé à N.-D. aux Fonts, 1e 4 Mars 1796. (Parrain Pierre-Guillaume-Eugène de Lantremange pour son oncle le Tréfoncier Maxim-Henri-Théodore de Lantremange, Marraine Catherine de Piette). Il fut avocat à Liège.
5. Pierre-Guillaume-Eugène de Lantremange, né à Liège le 9 Août 1773, baptisé à N.-D. aux Fonts. (Parrain Pierre-Guillaume-Joseph de Saren , son oncle , mari de Elisabeth-Pétronille de Piette, marraine Marie-Elisabeth de Grand ry, épouse de Henri-Philippe de Coune) Chevalier du St-Empire, Jurisconsulte, il remplaça son père en qualité d'aisé à la chambre St-Nicolas, le 22 Novembre 1782; fut nommé avoué au Tribunal de première instance à Liège le 5 Octobre 1810, puis Vice-Président au même siége, avocat-général du Gouvernement Néerlandais, Chevalier de l'Ordre du Lion Belgique le 18 Juillet 1829, et Membre de l'Ordre Equestre de la province de Liège. Mort à Liège.

En 1re noces, par convenances du 3 Juin 1805, le 6 du même mois, il épousa, dans l'église de St-Denis à Liège, Marie-Christine Kinon, fille de N., prélocuteur et notaire, veuve de Lambert Planchar, avocat; elle mourut le 6 Avril 1806.
  Et en secondes noces, le 5 Septembre 1821, Julie-Marguerite-Joseph Nossent, née à Liège, fille de Nicolas-Joseph-Ernest et de Marguerite Anten.
   De ce second lit naquirent cinq enfants qui suivent:

1. Henriette-Marguerite-Eugénie de Lantremange, née le 25 Mai 1822, morte en son onzième jour.

2. Julie-Marguerite-Joséphine de Lantremange, née le 16 Juillet 1823. (Parrain Nicolas-Jos-Ernest Nossent  Marraine M"° de Piette.)

3. Eugène-Desiré-François-Joseph de Lantremange, né, le 23 Mai 1824. (Parrain Michel Hénoul-Nossent; Marraine Mme Gabriel Lemarchand, née Marie-B.-F. de Lantremange).

4. Joséphine de Lantremange, née le 18 Mars 1826 (Parrain Jean-Maximilien-Joseph Lhermiotte , Marraine Mme Hénoul-Nossent.)

5. Henri-Théodore-Marie-Nicolas de Lantremange, né 1e 17 Juin 1827, (Parrain Henri-Théodore de Lantremange, Avocat-général, Marraine Mme N.-J.-E. Nossent, née Marie-Marguerite Anten) Chevalier du St-Empire.
  Le 25 Août 1860, il épousa Julie Anten, née à Liége le 31 Décembre 1843, (Parrain Walter Galand, Avoué, Marraine Mme Damry, née Marie-Anne Galand) fille de Gérard-Joseph-Adolphe Anten, Docteur en médecine, Chevalier de l'ordre de Léopold, décoré de la Croix civique, Bourgmestre d'Ans et Glain, Membre de la Commission médicale de la province, &c., décédé à Liège le 13 Janvier 1878, et de Julie Damry. Cet homme bien estimable, doué d'un caractère charmant, mourut à Hovemont-lez-Liège, le 3 Septembre 1878.

6. Henri-Théodore-Remacle de Lantremange, né le 20 Août 1775, baptisé à N.-D. aux Fonts (Parrain Henri-Arnold de Jaminet, Bourgmestre de Liège, Marraine Mme de Saren, sa tante) Chevalier du St Empire, Jurisconsulte de la ville de Liège: Greffier à la Cour d'appel et Juge auditeur de la même Cour, par décret daté de Valladolid 15 Janvier 1809. Envoyé, par ordre impérial du 28 Juin suivant, en qualité de Président du Tribunal à Dinant; il y fut installé le 17 Août même annêe, et par décret daté de St-Cloud, 24 Avril 1811, nommé Avocat-général près la Cour supérieure de Liège, Chevalier de l'ordre royal du Lion Belgique et Membre de l'ordre équestre de la province de Liège.
  
   En 1830, étant resté fidèle à la cause du souverain déchu, il en reçut ses anciens honoraires comme pension; à ce titre, prit domicile à Maestricht, habita sa campagne de Vervi-Fontaine, près de Jalhay, se fit rayer du registre de sa ville d'adoption le 1er Juin 1864 et mourut 1e mois suivant, 20 Juillet, à Liège, célibataire.

7. Lambert-Joseph-François de Lantremange; né le 23 Décembre 1777, baptisé à N.-D. aux Fonts (Parrain et Marraine M. de Plancher et sa dame) Chevalier du St Empire. Mort le 7 Septembre 1779.
  Le 28 Décembre 1816, le Roi des Pays-Bas, Guillaume 1er, accorda délai jusqu'au 1er Mai 1817 à ceux qui désiraient réclamer les droits à leur réincorporation dans la noblesse de son royaume. Les trois frères susdits demandèrent au Conseil suprême de noblesse confirmation de leurs titres nobiliaires et de celui de Chevalier du St-Empire, héréditaire. Ils présentèrent à cette fin le diplôme de l'Empereur, du 15 Janvier 1697, le mandement de S. A. du 19 Avril 1698 confirmant le titre de noblesse, et le certificat du héraut d'armes du 15 Janvier 1699.
  Le diplôme original de chevalier accordé à Eugène-Alexandre-Robert s'étant perdu dans les confiscations et dispersions de meubles précitées, le registre de réception des membres du Conseil ordinaire fit foi pour le droit et la qualification réclamés.

  Voici 1es documents ayant trait à l'érection de Jalhay en seigneurie:

  « Nous Doyen et Chapitre de la très-illustre cathédrale de Liège sede vacante auxquels par la mort de S. A. Charles-Nicolas-Alexandre d'Outremont notre Evèque et Prince, l'administration de cet Evêché et Principauté tant au spirituel qu'au temporel appartient:
  A tous ceux qui les présentes veront salut, savoir faisons que condescendant à la demande nous faite par 1e Rd Seigneur Pierre-François de Lantremange notre confrère, nous lui avons engagé comme par cette lui engageons pour lui, ses représentans et ayants-cause, la Seigneurie et juridiction de Jalhay au Marquisat de Franchimont et dépendance, ainsi qu'elles se contiennent entre leurs bornes limites et joindans avec la chasse et la pêche, de même que tous autres droits seigneuriaux, haute, moyenne et basse justice, comme aussi le droit d'y créer officier et de conférer les places d'échevins et de greffier lorsque celles de ces derniers seront vacantes, avec tous autres droits, prérogatives, honneurs et franchises dont jouissent tous autres seigneurs gagistes. De même que l'exemption de logement, guet et garde pour les censiers et domestiques. (Voir les cens rentes et revenus qui tiennent notte continuelle à la recette du dit lieu, réservés etexceptés), et ce pour par le dit Seigneur de Lantremange ses représentans et ayants-cause en jouir, profiter et disposer jusqu'à retrait que la mense épiscopale et notre église pourront a toujours faire. Voir qu'il sera obligé de défendre, maintenir et conserver à ses frais les dites seigneurie et juridiction, de même que tous les droits y attachés, en bon père de famille, sans qu'ieelui puisse prètendre aucun désintéressement pour quelque prétexte que ce puisse être, et survenant à raison de la présente engagère et ce qui en dépend quelques difficultés, changements, modération ou interprétation il en sera connu et déterminé en sa chambre des comptes a l'exclusion de toute autre judicature, ensuite des privilèges d'icelle si mandons et commandons à tous nos officiers, justiciers et sujets de la dite Seigneurie de Jalhay et dépendances de tenir, respecter et reconnaître le dit Seigneur tréfoncier de Lantremange pour leur Seigneur, lui faisant les hommages et serment de fidélité et subjection ordinaire et accoutumée, car telle est notre sérieuse volonté. Donné sous notre seel capitulaire en la chambre des comptes à Liège, le vingt-huit Novembre 1771 ».
  
 Baron VAN DER HEYDEN DE BLISIA.
  L. (+) S.
  (Armes du Chapitre eu hostie rouge).

H. MOUILLARD , Secret per copiant originali conformen quod testor signatus Petrus-Josephus de Limborgh publicus Coesareus Notarius manu propria.
  Un duplicata de cette pièce porte ces mots: Pour copie conforme quod testor, A.-F. Detroz.
  L'octroi de la Seigneurie fut accordé à P.-F. de Lantremange :
  « Parmi refournissement de la somme de mille fl. BB. qu'il a là même réellement compté et numeré en mains de notre trésorier général de Grady pour être appliqués au profit de la dite mense, comme aussi d'une autre somme de deux mille florins pareils que le même Seigneur avait compté pour l'engageure du trois May 1765 lui faite des droits de chasse et de pêche dans une partie du bau de Theux au dit Marquisat, de laquelle engagère il se déporte y résilie et renonce par cette, tellement que pour le futur la dite partie de chasse et de pesche sera comme elle est pour le futur réunie à la dite mense épiscopale: Faisant ensemble les dites sommes celle de trois mille florins Brabant tant seulement ».

  Les premiers actes officiels du nouveau Seigneur furent les nominations d'un Bailly et d'un Mayeur, titres dont il gratifia la même personne, vu les mérites exceptionels du promu, nommé chef de la haute Cour de justice par le diplôme suivant :
  « Nous, Pier François de Lantremange, tréfoncier de la très-illustre Cathédrale de Liège, Seigneur de Jalhay et dépendances, voulant pour la bonne administration, justice et maintien de nos droits et juridiction pourvoir à ce que l'office de Mayeur de notre justice de Jalhay soit remplie par une personne de preud'homie, capacité et suffisance, nous confiant en la diligence et suffisance du sieur Antoine François Detroz, nous avons bien voulu lui donner et conférer gratis comme par cette nous lui conférons et donnons le dit office pour dument et loyalement s'acquitter des devoirs et obligations aux honneurs, droits, prérogatives et émolumens qui y appartiennent, à condition que comme notre Mayeur et Officier il servira gratuitement dans les affaires concernant notre service. Et commandons aux Echevins de notre dite justice, qu'après 1e serment prêté et autres devoirs requis et accoutumés, ils ayeut à l'admettre, reçevoir et reconnaltre comme notre Officier et Mayeur sans lui faire ni permettre qu'il lui soit fait aucun trouble dans la libre, pleine et paisible jouissance du dit office, le tout cependant jusqu'à révocation, car ainsi nous plait-il .
  Donné à Liège, ce 2 Septembre 1772 et muni du caehet de nos armes.
  DE LANTREMANGE Tréfoncier Seigneur de Jalhay et dépendances ».
  La reconnaissance de ses droits par la Cour et la rénovation de serment par les Echevins et Grefiler eurent lieu comme suit :
  « Le 21 Septembre 1772 par devant moi A.-F. Detroz, notaire, Bailly et Mayeur de M. de L'entremenge (sic)

Tréfoncier Seigneur de Jalhay et de sa dépendance &. &. sont comparus personnellement MM. les Echevins et Greffier de la Cour et justice du dit Jalhay, nomément T. de Vinamont, Jaspar Darimont, Jean Raway, Jean Darimont, Servais Crette, Henry Caquelet et Henry Henkinet, tous Echevins et Jean Lambert de Vinamont, Greffier de la dite Cour, tous spécialement convoqués et assemblés en la maison magistrale du dit lieu, dans leur chambre scabinale; là même leur a été remontré, de la part de moi le dit Detroz signe en qualité dite, qu'on ne pouvoit nullement ignorer que M. le Tréfoncier de l'antremenge (sic) n'étoit fait Seigneur du ban de Jalhay et de sa dépendance et qu'il en constoit dans les registres du Greffe et de justice : Ce pourquoi il est expédient pour le bien être, que Messieurs de la justice et leur Greffier connoissent par acte public le dit M. de lantremange (sic) tréfoncier pour seigneur de leur justice, ban et communauté de Jalhay, tel effectivement qu'il est, à quel effet on leur demanda qu'ils eussent a renouveller leur serment de fidélité qu'ils ont cy devant prêté à leur admission de charge d'Echevin et de Greffier, ce qu'ils ont après meure délibération tous l'un après l'autre unanimement renouvellé prêté selon style ayant promis de servir gratis le dit seigneur dans les affaires concernantes son service et le dit office; en présence des sieurs Jean Pierre Parotte et Jean Adam Bourgmestres en état, en ordonnant à leur Greffier de registrer le dessus dans le registre du Greffe pour y avoir recours au besoin, ce qui fut de par le dit Detroz, en qualité dite, accepté pour et au nom du seigneur de l'antremenge avec constitution sur (le mot manque) pour l'insinuation et la légalisation du prémis ubique sur (le mot manque) ce ainsi fait et passé dans la maison magistrale du dit ban de Jalhay le jour et an que dessus : J. Devinamont Greffier, par ordre de la Cour, J. C. Parotte testis, J. Adam jeune testis ».
  Suivent les deux seuls incidents qui se présentèrent dans l'application des droits féodaux dont il s'agit:
1772. « Messieurs les Echevins de la Cour de Justice de Jalhay,
  Le Seigneur et officier de ban et communauté de Jalhay et sa dépendance: Etant venu que N., de Surister, s'étant opposê aux effets de la justice le sieur officier du Seigneur déduit contre le dit.... 1es articles d'imposition criminelle suivants:
1° Qu'il est véritable que M. le Tréfoncier de Lantremauge est Seigneur de Jalhay et de sa dépendance.
2° Qu'il est véritable que 1e sieur Antoine-François Detroz est Mayeur, Bailly et Officier du dit Sgr de Jalhay et de sa dépendance et qu'en cette qualité toutes corrections et amendes lui appartiennent.
  Un acte posé par le Lieutenant Gouverneur du Marquisat provoqua une observation de l'héritier du Chanoine Tréfoncier, qui en reçut cet exposé :
  « A Monsieur De Lantremange, Seigneur de Jalhay &c. &c. à Liège,
  Quand j'ai fait enregistrer ma commission au greffe de Jalhay je n'ai pas eu l'intention de donner la moindre atteinte à vos droits seigneuriaux, je sais que représentant M. le trefonsier vous jouissez là du droit de haute et moyenne justice mais comme en fonction de Lieutenant Gouverneur j'y dois faire l'insinuation des mandemens et ordonnances de S. A. et en cas que les habitants dussent sortir en armes de votre juridiction, il paraît de nécessité que ma qualité y soit connue c'est pourquoi je l'ai fait enregistrer après que votre Greffier m'eut dit que mes devanciers les avaient fait enregistrer du temps de Monsieur le Tréfoncier.
  C. A. Pfeffer Lt Gouverneur. Spa, 2.1 Janvier 1782. ‑
  Les de Lantremange furent aussi au siècle dernier Seigneurs de Goé avec droit de chasse dans la forêt de Hertogenwald.
  A côté des généalogies des chefs nobiliaires des deux Seigneuries que le Ban de Jalhay posséda, il ne sera pas sans intérêt, croyons-nous, de dire quelques mots concernant la famille du seul Bailly qui l'ait desservi. Il appartenait à l'une des plus anciennes familles nobles de Verviers et dont les membres, dans les hautes fonctions administratives, judiciaires et ecclésiastiques qu'ils occupèrent, rendirent de signalés services.
  Il descendait de ce Remacle Artus Detroz, qui Bourgmestre de Verviers en 1470 y fit relever le Péron (emblème de liberté) qu'avaient abattu les Bourguignons, et dont l'un de ses descendants devint aussi Bourgmestre de Verviers au XVIe siècle. -
  C'est ainsi que s'exprime l'historien et Lieutenant Gouverneur de Verviers Remacle Joseph Detrooz, qui descendait également de Remacle Artus, et nous apprend en outre, en la préface de son Histoire du Marquisat, que son grand-oncle Hubert Detrooz, Chanoine et Grand chantre de St Paul à Worms, composa en 1660 un volume de notes historiques sur le Franchimont, ce dont son oncle, Chanoine dans la même église et mort en 1724 fut le continuateur. Ce travail a êté la source de l'oeuvre intéressante publiée par leur petit neveu et neveu. Remacle Joseph Detrooz, l'historien, était fils de Remacle-Martin, Echevin de la Cour de Justice de Verviers et de Catherine de Thier; Pierre-François fils de Remacle Joseph, fut Mayeur de la Cour de justice de Verviers, de 1792 à 1794; il épousa Jeanne-Ida Kaison, dont deux enfants : Théophile marié à Joséphine Hauzeur et Marie-Thérèse-Josephine-Amélie; elle légua sa fortune pour l'érection d'une paroissiale de St-Antoine à Verviers, et mourut célibataire le 18 Août 1867.
  Leur père avait été capitaine de l'une des huit compagnies bourgeoises de Verviers, réorganisées en 1792 par les ordres du Prince de Liège Hoensbroeck et en tète desquelles on avait placé les représentants des familles les plus honorables. Et leur oncle Alexandre Detrooz, y était aussi capitaine auditeur avec le même rang que les autres capitaines.
  Quant au père du Bailly de Jalhay, il se nommait Pierre, né à Verviers le 3 Janvier 1663, fils de Nicolas Pierre et de Marie Thomas fille de Remacle, et était petit-fils de Nicolas et de Anne de Bilstain, fille de Jean, élu Bourgmestre de Verviers en 1586.
  Ce Pierre qui nous occupe quitta sa ville natale pour aller exercer à Sart, lez-Spa, les fonctions de notaire; il y épousa Marie Bougnée fille de Bastin ou Sébastien.
  Leur fils unique Antoine François naquit à Sart le 16 Mars 1716, y épousa Marie Françoise Deschamps, dont la famille s'était alliêe en 1559 à celle des Groulart, Seigneurs de Surister, par le mariage de Bertholet Deschamps, de Foyr, greffier puis Mayeur de Jalhay, avec Jeanne Groulart, fille de Jean le 3e du nom. Et nous rencontrons un écrit ancien, sans date, portant oes mots :
Remacle de tro à Verviers époux d'Isabelle Groulart fille de Jean.

Antoine François ayant succédé à Sart, en la charge de son père, il fut ensuite appelé à Jalhay et promu aux hautes fonctions de Mayeur, et de Bailly, comme on a vu, et aussi à celles de Mambour d'Office du Gouverneur.
  Il s'acquitta de ces beaux devoirs avec une grande distinction, jusqu'à la révolution Française, fut le dernier à les remplir puis retourna à Sart dont il devint Bourgmestre.
  Il eut trois fils : 1. Antoine François, Carme Déchaussé, mort le 28 Juin 1818.
2. Pierre Georges, Curé de Sart, mort 1e 30 Mai 1833.
3. Nicolas Joseph, licencié en droit. Il fit partie nous dit-on, du Conseil privé des derniers Princes Evèques de Liège, et laissa de sa femme Catherine de Poulandée, un fils :
  Constantin François qui épousa Jeanne Jamolet fille de Walter Moleus dit Jamolet; il eut deux fils que voici :
1. Nicolas-Joseph-Auguste, né à Liège 13 Décembre 1814, Président actuel du Tribunal de première instance à Liège, Chevalier de l'Ordre de Léopold, époux en premières noces de Aline Lacoste, fille de feu le général belge de ce nom, décédée à Liège en 1863; et en secondes noces de Marie Graux, soeur de M. Graux, Sénateur, Ministre des finances, etc.
2. Jules Constantin, né à Liège en 1824, premier Avocat Général à la Cour d'Appel de Liège, époux de Clara Vaust, fille de feu le Docteur et professeur à l'Université de Liège, de bien chère mémoire.
  Il est d'autres descendants du Bourgmestre Remacle Artus issus de la branche demeurée à Verviers, laquelle était représentée en cette ville à la fin du siècle dernier par les enfants de Remacle Martin précité, entr'autres le Lieutenant-Gouverneur susdit et son frère Henri-Joseph, Notaire Impérial.
  De celui-ci descendait Henri-Joseph, Notaire Royal et Greffier du Conseil de Régence à Verviers, époux de Marie-Françoise Angenot, mort en 1824 laissant deux fils : 
1. Henri-Edouard-Joseph, né le 27 Mars 1804, Notaire Royal à Verviers, où il fut aussi Secrétaire de la Commission de sûreté publique le 28 Août 1830, Major commandant la garde urbaine, succéda à Jean-Théodore Mors au grade de Colonel commandant la garde civique mobilisée du canton de Verviers le 12 Juillet 1831, Juge suppléant à la justice de paix du même canton. &c.
  Il épousa Cathérine Groulart, de Verviers, fille de Lambert (de l'ancienne famille précitée) et de Marie Kruppels, et mourut le 2 Juillet 1859.
2. Mathieu-Jules de Trooz, Colonel de cavalerie. Chevalier de l'Ordre de Léopold, &c., &c , né à Verviers en 1812, mort à Louvain en 1869, êpoux de Julie-Caroline‑
Joséphine comtesse du Chastel de la Howarderies, fille du Comte Eugène et de Dame Thérèse de Cock, et petite fille du et comte Denis Pierre, Préfet de la Dyle.
  Notons aussi qu'un acte de vente à Jalhay, de 1649, cite Wilkein de tro et qu'en 1704 Anne de tro épouse à Nicolas Dethiou fonda un anniversaire à l'autel des Sts Gilles et Amie dans l'église de Jalhay.
Les Detroz, Detrooz, ou de Trooz, issus de la branche de Verviers, portent pour armoiries « Coupé mi parti, au 1er parti d'argent au lion de gueules, rampant, lampassé de gueules et armé de sable ; au 2° d'argent à quatre pals de sable; au 3° d'azur à 3 lozanges d'argent posés 2 et 1.
  L'écu de cos armes est timbré d'un casque d'acier poli, posé de profil, surmonté du lion de l'écu. Les lambrequins sont d'argent et de gueules  ».   Et nous osons prier les possesseurs de détails inédits concernant les deux essais généalogiques qui précèdent, de daigner nous les communiquer, afin de les insérer, s'il y a lieu, dans la seconde partie de la présente Notice.



  La première partie de la présente notice relate surtout les incidents et événements belliqueux relatifs au Ban devenu commune. La seconde s'attache spécialement à tout ce qui les intéresse comme organisation, administration et instruction.
Chers Lecteurs,
  Daignez nous pardonner de venir si tardivement chercher à compléter une Notice commencée en 1879, concernant une cinquième partie du Franchiront, dite Chef Ban, composée de deux très anciennes et très intéressantes seigneuries : Jalhea ou Jalhay- ou Jalheau, et Surister.
  Le long retard résulta de l'espoir incessant de rencontrer des documents nombreux décelant, pour toute époque, quel fut l'esprit des sujets de ce sol que les ancêtres nous disaient si braves, que nous voyons si amoureux du travail et que nous avons admirés toujours dans leur ardeur à la fois laborieuse et pacifique.
  Or, dès les débuts de l'existence, certains événements savent impressionner au point de voir les voeux éclos en ces moments comme autant de devoirs impérieux à accomplir. '
  Dans la première partie du présent recueil, p. 176, on a vu comment, lors de la bourrasque révolutionnaire du 28 août 1830 en notre ville, la population du Ban de Jalhay s'était portée généreusement au secours de Verviers. Combien sa présence y fut efficace au maintien de l'ordre, auquel étaient portées déjà de bien funestes atteintes.
  L'émotion produite par les pillages était extrême, un grand péril paraissait inévitable, le secours inattendu sut tout rasséréner ; l'on vit encore ce que valent, en certaines circonstances, une trentaine d'hommes résolus, par leur seule présence. Autant l'anxiété avait été ardente, autant la reconnaissance fut vive à la vue de ces dévoués qui, sans autre appel que l'élan de leur grand coeur, venaient se livrer à la défense de notre chère cité menacée, le tout accompli avec un calme et une modestie exemplaires. Dès ce jour, veilla le désir de vivre, pour ainsi dire, dans l'intimité des faits et gestes de ce groupe inoubliable.
  Heureusement, ses archives, quoique souvent ébréchées, et les racontars cueillis de tous points, concoururent à démontrer aussi ce qu'étaient la constitution, l' organisation de l'un de ces bourgs chef Ban, soutien de notre ancien Marquisat et cela depuis le sous-sol jusqu'à ses institutions les plus élevées.



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